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lundi 26 août 2013

Chronique de l'émigration.

Chronique de l'émigration.

Les conséquences de l'émigration à l'étranger.

Un Etat américain vient de prendre une mesure qui constitue pour notre pays un véritable péril national auquel il n'est que temps de parer.
Le Conseil des Ministres de cet Etat vient de décider que 20.000 passages gratuits seront mis cette année à la disposition des cultivateurs français qui voudront s'établir sur son territoire.
On sait que tout émigrant, dit le Moniteur des Colonies auquel nous empruntons ces renseignements, constitue pour le pays qui le reçoit, tant en argent importé qu'en travail, un capital de cinq mille francs, c'est donc cent cinquante millions et vingt mille soldats que nous enlèverait en deux ans à son profit ce gouvernement étranger.
Si le déplacement, au lieu d'être perdu pour la France, se faisait au profit de nos colonies, qu'on se représente l'augmentation de force et de puissance que cela nous donnerait.
Ne conviendrait-il pas de mettre obstacle à ce drainage des Français au profit de l'étranger par des mesures restrictives, à l'égard des agents d'émigration pour l'Amérique du Sud opérant en France ?
Ne convient-il pas également de combattre cette mesure par des mesures analogues en faveur de l'Algérie-Tunisie, de Madagascar et de la Nouvelle-Calédonie ?
Il nous semble, en face des efforts faits à l'étranger pour attirer les bras dont notre agriculture déplore la pénurie qu'il y aurait lieu de prendre une mesure dont on ne saurait contester l'efficacité.
Moyennant le versement, à titre de caution, d'une somme minime ( 10 ou 15.000 francs ), le gouvernement français accorde à des citoyens français la qualité d'agents d'immigration , c'est à dire reconnaît à un certain nombre de nos nationaux le droit de se livrer à l'embauchage pour le compte de gouvernements étrangers, de pratiquer, en un mot, une véritable traite des blancs.
C'est principalement sur l'esprit de jeunes gens sans instruction qu'agissent ces recruteurs , en plaçant sous leurs yeux, à côté des bénéfices plus ou moins problématiques qu'ils auront à s'expatrier, les fatigues et les exigences du service militaire, auxquelles leur départ les soustrait.
Notre recrutement, non moins que notre agriculture, souffrent plus qu'on ne le peut dire, de ces agissements coupables.

L'émigration indienne aux Antilles.

Une convention passée en 1861 entre la France et l'Angleterre a déterminé les conditions dans lesquelles les indiens, sujets britanniques, pouvaient être engagés comme travailleurs aux colonies françaises. Elle réservait au gouverneur général de l'Inde Britannique la faculté de suspendre, en tout temps, l'émigration pour une ou plusieurs colonies françaises. Ce droit fut appliqué en 1876 pour la Guyane, sous prétexte d'insalubrité du climat.
En 1882, l'émigration indienne, à la suite de difficultés soulevées pas le consul anglais, fut suspendue à la Réunion.
Un arrêté du 1er novembre dernier vient d'appliquer la même interdiction aux colonies françaises des Antilles, sous prétexte de mauvais aménagements des navires de transport.
Depuis plusieurs années, le conseil général de la Martinique s'est refusé à autoriser de nouveaux engagements de coolies. La Guadeloupe sera contrainte d'entrer dans la même voie et de se contenter de la main-d'oeuvre créole. Quant à la Réunion, elle a, depuis l'année dernière, grâce à un arrangement conclu avec le Portugal, la faculté de recruter des travailleurs au Mozambique, sur la côte orientale de l'Afrique.

Journal des voyages, Dimanche 13 janvier 1889.

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