La fête de la grand'maman.
Comme on lit bien sur le visage de cette bonne grand'mère les sentiments qu'elle éprouve! Dans sa joie il y a de la surprise, de l'émerveillement. C'est que pour elle, en ce moment où on lui souhaite sa fête, où on lui prodigue baisers et cadeaux, tout est changé; le cours de la vie est comme suspendu, une brusque révolution s'opère.
Elle, dont tous les jours, tous les instants se passaient à donner, voici qu'à son tour elle reçoit. Cette douceur de recevoir, d'être l'obligée de quelqu'un, elle la goûte si rarement, à de si longs intervalles, qu'elle l'a oubliée, et voici que de nouveau elle l'éprouve. Elle, qui ne savait plus que penser aux autres, dont la vie s'effaçait tout entière dans l'abnégation, elle se retrouve, elle revit pour des joies personnelles, elle ressuscite par la reconnaissance.
Et de qui est-elle obligée? De ses petits enfants. Aujourd'hui ils ont mis de côté leurs jeux, leurs plaisirs, leurs petits intérêts, pour s'occuper d'elle; pour elle ils se sont privés de quelque chose, ils ont sacrifié les fleurs de leur jardin, et, tout fiers, tout radieux de leur sacrifice, ils lui offrent leurs bouquets!
En ce moment, l'être chéri, choyé, que chacun se propose de rendre heureux, c'est elle! C'est elle qui est l'enfant, l'enfant au front ridé, aux cheveux blanchis. Le sentiment de cette délicieuse métamorphose remplit son cœur, l'oppresse; des larmes coulent de ses yeux et mouillent la main de sa petite-fille étonnée, qui les essuie avec ses caresses.
Magasin pittoresque, 1870.
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