Les célébrités de la rue.
Nous revenons sur le volume curieux publié par M. Charles Yriarte; le franc succès obtenu par l'écrivain artiste nous met à l'aise pour parler de son livre: nous lui empruntons deux nouveaux types bien connus des Parisiens et surtout de ceux qui fréquentent lers environs du Palais-Royal et ceux du Luxembourg.
Le premier, l'homme au pavé se tient à la grille du jardin, en face de l'Observatoire; il se livre à d'effroyables désarticulations et appelle ses clients en entonnant d'une voix de stentor le refrain à la mode.
Son industrie consiste à enlever à la force des dents un pavé enveloppé dans un mouchoir, et de plus en plus fort comme chez feu Nicolet, il dresse une table avec quatre bouteilles et gravit l'échafaud branlant à la grande stupéfaction de la foule.
L'historien des gloires de carrefours avec une conscience que quelques-uns lui ont durement reprochée a dépensé à peindre ce saltimbanque autant de talent qu'un historien sévère pour décrire un personnage historique. Il faut lire les nombreux détails de la vie de l'homme au pavé.
"Le Marin s'appelle Clément; une femme lui envierait sa chevelure; il a abusé des dons de la nature pour vendre à ses compatriotes une pommade qui, dit-il, ferait pousser des cheveux dans la paume de la main.
Son boniment est pittoresque: il raconte comment de son lit de mort, un savant professeur de l'université de Liège, lui avait confié un secret dont il vend la recette pour dix centimes.
Or, un jour, un passant, qui n'entendait pas la plaisanterie, assura au public que M. Destrem, le savant professeur, était mort noyé, emporté dans sa voiture par deux chevaux furieux; par conséquent, pas de lit de mort, pas de discours in extremis. Clément se troubla un peu mais un voyageur aussi expérimenté ne perd pas facilement le nord: le lendemain, Clément citait le nom d'un professeur de l'université de Moscou."
Tous les récits de M. Yriarte sont authentiques et quelque-uns sont extrêmement curieux. Du reste, le succès du livre est un sûr garant du talent que l'auteur y a déployé. Nous sommes heureux de l'accueil fait aux Célébrités de la rue par le public, et nous aimons à croire que les lecteurs du Monde illustré qui connaissent depuis si longtemps l'auteur ont aidé à ce succès.
Nota: les gravures sont tirées de l'ouvrage publié par la Librairie parisienne; 1 volume grand in-8° (6 fr.); rue de la Paix, 5.
A. Hermant.
Le Monde illustré, 26 décembre 1863.
Le premier, l'homme au pavé se tient à la grille du jardin, en face de l'Observatoire; il se livre à d'effroyables désarticulations et appelle ses clients en entonnant d'une voix de stentor le refrain à la mode.
Son industrie consiste à enlever à la force des dents un pavé enveloppé dans un mouchoir, et de plus en plus fort comme chez feu Nicolet, il dresse une table avec quatre bouteilles et gravit l'échafaud branlant à la grande stupéfaction de la foule.
L'historien des gloires de carrefours avec une conscience que quelques-uns lui ont durement reprochée a dépensé à peindre ce saltimbanque autant de talent qu'un historien sévère pour décrire un personnage historique. Il faut lire les nombreux détails de la vie de l'homme au pavé.
"Le Marin s'appelle Clément; une femme lui envierait sa chevelure; il a abusé des dons de la nature pour vendre à ses compatriotes une pommade qui, dit-il, ferait pousser des cheveux dans la paume de la main.
Son boniment est pittoresque: il raconte comment de son lit de mort, un savant professeur de l'université de Liège, lui avait confié un secret dont il vend la recette pour dix centimes.
Or, un jour, un passant, qui n'entendait pas la plaisanterie, assura au public que M. Destrem, le savant professeur, était mort noyé, emporté dans sa voiture par deux chevaux furieux; par conséquent, pas de lit de mort, pas de discours in extremis. Clément se troubla un peu mais un voyageur aussi expérimenté ne perd pas facilement le nord: le lendemain, Clément citait le nom d'un professeur de l'université de Moscou."
Tous les récits de M. Yriarte sont authentiques et quelque-uns sont extrêmement curieux. Du reste, le succès du livre est un sûr garant du talent que l'auteur y a déployé. Nous sommes heureux de l'accueil fait aux Célébrités de la rue par le public, et nous aimons à croire que les lecteurs du Monde illustré qui connaissent depuis si longtemps l'auteur ont aidé à ce succès.
Nota: les gravures sont tirées de l'ouvrage publié par la Librairie parisienne; 1 volume grand in-8° (6 fr.); rue de la Paix, 5.
A. Hermant.
Le Monde illustré, 26 décembre 1863.
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