Le paon.
Il va surement se marier aujourd'hui.
Ça devait être pour hier. En habit de gala, il était prêt. Il n'attendait que sa fiancée. Elle n'est pas venue. Elle ne peut tarder.
Glorieux, il se promène avec une allure de prince Indien et porte sur lui les riches présents d'usage. L'amour avive l'éclat de ses couleurs et son aigrette tremble comme une lyre.
La fiancée n'arrive pas.
Il monte au haut du toit et regarde du côté du soleil. Il jette son cri diabolique:
Léon! Léon!
C'est ainsi qu'il appelle sa fiancée. Il ne voit rien venir et personne ne répond. Les volatiles, habitués, ne lèvent même point la tête. Elles sont lasses de l'admirer. Il redescend dans la cour, si sûr d'être beau qu'il est incapable de rancune.
Son mariage sera pour demain.
Et, ne sachant que faire du reste de la journée, il se dirige vers le perron. Il gravit les marches comme des marches de temple, d'un pas officiel.
Il relève sa robe à queue toute lourde des yeux qui n'ont pu se détacher d'elle.
Il répète une dernière fois la cérémonie.
Jules Renard.
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 28 juin 1903.
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