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vendredi 4 juillet 2014

Crétinisme.


Crétinisme.
Cagoths de l'Ouest et du Midi de la France.


Les yeux petits et clignotants, la bouche grande, la lèvre pendante, le front bas, des joues flasques, s'élargissant sur un énorme goitre qui cache la totalité du cou, un teint livide et basané, un air de stupidité qu'augmente encore une prononciation lente et peu distincte, la taille courte, ramassée, une complexion faible, et une attitude nonchalante: tel est le crétin du Valais. Qui pourrait reconnaître dans ces derniers les descendants des Goths, de ce peuple si fier, si belliqueux? C'est cependant une origine dont témoigne l'histoire.
A la bataille de Vouglé, près Poitiers, donné en l'an 507, les Visigoths furent défaits par les Francs. Ils y perdirent Alaric leur roi, qui, dit-on, fut tué par Clovis lui-même. Les plus éminents, les plus vaillants d'entre eux se retirèrent en Espagne: ceux qui restèrent en France se soumirent aux vainqueurs; mais ils étaient de la secte d'Arius. Mêlés aux descendants des Alains, des Suèves, des Hérules et des Huns, et persécutés comme eux, ils se réfugièrent dans les lieux les plus inhabitables, et conséquemment les plus malsains de la France.
Confondus, ne formant plus qu'une caste abhorrée et maudite, ils y furent en proie à la plus affreuse misère, à toutes les maladies qu'elle engendre. Dans les solitudes de la petite Bretagne, et dans un âge un peu plus civilisé, à peine leur permit-on de vaquer aux professions de cordier et de tonnelier qu'ils avaient embrassés. Le Parlement de Rennes fut obligé d'intervenir pour leur faire accorder la sépulture. On les trouve alors désignés par les noms de cacous et de caqueux; et les ducs de Bretagne avaient ordonnés qu'ils ne parussent point sans une marque distinctive. Vers l'Aunis, on retrouvait leurs pareils cachés dans l'île de Maillezais. La Rochelle était peuplées par les coliberts ou esclaves. Ils reparaissent sous le nom de cahets en Guienne et en Gascogne. Dans les deux Navarres, ils s'appellent quelquefois caffos. On les découvre enfin dans les montagnes du Béarn, de la Bigorre, des quatre Vallées et du comté de Comminges. Là ce sont ces cagots ou capots (de caas goth, chien de Goth): il ne leur est permis que d'être bûcherons ou charpentiers, et ils doivent, en cas d'incendie, marcher les premiers au feu. On les donne, lègue et vend comme esclaves. Ils sont réputés ladres et infects, n'entrent à l'église que par une petite porte séparée, et y trouvent leur bénitier particulier et leur siège à part. En premier lieux, les prêtres ne veulent pas les recevoir à la confession. On croit même leur faire honneur en prenant sept témoins d'entre eux pour valoir un témoignage.
Enfin, ils furent en 1460 l'objet d'une réclamation des Etats du Béarn, voulant qu'il leur fût interdit de marcher pieds nus dans les rues de peur d'infection, et qu'ils portassent sur leurs habits leur ancienne marque distinctive, le pied d'oie ou de canard.
De nos jours, les maladies cutanées dont ils étaient couverts ont disparu, et ils ne sont plus qu'un objet de compassion. Cependant, dans la Basse-Bretagne et dans les pays Basques avoisinant l'Espagne, le bas peuple les regarde encore comme une race réprouvée, et leur attribue souvent une partie des malheurs qui lui arrivent.

Magasin Pittoresque, 1838.

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