Le désastre de la mission Crampel.
Encore des noms de Français à ajouter à la liste si cruellement longue des courageux explorateurs dévorés par le continent noir; un télégramme de M. de Brazza a annoncé la mort de M. Paul Crampel et de son chef d'escorte Biscarrat, et le retour à Brazzaville des débris de la mission qu'il dirigeait.
Paul Crampel avait entrepris d'explorer ces vastes territoires inconnus, qu'une convention récente a placés dans la zone d'influence française et qui, s'étendant du Congo au lac Tchad, relient nos possessions du Congo à celles du Soudan. Si cette hardie entreprise avait réussi, il aurait ensuite traversé le Sahara tout entier et, à son arrivée en Algérie, il eût pu dire qu'il avait doté la France d'un colossal empire colonial.
Il était dans la force de l'âge, il avait vingt-sept ans, il était aguerri contre le climat, il connaissait les populations de l'Afrique. Chargé d'une mission scientifique dans cette région, il partit en 1887 avec M. de Brazza qui l'avait choisi comme secrétaire. L'année suivante son humeur aventureuse, son instinct de véritable explorateur, avide de découvertes, lui faisait demander l'autorisation, qui lui fut accordée, de visiter toute la région, alors inconnue, qui s'étend de l'Ogoué au sud. Seul européen sans interprète, accompagné de quelques indigènes seulement, il pénétra chez les M'Fans, chez les Bagayas, pygmées sur lesquels il donna de curieux renseignements, et les Pahouins: ceux-ci l'attaquèrent. Il dut battre en retraite, ayant perdu la plupart de ses compagnons, blessé lui-même.
Paul Crampel rentra en France. Ce n'était plus ce joyeux garçon, aux grands yeux rieurs, à la physionomie si originale: il était amaigri; sa haute taille s'était affaissée; il boitait ayant conservé dans la cuisse une balle pahouine. Il entra à l'hôpital du Val-de-Grâce, et subit avec un rare courage une douloureuse opération. A la sortie de l'hôpital, il se maria avec une charmante jeune femme, pleine de talent, qui a illustré les voyages de son mari, et qui est l'auteur du dessin que nous publions aujourd'hui.
Son premier voyage avait inspiré à Crampel le désir de se dévouer à l'entreprise grandiose que nous avons rappelé plus haut. Le 20 mars 1890, il quittait la France, emmenant avec lui une petite pahouine, Niarinzhe, que, par diplomatie, il avait accepté pour femme au cours de sa première exploration. Le 6 mai, il arrivait au Congo français, et prenait, par terre, la route de Brazzaville, qu'il atteignait le 15 août. A partir de ce moment, l'expédition allait se diriger vers l'inconnu. Elle se composait de MM. Crampel, Lauzière, ingénieur, élève de l'Ecole centrale, Biscarrat, ancien sous-officier, Nebout, chef de caravane, Orsi, sous-chef de caravane, Mohammed ben Saïd, étudiant en médecine, le touareg Ischekhad-ag-Rhali, l'interprète M'Jan, 30 sénégalais armés, 128 porteurs noirs, 25 Bannas, 25 M'Fans, 14 Gabonais, 26 Loangos.
Le 25 septembre, la caravane arrive à Bangui, le poste extrême français sur l'Oubangui.
Depuis on était sans nouvelles. Le télégramme de M. de Brazza annonce que le malheureux explorateur a été massacré le 9 avril. Il aurait donc été près d'atteindre le lac Tchad; il a dû succomber au moment où allait aboutir la noble entreprise qu'il avait engagée. De ses compagnons, seul M. Nebout est survivant. En Crampel, en ses camarades, la France perd quelques-uns de ses meilleurs enfants.
X.
L'Illustration, 15 août 1891.
Paul Crampel avait entrepris d'explorer ces vastes territoires inconnus, qu'une convention récente a placés dans la zone d'influence française et qui, s'étendant du Congo au lac Tchad, relient nos possessions du Congo à celles du Soudan. Si cette hardie entreprise avait réussi, il aurait ensuite traversé le Sahara tout entier et, à son arrivée en Algérie, il eût pu dire qu'il avait doté la France d'un colossal empire colonial.
Il était dans la force de l'âge, il avait vingt-sept ans, il était aguerri contre le climat, il connaissait les populations de l'Afrique. Chargé d'une mission scientifique dans cette région, il partit en 1887 avec M. de Brazza qui l'avait choisi comme secrétaire. L'année suivante son humeur aventureuse, son instinct de véritable explorateur, avide de découvertes, lui faisait demander l'autorisation, qui lui fut accordée, de visiter toute la région, alors inconnue, qui s'étend de l'Ogoué au sud. Seul européen sans interprète, accompagné de quelques indigènes seulement, il pénétra chez les M'Fans, chez les Bagayas, pygmées sur lesquels il donna de curieux renseignements, et les Pahouins: ceux-ci l'attaquèrent. Il dut battre en retraite, ayant perdu la plupart de ses compagnons, blessé lui-même.
Paul Crampel rentra en France. Ce n'était plus ce joyeux garçon, aux grands yeux rieurs, à la physionomie si originale: il était amaigri; sa haute taille s'était affaissée; il boitait ayant conservé dans la cuisse une balle pahouine. Il entra à l'hôpital du Val-de-Grâce, et subit avec un rare courage une douloureuse opération. A la sortie de l'hôpital, il se maria avec une charmante jeune femme, pleine de talent, qui a illustré les voyages de son mari, et qui est l'auteur du dessin que nous publions aujourd'hui.
Son premier voyage avait inspiré à Crampel le désir de se dévouer à l'entreprise grandiose que nous avons rappelé plus haut. Le 20 mars 1890, il quittait la France, emmenant avec lui une petite pahouine, Niarinzhe, que, par diplomatie, il avait accepté pour femme au cours de sa première exploration. Le 6 mai, il arrivait au Congo français, et prenait, par terre, la route de Brazzaville, qu'il atteignait le 15 août. A partir de ce moment, l'expédition allait se diriger vers l'inconnu. Elle se composait de MM. Crampel, Lauzière, ingénieur, élève de l'Ecole centrale, Biscarrat, ancien sous-officier, Nebout, chef de caravane, Orsi, sous-chef de caravane, Mohammed ben Saïd, étudiant en médecine, le touareg Ischekhad-ag-Rhali, l'interprète M'Jan, 30 sénégalais armés, 128 porteurs noirs, 25 Bannas, 25 M'Fans, 14 Gabonais, 26 Loangos.
Le 25 septembre, la caravane arrive à Bangui, le poste extrême français sur l'Oubangui.
Depuis on était sans nouvelles. Le télégramme de M. de Brazza annonce que le malheureux explorateur a été massacré le 9 avril. Il aurait donc été près d'atteindre le lac Tchad; il a dû succomber au moment où allait aboutir la noble entreprise qu'il avait engagée. De ses compagnons, seul M. Nebout est survivant. En Crampel, en ses camarades, la France perd quelques-uns de ses meilleurs enfants.
X.
L'Illustration, 15 août 1891.
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