Translate

mercredi 8 octobre 2014

Les gouffres de la forêt d'Orléans.

Les gouffres de la forêt d'Orléans.


L'hydrologie de l'Orléanais offre un intérêt tout particulier à l'étude, en raison des circulations souterraines qui s'y opèrent et qui se traduisent par des phénomènes variés.
Dans un récent article (1), nous avons décrit ceux qui ont pour siège le Calcaire de Beauce; aujourd'hui nous nous occuperons de ceux qui se produisent dans les argiles subordonnées aux sables burdigaliens de l'Orléanais.
Une première série d'excursions nous faisait connaître, en mars 1907, les gouffres de la forêt d'Orléans situés dans les cantons de Mézières et des Diableaux.
Dernièrement, M. Lucien Johanet, d'Orléans, a bien voulu nous envoyer le relevé des autres gouffres de la forêt et des observations qui concordent absolument avec les nôtres; c'est leur ensemble que nous allons exposer.
On doit distinguer dans la Forêt d'Orléans deux catégories de gouffres: ceux qui émettent de l'eau et ceux qui en absorbent.
A la suite de pluies abondantes et continues, certains gouffres deviennent émissifs, c'est à dire que l'eau jaillit comme d'une source, en donnant naissance à une rivière.
En se reportant à la carte ci-jointe, on peut voir que dans la partie de la Forêt d'Orléans qui nous intéresse, il n'y a que les gouffres compris dans le groupe II qui donnent de l'eau. Nous croyons que c'est en raison de sa proximité avec le groupe I, car c'est seulement quand les gouffres du groupe I sont pleins que le groupe II devient émissif.



L'eau arrive aux gouffres par des rigoles ou des fossés. Tous, sans exception, se rencontrent dans les régions où la marne blanche miocène se trouve en contact immédiat avec la terre végétale.
Ils ont la forme d'une cuvette qui varie de 5 à 30 m. de diamètre. Au fond se trouve l'entonnoir vertical qui oscille entre 5 et 25 m. de profondeur. En temps de repos et de sécheresse, on ne voit pas l'entonnoir, qui est dissimulé par des amas de feuilles mortes. Mais immédiatement après une crue, on le distingue parfaitement.
Le groupe I dit "les Orfosses-Mouillées" est le plus important et celui qui renferme les plus grands gouffres; ces derniers sont accompagnés de marécages tourbeux et de terrains mouvants dangereux à la marche. Ils sont une quinzaine, reliés entre eux par des couloirs profonds mais à ciel ouvert, puis par des couloirs souterrains.
M. Johanet nous avisait le 11 mars dernier que tous les gouffres étaient pleins par suite des pluies persistantes et que le groupe II, devenu émissif, donnait naissance à la rivière de Beauce: "La Retrève".
La Retrève, suivant le régime des gouffres est intermittente. Elle a un régime torrentiel et une largeur de 20 m. en moyenne. Elle doit remplir dix gouffres avant de pénétrer dans la plaine de Beauce, à Cercottes et Gidy; nous ne pouvons mieux la comparer qu'à La Vogue, rivière torrentielle que nous avons étudiée en septembre 1907 à Montmirail (Marne).
Le groupe des gouffres le plus important est le groupe III (Sainte-croix). Il n'existe pas de gouffre là où il y a du sable; ils sont tous dans les fissures de la marne blanche miocène et leurs eaux coulent au contact du "Calcaire de Beauce"; lorsque les gouffres sont pleins, les puits de la région se remplissent.
On peut voir par ces quelques renseignements, encore incomplets, combien l'étude des cours d'eau souterrains offrent d'intérêt; nous avons affaire, pour le cas présent, à un régime mixte, intermittent, différent des régimes qui s'établissent dans les contrées calcaires, et dont certainement il y a peu d'exemples en France.

                                                                                                                          Paul Combes, fils.
                                                                                                                        Attaché au Muséum.


(1) Paul Combes, fils; L'hydrologie du Val d'Orléans. Cosmos n° 1164, 18 mai 1907, pp.543-546, 3 figures.

La Nature, deuxième semestre 1908.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire