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dimanche 20 décembre 2015

L'art de faire cuire une femme.

L'art de faire cuire une femme.

C'est une recette anglaise qui ne manque pas de saveur. Nous la détachons d'un de ces catch-pennies, ou attrape-sous qui se vendent au mètre dans les rues de Londres.
-Trois mètres pour un penny! Pour un penny, trois mètres! Trois mètres de chansons ravissantes. Chansons nouvelles! Chansons populaires! crient à tue-tête les camelots.
Et le populaire achète; il est friand de ces Longues-Chansons, comme il les appelle, il est certain d'en avoir pour son penny.
A elle seule la recette que nous en extrayons vaut son pesant d'or. Qu'on en juge:
"Prenez une femme qui ne sois pas trop vieille; pour en faire une douce compagne et pour la garder telle, ayez soin de l'accommoder de la manière suivante:
"Disposez d'une quantité suffisante de cette eau pure que l'on nomme affection et faites-y mariner la femme délicatement. Si l'eau, durant cette opération, se soulevait en bouillons violents, un peu de baume de flatterie ne tarderait pas à la calmer et à lui rendre son aspect normal.
"Le feu sur lequel mijote votre plat doit être tout d'amour vrai. Il importe d'activer la flamme au moyen de quelques soupirs, mais gardez-vous de l'exciter et de la rendre trop brûlante, comme aussi de la laisser s'éteindre par votre indifférence.
"Quelques épices et rocamboles comme le travail, la sobriété et la courtoisie sont indispensables pour donner du goût à ce court-bouillon. Une quantité modérée d'esprit-de-caresse et d'huile-de-baiser y ajoute une saveur très appréciable. Enfin, garnissez avec des fleurs de bonté et un bouquet de petits soins et vous me donnerez des nouvelles d'un plat qui l'emporte sur tous les délices de la table la plus fortunée, un plat sans pareil qui s'appelle; "une bonne femme!"
N'est-ce pas qu'elle ne manque pas de finesse ni de saveur, cette prose à l'image des cockneys de Londres?

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 26 janvier 1908.

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