Le palais Granvelle à Besançon.
(Doubs)
Ce fut donc tout à fait pour être agréable aux Bisontins et pour avoir une position prépondérante au milieu d'eux, que Nicolas Perrenot de Granvelle fit édifier le palais qui porte son nom. Cette construction fut commencée en 1534 et achevée en 1540. La municipalité y prêta le plus gracieux concours: on la vit successivement annuler une ruelle publique qui aurait coupé diagonalement le futur jardin du palais, puis autoriser Granvelle à prendre dans les forêts communales les bois nécessaires au bâtiment, exempter perpétuellement l'édifice et ses dépendances de toute imposition, concéder enfin un filet d'eau des fontaines publiques pour l'agrément de la maison.
(Doubs)
Nicolas Perrenot de Granvelle, petit-fils d'un forgeron d'Ornans, s'était élevé par son mérite aux charges éminentes de premier conseiller d'Etat de Charles-Quint et de garde des sceaux des royaumes de Naples et de Sicile. Au dire d'un contemporain il devint "le tout de l'empereur, qui ne faisait rien que par lui."
N'étant encore qu'avocat de la couronne près le bailliage d'Ornans, il avait, en 1513, épousé Nicole Bonvalot, d'une des premières familles de Besançon. Cette alliance fut le point de départ de sa fortune: il s'en souvint et eut toujours à cœur les intérêts de la république bisontine. En cela d'ailleurs il servait la politique de son maître car il importait grandement à la maison d'Autriche que la ville libre de Besançon, boulevard militaire de la Franche-Comté, ne cherchât pas d'autres protecteurs que les souverains de cette province.
Ce fut donc tout à fait pour être agréable aux Bisontins et pour avoir une position prépondérante au milieu d'eux, que Nicolas Perrenot de Granvelle fit édifier le palais qui porte son nom. Cette construction fut commencée en 1534 et achevée en 1540. La municipalité y prêta le plus gracieux concours: on la vit successivement annuler une ruelle publique qui aurait coupé diagonalement le futur jardin du palais, puis autoriser Granvelle à prendre dans les forêts communales les bois nécessaires au bâtiment, exempter perpétuellement l'édifice et ses dépendances de toute imposition, concéder enfin un filet d'eau des fontaines publiques pour l'agrément de la maison.
A l'église des Carmes, qui n'était séparée que par une ruelle de l'un des flancs de l'édifice, Granvelle fit ajouter une élégante chapelle, avec caveau sépulcral pour lui et les siens; un pont couvert relia le palais à l'église. La chapelle n'était pas encore terminée quand Granvelle mourut, au mois d'août 1550. Son corps ramené d'Augsbourg à Besançon, attendit toute une année dans le palais l'achèvement de sa demeure dernière.
" La distribution de l'édifice, dit M. l'architecte Delacroix, est celle de la plupart des palais d'Italie. Au centre est une vaste cour, entourée au rez-de-chaussée d'un portique, et à l'étage d'une galerie dans laquelle sont les entrées des appartements.
"Du côté de la Grande-Rue s'élève la façade principale. Elle est composée d'un rez-de-chaussée, de deux étages et d'un attique. La porte d'entrée est une arcade entre deux colonnes.
"La façade est divisée en cinq parties au moyen d'espèces de contre-forts composés chacun de trois colonnes, dorique, ionique et corinthienne, superposées; au-dessus de l'attique sont trois lucarnes en pierre.
"Le style de la cour n'est pas moins caractéristique. En effet, sur les colonnes du portique sont des arcs surbaissés, l'ellipse écrasée jusqu'aux dernières limites du possible... Les colonnes sont doriques, mais l'extrême largeurs de leurs chapiteaux n'a pas d'exemple dans l'antiquité. A l'étages sont des pilastres ioniques excessivement fins et grêles."
Sur quelques chapiteaux de ces pilastres, ainsi que dans le fronton d'une des fenêtres du rez-de-chaussée de la façade, on lit la devise de Granvelle: SIC VISUM SUPERIS.
Antoine, le quatrième des quinze enfants de Nicolas Perrenot de Granvelle, monta encore plus haut que son père dans la carrières des honneurs: comme ecclésiastique, il eut successivement les sièges archiépiscopaux de Malines et de Besançon, en même temps qu'il était l'un des premiers cardinaux de Rome; sur le terrain de la politique, il occupa l'une après l'autre les fonctions de premier ministre des Pays-Bas, de vice-roi de Naples et de chef des conseils politiques du roi d'Espagne Philippe II.
Né à Besançon, le 20 août 1517, le cardinal de Granvelle se joignit à son frère Thomas, héritier du palais, pour accroître les collections commencées par leur père. François Perrenot, le troisième propriétaire, ne montra pas moins de zèle que ses devanciers pour l'achat des livres et des tableaux. Enfin, son successeur, Thomas-François d'Oiselay, qui releva le nom des Granvelle, eut aussi des goûts artistiques que partageait son épouse Caroline d'Autriche, fille naturelle de l'empereur Rodolphe II. Alors le palais Granvelle n'eut rien à envier aux plus remarquables des résidences princières de l'époque.
Les d'Oiselay s'éteignirent en 1637, et la fortune patrimoniale des Granvelle fut dévolue aux comtes de la Baume-Saint-Amour. Ceux-ci laissèrent le palais dans le plus déplorable abandon: ils finirent même par en disperser pièce par pièce le mobilier, soit par des ventes, soit par des cadeaux intéressés. Ce fut ainsi que Louis XIV, ayant tenu sa cour au palais Granvelle en juin 1683, emporta comme souvenir de son hôte une figure en marbre de Jupiter, aujourd'hui l'un des plus beaux antiques du Musée du Louvre.
Besançon n'aurait plus que le souvenir de tant de merveilles si deux ecclésiastiques dévoués à l'honneur de leur pays, les abbés Jules Chiffet et Jean-Baptiste Boisot, n'avaient trouver moyen d'acheter ce qui restait des papiers et des livres de la famille Granvelle, ainsi que plusieurs magnifiques portraits. Ces épaves sont encore les plus précieux joyaux de la Bibliothèque et du Musée de Besançon.
La France ayant fixé le siège de la Franche-Comté à Besançon, il fallut que cette ville fournit un hôtel au gouverneur provincial; à cet effet, la municipalité amodia d'abord le palais Granvelle, puis l'acheta, en 1712, au prix de 63.000 livres.
La charge de gouverneur provincial ayant été supprimée lors de la révolution, le palais Granvelle fut atteint par la loi qui obligeait les communes à payer leurs dettes en aliénant ceux de leurs immeubles qui n'étaient plus affectés à des services publics. Mis en vente au mois de juillet 1793, le palais Granvelle fut adjugé pour la somme de 98.200 livres. Soixante-dix ans plus tard, une loi spéciale (2 mai 1864) autorisa la ville à racheter son ancien immeuble, moyennant 350.000 francs payable en vingt annuités.
Peu de temps après cette intelligente opération, un vénérable érudit, le bibliothécaire Charles Weiss, offrait à la ville une somme de 30.000 francs pour qu'une statue en marbre du cardinal de Granvelle s'élevât dans la cour du palais édifié par son père. Le conseil municipal vota comme appoint une somme de 10.000 francs, et la statue, commandée à M. Jean Petit, ne tardera pas à glorifier sur leur terre natale les Médicis de la Franche-Comté.
Le Magasin pittoresque, juillet 1877.
Né à Besançon, le 20 août 1517, le cardinal de Granvelle se joignit à son frère Thomas, héritier du palais, pour accroître les collections commencées par leur père. François Perrenot, le troisième propriétaire, ne montra pas moins de zèle que ses devanciers pour l'achat des livres et des tableaux. Enfin, son successeur, Thomas-François d'Oiselay, qui releva le nom des Granvelle, eut aussi des goûts artistiques que partageait son épouse Caroline d'Autriche, fille naturelle de l'empereur Rodolphe II. Alors le palais Granvelle n'eut rien à envier aux plus remarquables des résidences princières de l'époque.
Les d'Oiselay s'éteignirent en 1637, et la fortune patrimoniale des Granvelle fut dévolue aux comtes de la Baume-Saint-Amour. Ceux-ci laissèrent le palais dans le plus déplorable abandon: ils finirent même par en disperser pièce par pièce le mobilier, soit par des ventes, soit par des cadeaux intéressés. Ce fut ainsi que Louis XIV, ayant tenu sa cour au palais Granvelle en juin 1683, emporta comme souvenir de son hôte une figure en marbre de Jupiter, aujourd'hui l'un des plus beaux antiques du Musée du Louvre.
Besançon n'aurait plus que le souvenir de tant de merveilles si deux ecclésiastiques dévoués à l'honneur de leur pays, les abbés Jules Chiffet et Jean-Baptiste Boisot, n'avaient trouver moyen d'acheter ce qui restait des papiers et des livres de la famille Granvelle, ainsi que plusieurs magnifiques portraits. Ces épaves sont encore les plus précieux joyaux de la Bibliothèque et du Musée de Besançon.
La France ayant fixé le siège de la Franche-Comté à Besançon, il fallut que cette ville fournit un hôtel au gouverneur provincial; à cet effet, la municipalité amodia d'abord le palais Granvelle, puis l'acheta, en 1712, au prix de 63.000 livres.
La charge de gouverneur provincial ayant été supprimée lors de la révolution, le palais Granvelle fut atteint par la loi qui obligeait les communes à payer leurs dettes en aliénant ceux de leurs immeubles qui n'étaient plus affectés à des services publics. Mis en vente au mois de juillet 1793, le palais Granvelle fut adjugé pour la somme de 98.200 livres. Soixante-dix ans plus tard, une loi spéciale (2 mai 1864) autorisa la ville à racheter son ancien immeuble, moyennant 350.000 francs payable en vingt annuités.
Peu de temps après cette intelligente opération, un vénérable érudit, le bibliothécaire Charles Weiss, offrait à la ville une somme de 30.000 francs pour qu'une statue en marbre du cardinal de Granvelle s'élevât dans la cour du palais édifié par son père. Le conseil municipal vota comme appoint une somme de 10.000 francs, et la statue, commandée à M. Jean Petit, ne tardera pas à glorifier sur leur terre natale les Médicis de la Franche-Comté.
Le Magasin pittoresque, juillet 1877.
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