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mardi 7 janvier 2014

Le carnet de madame Elise.


La joie du dimanche.

Une de mes plus sympathiques correspondantes qui signe du pseudonyme suggestif "Une Tâcheronne" m'avoue que le dimanche est le jour qui pèse le plus à ses épaules de mère de famille. "Tous les jours me semblent également doux, me dit-elle; préparer les repas, raccommoder le linge, les habits, faire le ménage, , voilà des occupations faciles; le dimanche, au contraire, est fort rude, quand j'ai autour de moi mari et enfants dont l'attitude me dit:"C'est congé aujourd'hui, il faut qu'on nous amuse, il faut que notre intérieur soit plus gai que le bureau." Je suis désarçonnée et je perds mes moyens. Aidez-moi, Madame, je veux que les miens aient chaque semaine une bonne journée de repos et de plaisir afin qu'ils aiment leur foyer et ne cherchent point de distractions au dehors."
Beaucoup de mères de famille se heurtent à la même difficulté; la tâche n'est pourtant pas si malaisée; mais, pour la mener à bien, il faut de la prévoyance et de la réflexion; l'inspiration du moment n'est pas toujours heureuse et souvent le temps manque pour exécuter le projet adopté soudain.
Une erreur très répandue et dans laquelle il ne faut pas tomber, c'est de considérer le repos comme une absence d'occupation; sauf pour les ouvriers manuels accablés de fatigue et qui dorment pendant toute la journée du dimanche et pour les intellectuels qui ont besoin de demeurer sans pensée, le véritable repos réside simplement dans un changement d'occupations.
Préparez à l'avance les distractions actives qui devront remplir la journée du dimanche.
Il y a dans nos habitudes deux distractions puissantes pour égayer le dimanche; la toilette et la bonne chère. Dès la veille, la mère de famille a préparé les vêtements propres, en même temps que les entremets, les gâteaux; de la sorte, il n'y a pas de retard, de réclamations, elle n'est point obligée de se confiner auprès de ses fourneaux pendant les longues heures où sa famille a besoin de sa présence aimable et enjouée.
Le matin, elle sert un petit déjeuner plus savoureux; vient ensuite la toilette élégante qui donne à chacun l'impression d'avoir changé de peau. Puis une courte promenade, une course chez le pâtissier, avec cette impression de pouvoir musarder qui enchante tous les travailleurs. Mais musarder, ce n'est pas bayer aux corneilles; voilà midi, le déjeuner est prêt, appétissant, servi sur une nappe fraîche qui donne une impression de fête.
Pour l'après-midi, il faut une distraction plus violente, le théâtre, la campagne, une sortie avec un but amusant: visite d'un musée, cueillette d'aubépines dans un coin connu, etc...
Eviter surtout ces inévitables visites de parents éloignés qui fatiguent à la fois ceux qui les font et ceux qui les reçoivent périodiquement;
Pour le dîner, quelques hôtes animent la table de famille; la soirée se passera joyeusement avec une petite sauterie si vous avez beaucoup de jeunesse; sinon, cartes, dominos avec un aimable enjeu qui excite l'émulation, suffira à distraire les vôtres.
Je connais une maîtresse de maison fort avisée qui a le courage de ne pas lire Mon Dimanche le jour où elle l'achète: "il est fait pour nous distraire, déclare-t-elle; mon mari et mes bambins trouvent leur soirée dominicale trop courte quand votre cher journal est là pour les amuser."

                                                                                                               Mme Elise.

Mon Dimanche, Revue populaire illustrée, 5 avril 1903.

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