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mercredi 19 novembre 2014

Déols.

Déols.
département de l'Indre

Au nord de Chateauroux, à 2 kilomètres, au milieu d'une vaste plaine, sur la rive droite de l'Indre, est ou plutôt était située l'ancienne ville de Déols ou Bourg-Dieu, autrefois l'une des plus considérable du bas Berry. C'est une vaste ruine; partout des pierres et des murs abattus, partout la trace de guerres impitoyables, à la suite desquelles on pillait, brûlait, tuait au nom de Dieu. La porte de l'Horloge et la rue sont encore debout. Un nouveau pont a remplacé celui qui se trouvait autrefois en face de la porte de Paris. On aperçoit encore les piliers quand les eaux sont basses.
Selon la chronique écrite par un moine de l'abbaye, à l'époque où saint Ursin prêchait l'évangile aux habitants du Berry au quatrième siècle, Denis, Gaulois, possédait les terres de Dieux et de Déols; il était doublement vénéré, ayant, dit la chronique, plus de six pieds et plus de cent ans; avec cela bon, généreux, et délivrant le pays d'animaux dangereux, "assez semblables à des licornes, dit encore la chronique, mais sans cornes". A la suite de fléaux qui se reproduisirent durant plusieurs années, Dieu lui apparut pendant son sommeil, et lui donna l'ordre d'aller chercher à Bourges le Romain Léocade, et de le nommer son successeur après qu'il se serait fait baptiser.
Léocade reçut le baptême avec son fils Ludre. Ce fils mourut peu de temps après, et, sur sa demande, son corps fut déposé dans un tombeau que son père venait de faire construire pour lui-même. Le tombeau, en marbre blanc, est orné d'un bas-relief dans le style gallo-romain, et d'une frise qui semble appartenir à une époque ultérieure, et représenter, soit des actes de la vie chrétienne, soit des scènes de chasse. 


Il serait parfaitement conservé si une superstition aveugle ne venait chaque année en enlever quelques morceaux pour guérir certains malades. On attribue généralement à Léocade la fondation de la ville de Déols. Ses successeurs y bâtirent des palais et y résidèrent jusqu'au dixième siècle. 
Cette histoire peut se résumer en quelques mots. Ebbes, l'un d'eux, recueille des moines bretons qui fuyaient les Normands; il fonde pour eux l'abbaye de Saint-Gildas, et meurt des suites d'une blessure reçue dans une bataille contre les Normands. Raoul le Large, son fils, se retire à Chateauroux. L'abbaye acquiert, à partir de cette époque, une puissance considérable; les papes confirment ses privilèges; ils la visitent et la nomment la Mamelle de Saint-Pierre; l'abbé prend le titre de prince de Déols et bat monnaie. Sa puissance fait envie à tous les partis. Ruinée par les Normands au dixième siècle, et rebâtie en 902, elle subit un siège en 1076; en 1152, la plus grande partie de la ville est brûlée; en 1187, Philippe-Auguste veut la reprendre aux Anglais. Au seizième siècle, les huguenots et les catholiques en sont maître tour à tour. Pendant la Ligue, elle subit plusieurs sièges.
Du reste, la fatalité a poursuivi l'abbaye de Déols jusqu'à notre temps. En 1829, il en subsistait encore de magnifiques ruines: le général Bertrand, ayant appris qu'on voulait les détruire, donna ordre de les acheter; mais déjà elles étaient vendues pierre à pierre au maçon. 


Aujourd'hui, comme témoignage de son existence, il ne reste plus debout qu'un clocher d'un style particulier, en ce que l'on y voit, sur une tour carrée, un toit conique et des clochetons cylindriques couronnés de cônes.
"Les clochetons, dit M. de Gaumont dans son excellent Abécédaire d'archéologie, n'ont guère été employés durant le règne de l'architecture romane; j'en connais à peine, dans le nord-ouest de la France, quelques exemplaires du onzième siècle, et l'on peut affirmer qu'ils ont été fort rares avant la seconde partie du douzième. L'église Notre-Dame de Poitiers en a plusieurs d'une forme très-élégante, et j'en ai vu de pareils sur d'autres églises regardées comme appartenant au douzième siècle. On peut admettre que leur présence dans les monuments romans est une des innovations qui préparaient insensiblement l'avènement de l'architecture à ogives".

Le magasin pittoresque, juillet 1851.

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