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mardi 11 février 2014

Amusants auxiliaires de l'homme.

Amusants auxiliaires de l'homme.

L'homme rencontre dans certains animaux des auxiliaires souvent imprévus. Livingstone fut, pensons-nous, le premier à signaler le coucou indicateur, qui, dans les forêts de l'Afrique australe, conduit l'homme à la recherche des nids d'abeilles. Cet oiseau est, en effet, fort avide de miel; ses allures sont fort curieuses à observer quand il part à la recherche d'une ruche et, au moment de sa découverte, le pillard pousse des cris qui attirent promptement l'attention des hommes s'il s'en trouve dans le voisinage.
Ceux-ci, semblables alors au requin qui suit toujours fidèlement le pilote, s'approchent, et traîtreusement, s'emparent de la proie du pauvre coucou.
Un autre oiseau, fort utile, car il est domesticable à souhait, c'est l'agami que l'on a souvent surnommé oiseau-trompette, à cause de sa voix sonore et métallique. L'agami s'attache à son maître qu'il suit dans ses promenades, comme un chien. Dans l'Amérique méridionale, où il se rencontre, les fermiers emploient l'agami à la surveillance des basse-cours. Très vite instruit de ses devoirs, ce gallinacé, de la taille d'un dindon, surveille les poules et les canards d'un œil maternel et en écarte à coups de bec et d'ergots les chiens, les renards et autres bêtes qui tenterait de les attaquer.
Une des plus récentes acquisitions de l'homme est, sans doute, le tzompilacahuit. Ce nom bizarre désigne un gastéropode escargotphage qui est, comme l'agami, originaire de l'Amérique méridionale. Notre musée d'histoire naturelle a reçu, dernièrement, quelques échantillons de cet animal. 
C'est en somme un escargot géant, doué d'un appétit formidable, et dont la nourriture favorite consiste en escargots et limaces de toutes les catégories, sauf la sienne, bien entendu. Il pourrait consommer par jour une soixantaine de ces excellents "Bourgogne" qui font les délices de nos tables. On affirme que certains maraîchers du Nouveau-monde ont, notamment aux alentours de Buenos-Ayres, introduit des tzompilacahuits dans leurs jardins et qu'ils se trouve à merveille de cette résolution. Si on peut acclimater cet escargot exotique en France, nul doute qu'il pourra nous rendre de grands services.
Les singes, occasionnellement, se montrent d'utiles collaborateurs. Mais on les emploie malgré eux et voici comment. Dans les régions avoisinant les montagnes de Won-is-han, les Chinois cultivent avec succès un thé très-apprécié des amateurs. Leur procédé de récolte est tout à fait original. Lorsque le moment est venu, les Chinois jettent des pierres sur les singes toujours très nombreux dans les plantations de thé. Les singes naturellement susceptibles et combatifs, se fâchent et, cassant des branches d'arbres à thé, les emploient comme projectiles dont ils bombardent leurs assaillants. Ainsi, grâce aux singes cueilleurs de thé, la récolte est promptement faite et avec un minimum d'effort et une élégance de solution qui plaît au naturel ingénieux des Fils du Ciel.
Vous savez peut être que ces mêmes Chinois dressent avec succès des cormorans à faire la pèche pour eux. C'est là  une réédition de l'exemple du bon roi de Pologne qui partait à la pèche avec sa loutre fameuse. Les cormorans plongent au commandement des pêcheurs montés dans les barques. Ils ont vite fait, dans les eaux du fleuve, de distinguer un poisson de forte taille et ils s'en emparent pour le rapporter à leur maître. Comme les oiseaux seraient parfois tentés de manger eux-mêmes leur capture, les Chinois leur entourent le cou d'un anneau de paille qui empêche, en leur serrant la gorge, le poisson de passer dans l'estomac.
Ajoutons, pour être complets, que dans certaines partie du Continent noir, des Africains récoltent des noix de coco en employant les singes, à peu près comme procèdent les Chinois.
Les animaux ont été l'objet de fables nombreuses et il faut bien se garder de rapporter sans précaution les récits souvent enthousiastes de voyageurs peu véridiques. C'est pourquoi, malgré l'autorité  des noms qui s'y attachent, nous ne citerons, que sous les plus expresses réserves, l'histoire suivante qui est trop jolie pour sembler vraie.
Il s'agit du fulgore, un magnifique papillon de nuit de très grande dimension, et que l'on rencontre particulièrement en Guyane. A cause d'une certaine phosphorescence, analogue à celle de nos vers luisants, le fulgore a été surnommé l'insecte porte-lanterne.
On a prétendu que le pouvoir lumineux de ces papillons était tel que, la nuit, si on les plaçait dans une chambre, ils pouvaient éclairer quelque peu. Nous doutons que les fulgores, même spécialement entraînés, arrivent jamais à faire concurrence à l'éclairage  au gaz ou à l'électricité. retenons simplement que ces animaux étincelants furent signalés pour la première fois au monde scientifique par deux femmes, Mme Sybille Mérian et sa fille, qui s'étaient rendues en Amérique pour étudier l'entomologie. Des Indiens avaient capturé pour elles quelques fulgores qui avaient été enfermés dans une boite. Une nuit, elles furent réveillées par un son extraordinaire. Les insectes avaient quitté leur prison et volaient en liberté dans la pièce.  "Ils répandaient çà et là une vive clarté, écrivit une des voyageuses, on eût dit des lanternes vivantes."

                                                                                                       André Savignon.

Le Journal de la Jeunesse, 1913.

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