Les enlèvements célèbres.

Les enlèvements célèbres.

Le mariage est un enlèvement consenti, parfois très agréable et très doux, mais un enlèvement: les formalités de la loi et les cérémonies du culte lui ôtent son apparence de violence et lui donnent un caractère sacré.

Au plus lointain, au plus profond de l'histoire où nous puissions descendre, nous voyons les dieux de l'Olympe inaugurer l'enlèvement, et Jupiter, le maître des dieux, nous en donne le premier l'exemple ainsi que son frère, Pluton, le roi des Enfers.

Achille, "aux pieds légers", ravit Polyxène, fille de Priam, mais il est tué par Paris, frère de Prolyxène.

Hélène, fille de Jupiter changé en cygne, est enlevé par Paris de la maison de Ménélas, son époux, et emmenée à Troie, ce qui fut la cause de la fameuse guerre de Troie chantée par Homère, et qui dura dix ans.

Psyché, la beauté qui a laissé un étonnement et un désir dans toutes les âmes des poètes, Psyché inspira un amour irrésistible à l'Amour lui-même. L'Amour s'envole vers l'Olympe emportant dans son bras son précieux fardeau.

L'histoire édifie sur le rapt la prospérité de l'empire romain. En Grèce et à Rome, le rapt garde toute sa brutalité: nous embellissons ces époques de notre sensibilité actuelle, mais le sentiment, tel que nous le comprenons aujourd'hui, est presque moderne.



Les Normands, ces géants venus du Nord, qui terrifièrent et conquirent le monde, enlevèrent les plus belles princesses et même des filles de rois, qu'il emportaient dans leurs camps.

Le décor et le mode d'enlèvement varient avec les siècles et les époques. Au moyen âge, où il n'y avait guère de routes carrossables, le ravisseur emportait sa proie d'amour au galop d'un cheval rapide, et quelquefois entre des bras bardés de fer.

Il fallait escalader des murs crénelés et hisser de lourdes échelles de corde et de fer, les échelles des assauts et des sièges de ville; l'enlèvement est un siège difficile.

Au XVIIe et au XVIIIe siècles, les amoureux ont à leur disposition des carrosses et des berlines presque confortables, et des victimes complaisantes: à aucune époque, il n'y eut tant de femmes amusées et flattées d'être enlevées.

Ce goût du romanesque s'accroît au XIXe siècle, Isabelle de Bourbon, soeur du roi d'Espagne, descend d'une fenêtre à l'aide des draps de son lit, pour tomber dans les bras d'un aventurier polonais, Guronski.

A Venise, le fille du duc Carlos se fait enlever par un professeur de dessin, et, à Dresde, la princesse de Saxe, par le professeur de français de ses enfants.

Enfin, nous avons l'enlèvement en plein midi en plein Paris d'une jeune fille de famille par un amoureux monté en automobile.

A quand l'enlèvement en ballon ?

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 18 janvier 1903.