Cordonniers.
Les cordonniers ou "cordouaniers" tirent leur nom de ce que le cordouan, ou peau de chèvre corroyée, était autrefois le cuir le plus employé pour la confection des chaussures. D'après les anciennes règles de leur corporation, chaque maître payait dix sous au grand chambellan et six au chancelier. Les cordonniers étaient, de plus, assujettis à une redevance appelée heuses ou"bottes du roi": au lieu de s'en acquitter en nature, ils payaient trente-deux sous parisis. Un syndic, un doyen, des jurés réglaient les différends et inspectaient les marchandises. Ces magistrats de la corporation étaient élus par leurs pairs en assemblée générale. Cette élection se faisait, à Paris, dans la halle aux cuirs. Pendant de longues années, la distinction entre cordonniers et savetiers fut l'objet de discussions fort vives.
Dans ces derniers temps, on a écrit deux livres curieux sur la profession de cordonnier (1). On y trouve une histoire de la chaussure, de la profession, et la reproduction de monuments figurés qui datent de diverses époques; outre les sceaux et les bannières des corporations, il existe, en effet, des peintures et des sculptures représentant des cordonniers à l'oeuvre, entre autres:
- une miniature du quinzième siècle, où l'on voit les Vie et martyre de saint Crépin et saint Crépinien;
- une sculpture en pierre de François Gentil (seizième siècle), à l'église Saint-Pantaléon de Troyes, où l'on voit ces deux saints arrêtés pendant leur travail par ordre de Dioclétien;
- un cordonnier peint sur un vitrail publié par MM. Chevrier et Martin;
- une représentation semblable sur une miniature d'un manuscrit de la Bibliothèque de la ville de Rouen;
- des cordonniers en diverses attitudes sur les stalles de la cathédrale de Rouen;
- une boutique de cordonnier du seizième siècle, gravée par Jost Ammon;
- l'estampe d'Abraham Bosse, que nous reproduisons;
- une caricature du dix-septième siècle contre les Espagnols, intitulée: Leurs altesses Catholiques saint Crépin et saint Crépinien;
- une Échoppe de savetier en 1737, par Bouchardon, etc.
Jean Reynaud a écrit, dans l'Encyclopédie nouvelle, un article intéressant sur les cordonniers. "L'art du cordonnier, dit-il, figure au premier rang des industries utiles. Ce sont les cordonniers qui assurent la liberté de nos mouvements sur la terre, en garantissant nos pieds contre l'humidité et l'âpreté du sol. Grâce à eux, l'humanité se voit à l'abri de ces épines dont il est parlé dans la malédiction prononcée pas Dieu contre la postérité du premier homme...
Mais si les cordonniers assurent notre liberté de locomotion, ils ne le font qu'en perdant la leur à la tâche, car la modicité de leur gain les retient tout le jour au travail; et s'ils nous empêchent de souffrir, c'est en souffrant pour nous, car leur métier, tel qu'il se pratique encore aujourd'hui, est extrêmement pénible."
Il s'étonnait, du reste, de voir les ouvriers persister à travailler assis, en se courbant tout le jour et en se servant de leurs genoux comme d'une table, lorsqu'en certains pays, en Angleterre, par exemple, on fait des souliers debout et sur un véritable établi. Il ne doutait pas que les machines qui existent déjà, et qu'on peut perfectionner, ne dussent remplacer la main de l'ouvrier, au moins pour les chaussures les plus grossières, qui sont aussi les plus nombreuses. Enfin, il lui paraissait qu'il n'y a pas lieu de n'user que du cuir comme matière de recouvrement dans la chaussure, et qu'il importerait, au contraire, de se servir d'une substance tout aussi imperméable, mais plus apte à se mouler exactement sur le pied et à suivre tous ses contours et ses mouvements avec plus de souplesse et de facilité.
"Travailleurs courageux, chercheurs intelligents du beau dans le bon, dit M. Vincent, ne croyez pas qu'il soit absolument nécessaire de faire de la poésie, de la peinture ou de la sculpture pour être un artiste. Tout ouvrier qui fait avancer son métier d'un pas dans la route éternelle du progrès, relève de l'art."
"Qui ne voit, dit aussi M. Michelet, que la plupart des métiers, si l'on y pénètre à fond, relèvent de l'art? Ceux du bottier, du tailleur, sont bien près de la sculpture."
- une miniature du quinzième siècle, où l'on voit les Vie et martyre de saint Crépin et saint Crépinien;
- une sculpture en pierre de François Gentil (seizième siècle), à l'église Saint-Pantaléon de Troyes, où l'on voit ces deux saints arrêtés pendant leur travail par ordre de Dioclétien;
- un cordonnier peint sur un vitrail publié par MM. Chevrier et Martin;
- une représentation semblable sur une miniature d'un manuscrit de la Bibliothèque de la ville de Rouen;
- des cordonniers en diverses attitudes sur les stalles de la cathédrale de Rouen;
- une boutique de cordonnier du seizième siècle, gravée par Jost Ammon;
- l'estampe d'Abraham Bosse, que nous reproduisons;
- une caricature du dix-septième siècle contre les Espagnols, intitulée: Leurs altesses Catholiques saint Crépin et saint Crépinien;
- une Échoppe de savetier en 1737, par Bouchardon, etc.
Jean Reynaud a écrit, dans l'Encyclopédie nouvelle, un article intéressant sur les cordonniers. "L'art du cordonnier, dit-il, figure au premier rang des industries utiles. Ce sont les cordonniers qui assurent la liberté de nos mouvements sur la terre, en garantissant nos pieds contre l'humidité et l'âpreté du sol. Grâce à eux, l'humanité se voit à l'abri de ces épines dont il est parlé dans la malédiction prononcée pas Dieu contre la postérité du premier homme...
Mais si les cordonniers assurent notre liberté de locomotion, ils ne le font qu'en perdant la leur à la tâche, car la modicité de leur gain les retient tout le jour au travail; et s'ils nous empêchent de souffrir, c'est en souffrant pour nous, car leur métier, tel qu'il se pratique encore aujourd'hui, est extrêmement pénible."
Il s'étonnait, du reste, de voir les ouvriers persister à travailler assis, en se courbant tout le jour et en se servant de leurs genoux comme d'une table, lorsqu'en certains pays, en Angleterre, par exemple, on fait des souliers debout et sur un véritable établi. Il ne doutait pas que les machines qui existent déjà, et qu'on peut perfectionner, ne dussent remplacer la main de l'ouvrier, au moins pour les chaussures les plus grossières, qui sont aussi les plus nombreuses. Enfin, il lui paraissait qu'il n'y a pas lieu de n'user que du cuir comme matière de recouvrement dans la chaussure, et qu'il importerait, au contraire, de se servir d'une substance tout aussi imperméable, mais plus apte à se mouler exactement sur le pied et à suivre tous ses contours et ses mouvements avec plus de souplesse et de facilité.
"Travailleurs courageux, chercheurs intelligents du beau dans le bon, dit M. Vincent, ne croyez pas qu'il soit absolument nécessaire de faire de la poésie, de la peinture ou de la sculpture pour être un artiste. Tout ouvrier qui fait avancer son métier d'un pas dans la route éternelle du progrès, relève de l'art."
"Qui ne voit, dit aussi M. Michelet, que la plupart des métiers, si l'on y pénètre à fond, relèvent de l'art? Ceux du bottier, du tailleur, sont bien près de la sculpture."
(1) Histoire de la chaussure, de la cordonnerie et des cordonniers célèbres dans l'antiquité, par Charles Vincent; Paris, 1859.
Histoire de la chaussure depuis l'antiquité jusqu'à nos jours, suivie de l'Histoire sérieuse et drolatique des cordonniers et des artisans dont la profession se rattache à la cordonnerie, par Paul Lacroix (le bibliophile Jacob) et Alphonse Duchêne; Paris, 1859.
Le magasin pittoresque, 1865.
Le magasin pittoresque, 1865.
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