Les chiens du Mont-Saint-Michel.
M. Siméon Luce vient de faire à l'Académie des inscriptions une communication au sujet des chiens chargés de garder les villes.
Il a lu une étude relative à un mandement royal de Louis XI, du 28 janvier 1475, sur l'entretien de quelques chiens chargés de la garde du Mont Saint-Michel.
Ce document présente un intérêt particulier, en ce moment où l'on s'occupe de l'utilisation des chiens dans l'armée.
Voici le résumé de ce travail:
Au quinzième siècle, on professait en France un culte très ardent pour saint Michel; les anciens rois considéraient le patronage de l'archange comme le palladium de la monarchie française. Les Anglais le savaient, et ce fut sans doute la cause pour laquelle ils s'acharnaient avec tant d'obstination à la prise du sanctuaire de saint Michel, situé au milieu de la mer et qu'ils assiégèrent plus ou moins étroitement pendant un siècle, sans réussir à s'en emparer. Pour le défendre, le roi de Bourges dépense les dernières ressources financières qui lui restaient.
Louis XI, plus encore que ses prédécesseurs, mit sa confiance en saint Michel; ce culte, dit M. Luce, eut les plus heureuses conséquences pour la forteresse normande et lui valut des faveurs de toutes sortes, telles que rentes, donation de fiefs, moulins et terres environnantes, exemption de contribution de guerre, etc.
Louis XI fit deux pèlerinages au Mont Saint-Michel: le premier en 1462; le second en 1473, à la suite d'un voyage à Alençon, ville dans laquelle il faillit être écrasé par une pierre énorme qui se détacha des remparts au moment de son passage.
C'est pendant son second séjour au Mont que louis XI pu se rendre compte de l'utilité des chiens dans cette forteresse, et, sur la demande du capitaine de Bétornay, gouverneur de la place, il rendit l'arrêt de 1475, instituant une rente de 22 livres tournois, sur les revenus de la vicomté d'Avranches, pour l'entretien desdits animaux.
L'emploi de ces chiens n'était pas nouveau, puisqu'on lit dans le mandement dont nous parlons:
"On a de tout temps accoustumé avoir et nourrir audict lieu certain nombre de grands chiens, lesquelzs sont par jour attachez et liez et par nuict sont détachez et menez hors ladicte place et à l'entour d'ycelle pour au long de la nuict au guet et garde d'ycelle place."
La surveillance du Mont Saint-Michel offrait de grandes difficultés, et il n'est pas douteux que, si les défenseurs de cette place ont pu se garder des surprises des Anglais pendant vingt-sept ans, ils ont dû en bonne partie ce résultat aux chiens qui veillaient autour de la citadelle.
M. Luce se demande si on ne retrouverait pas des restes de cette race de chiens dans les environs d'Avranches.
Le petit Moniteur illustré, 14 octobre 1888.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire