Ne laissons rien perdre.
L'ordre et l'économie, si essentiels à la prospérité de nos ménages, nous imposent de ne rien jeter, avant de nous être assurés qu'on ne pourra pas tirer quelque parti des choses. Très rares sont les rebuts dont on ne peut rien faire.
Les cosses de pois.
Les cosses de pois seront soigneusement lavées et si elles sont un peu fanées, il suffira de les laisser tremper quelques heures dans l'eau fraîche pour qu'elles retrouvent leur fermeté. On les jettera alors dans l'eau bouillante salée où elles cuiront une heure ou une heure et demie. Écrasées ou pilées dans une passoire, ces cosses donneront une purée avec laquelle on fera une soupe délicieuse. Les cosses de pois lavées, puis essuyées dans un linge, seront séchées au four jusqu'à dessiccation complète et jusqu'à ce qu'elles aient pris une teinte brune. On les enfermera dans une boite en fer-blanc. Ce sont d'excellents colorants pour le pot-au-feu.
Les écorces de melon.
On essuiera l'écorce, côté extérieur, avec un linge un peu rude et on enlèvera la chair mûre qui aurait pu rester après l'écorce. Celle-ci, coupée en petits dés, sera blanchie pendant quelques minutes dans l'eau bouillante très fortement salée, puis égouttée. On mettra ces petits morceaux dans du vinaigre bouillant fortement aromatisé avec des branches d'estragon, du poivre en grains, etc. On y ajoutera des oignons blancs très petits et le tout, mis en bocal, deviendra un excellent condiment remplaçant le cornichon.
Le persil.
Toutes les ménagères connaissent l'utilité du persil dans les préparations culinaires, elles savent également combien il est difficile d'en avoir en hiver. En été, au contraire, jardinières et fruitières en donnent abondamment. Acceptez tout le persil offert, demandez-en même. Tous les deux ou trois jours, prenez celui que vous n'aurez pas utilisé, lavez, essuyez dans un linge, enlevez les tiges et faites sécher le feuillage au four. Conservez en boites de fer-blanc et vous aurez sous la main, pour l'hiver, un assaisonnement ayant toutes les qualités du persil frais.
Les écorces d'oranges.
Avec les écorces d'orange et de mandarines pelées soigneusement, c'est à dire débarrassées de toute la peau blanche, on prépare d'exquises liqueurs de ménage: faire macérer pendant plusieurs semaines dans de l'alcool à 90°, puis ajoutez un sirop de sucre (un quart de litre de sirop pour un litre d'alcool.) Les écorces d'oranges bien séchées au four et conservées en sac donneront en hiver d'excellents allume-feux à la flamme vive et gaie, qui réjouira le salon de famille.
Les croûtes de pain.
Après les repas, il reste souvent des croûtes de pain. On les récupérera aussi nettement que possible, et quand elles auront été séchées, brunies un peu au four, on les broiera pour en faire de la chapelure, ou on les prendra pour "tremper" le bouillon ou pour faire la délicieuse "croûte au pot".
Les bouts de bougies.
Il y a toujours dans un ménage de petits bouts de bougie qu'on ne peut brûler. Mettez-les de côté. On fait fondre doucement la cire, on en retire les mèches et on l'utilise ainsi: 1° sous forme de petits pains pour cirer le fil ou pour frotter les fers à repasser. La cire est maniée avec une spatule de bois et les petits pains façonnés sont jetés dans l'eau froide pendant quelques minutes: ils deviennent très résistants; 2° sous forme d'"allumettes" longues de vingt centimètres à peu près.
On prépare avec du gros coton blanc ou du coton Jumel écru des mèches de six brins coupées de longueur voulue, on les plonge dans la cire fondue, on les en retire doucement en laissant égoutter pendant une seconde, puis on place les allumettes sur un marbre ou une pierre. Approchées d'une flamme, elles prennent feu et on s'en sert pour allumer les lampes, les candélabres, etc. ce qui économise bon nombre d'allumettes ordinaires tout en étant plus commode; 3° sous forme de "rats de cave" qu'on prépare comme les allumettes, mais avec des mèches de un mètre qu'on replie sur elle-mêmes en tronçons de dix centimètres, avant leur complet refroidissement.
Les coquilles d'huître.
Elles seront mises dans un four très chaud le temps nécessaire pour qu'elles soient calcinées; on les broiera alors et la poudre très fine, obtenue en les passant au tamis de soie, sera conservée. En cas de bris d'un objet de porcelaine, de faïence, etc. , on mêlera une cuillerée ou deux de cette poudre à un ou deux blancs d’œufs et on fera une pâte dont on badigeonnera les parois brisées. On maintiendra ces dernières rapprochées pendant une dizaine de minutes: le raccommodage sera parfaitement solide.
L'eau de cuisson des haricots.
Elle sera utilisée par la ménagère pour le lavage des mousselines de laines imprimées, des indiennes, des bas noirs.
La suie.
Elle constitue un engrais des plus actifs pour les rosiers. Les agglomérés de suie qui tombent de la cheminée lors du ramonage seront enveloppés de papier de soie et disséminés par paquets dans les cartons où on garde les fourrures; c'est un excellent préservatif contre les insectes.
Les plumes de volaille.
Les très petites plumes et le duvet serviront pour les oreillers, coussins, couvre-pieds américains, couverture de berceau. Les plumes plus grosses seront écôtelées, c'est à dire qu'on enlèvera les barbes, qui s'arrachent très facilement de chaque côté de la côte de la plume. Ces barbes seront utilisées comme les petites plumes.
Les plumes souples et un peu longues seront arrangées en petit plumeau, précieux pour épousseter légèrement les objets fragiles.Les grosses plumes raides seront réunies en faisceau et feront un petit balai commode pour le fourneau. Plumes fines et duvet seront mis au fur et à mesure dans un sac. Quand on devra les employer on les mettra à four doux pendant quelques heures. Si on ne peut les utiliser que dans un temps assez long, on placera dans le sac de réserve quelques boules de naphtaline.
Les fruits confits.
Des fruits confis offerts ou achetés en trop grande quantité risquent-ils de perdre leur succulence? Se cristallisent-ils, perdant ainsi leur appétissante mine? Piquez-les plusieurs fois avec une grosse aiguille et mettez les dans un bocal en les couvrant d'un fort cognac. Vous aurez de nouveaux d'exquis fruits confits.
Les sacs à bonbons vides.
Avec ces sacs, on peut faire des sachets, des sacs à éventail ou à lorgnette, des sacs à ouvrage. D'un sac de soie blanche, on fera une housse de livre, une aumônière pour une première communiante; d'un sac de soie claire on drapera une bourse de quête pour demoiselle d'honneur.
Les boites à cigares.
On en fera de charmantes boites à gants. Coller sur le bois une ouatine légère, recouvrir de soie ou de mousseline Liberty, de cretonne ou de foulard. On peut saupoudrer l'ouatine de poudre à sachet avant de la recouvrir de tissu.
Le vieux crêpe.
Les morceaux de vieux crêpe rougi ou défraîchi seront réunis en un tampon facile à tenir en main et qui sera des plus utiles pour enlever toute trace de poussière sur le velours ou les fourrures.
Les vieilles malles.
Si vous avez quelque vieille malle bien laide, mais ayant de bonnes charnières et bonnes serrures, arrangez-là ainsi: achetez de la toile à sac ou, mieux encore, de la toile calfat, collez-là bien tendue sur la malle dont vous soulignerez les contours par une bande cuir fauve de 0,03 m. clouée sur la malle avec des clous dorés ou nickelés.
L'intérieur de la malle sera doublée de cretonne fleurie. Les bandes de cuir se trouvent à très bon compte chez tous les peaussiers, corroyeurs, etc.; la cretonne coûte, en coupons, de 0,45 fr. à 0, 65 fr. le mètre. On aura donc à très bas prix une malle élégante qui pourra rivaliser de commodité avec les plus modernes créations des magasins franco-anglais du quartier de l'Opéra.
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 6 septembre 1903.
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