Un charlatan malin.
Où s'est passée cette histoire, nous l'ignorons; mais elle n'en est pas moins amusante. Passant donc dans une ville, notre charlatan fit annoncer par le crieur public qu'il se faisait fort de rajeunir en deux jours toutes les vieilles femmes. Aussi toutes celles-ci d'accourir, comme bien on pense, alléchées à l'idée de recouvrer leur jeunesse perdue.
Pour cette fois, le charlatan se contenta de prescrire à chacune d'écrire sur une feuille de papier leurs nom, prénoms et âge, d'apporter ces feuilles le lendemain et de revenir deux jours plus tard.
Elles n'eurent garde de manquer au rendez-vous où elle devaient recevoir le fameux remède de Jouvence. Mais notre homme leur annonça d'un air désolé qu'il avait perdu les fiches préparées deux jours plus tôt, qu'on avait dû vraisemblablement les lui voler. Là n'était pas la difficulté, car il suffisait de les refaire; mais le charlatan prévint en même temps ses clientes que, pour la préparation du merveilleux remède, il lui fallait de la cendre humaine et que par suite la plus âgée d'entre elles devait être brûlée.
Le résultat fut ce que vous pouvait penser: sur les nouvelles fiches, rapportées le lendemain, les vieilles femmes avaient toutes diminué leur âge, qui de vingt, qui de trente, qui de quarante ans, dans la crainte d'être la victime qui devait servir au bonheur des autres.
Alors le rusé compère, prenant les nouvelles fiches, les compara aux anciennes qu'il déclara avoir retrouvées, et fit constater de visu à ses clientes qu'elle avaient réellement rajeuni en deux jours. Il avait donc tenu sa parole, et il ne restait qu'à lui verser ses honoraires. L'histoire ne dit pas s'il les a touchés: mais, en vérité, ne pensez-vous pas qu'il les méritait?
Les annales de la santé, 15 février 1911.
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