Courses sur la glace
de Saint-Pétersbourg à Kronstadt.
de Saint-Pétersbourg à Kronstadt.
Au commencement de l'hiver, on trace sur la glace le chemin qui conduit de Pétersbourg à Kronstadt; il est indiqué par une allée de hautes balises. De lieue en lieue, on trouve des guérites bien chauffées où sont placées des sentinelles qui, dans les temps brumeux, entretiennent des feux de distance en distance, et sonnent des cloches dont le tintement prolongé rassure et guide le voyageur. Un restaurant est établi vers le milieu de la route. Cette innombrable quantité de personnes de tout âge et de tout sexe, enveloppées dans de vastes pelisses, et glissant avec indifférence sur une surface fragile qui les sépare de l'abîme, offre à l'habitant des contrées méridionales un spectacle étrange qui jette dans son âme un effroi ignoré des peuples du Nord.
Mais c'est surtout lorsque sont commencées les courses en bouers, que la rade de Kronsdadt présente le tableau le plus animé. Ces bouers sont des canots fixés sur deux lames de fer semblables à celles des patins; une troisième est adaptée sous le gouvernail; des bancs sont disposés pour les voyageurs autour de cette embarcation qui a un, deux ou même trois mâts. Poussés par le vent qui souffle avec force dans cette saison, et dirigés par un pilote habile, ces canots, que distinguent des agrès variés et des pavillons de différentes couleurs, volent avec une incroyable rapidité; un soleil pâle laisse tomber sur eux ses rayons sans chaleur; les voiles se déroulent, l'aquilon souffle, le bâtiment s'élance, les matelots, par de savantes manœuvres, cherchent à se devancer, et, en moins d'une heure, un espaces de dix lieues est franchi.
Pierre 1er aimait beaucoup ces courses sur la glace, et sa prévoyance avait su leur donner un but utile. Poursuivant sans relâche le dessein qu'avait formé son génie de créer des marins, et craignant que, dans l'inaction d'un long hiver, les hommes qu'il avait initiés aux secrets de la manœuvre des vaisseaux ne perdissent le fruit de ses leçons, il les exerçait ainsi; et, sur un océan solide les armait de cette expérience qu'ils déployaient ensuite sur une mer orageuse.
Ancelot. (Six mois en Russie)
Le Magasin universel, novembre 1836.
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