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mardi 31 mars 2015

Lannion.

Lannion.
(Côtes-du-nord)


Lannion ressemble à beaucoup d'autres petites villes de Bretagne. Sans avoir rien de particulier par elle-même, elle est dans une situation pittoresque qui fait que l'artiste s'y arrête avec plaisir, et l'inscrit comme un agréable souvenir sur son journal de voyage.
Quand on arrive par la route du Léguer, si fraîche et si accidentée, on aperçoit d'une certaine distance Lannion, les collines qui l'entourent et les arbres qui les couronnent: toute cette verdure fait un fond gracieux aux maisons qui s'étagent sur les pentes.
Lorsque vous serez entré dans la ville, vous trouverez peut-être des pentes un peu roides, les pavés un peu inégaux, les maisons un peu tristes; mais vous songerez que les environs sont charmants, que les quais offrent une jolie promenade, et qu'après tout il n'est pas mal qu'une petite ville ait des rues sinueuses et montantes: cela repose de la beauté uniforme des rues interminables et tirées au cordeau, qui sont aujourd'hui trop à la mode dans toutes les grandes villes.
On trouve le nom de Lannion cité dès le douzième siècle, dans des chartes relatives à des donations religieuses: c'était une ville fortifiée. Pendant la guerre de cent ans, en 1346, le capitaine anglais Richard Toussaint, maître de la Roche-Derrien, avait essayé à plusieurs reprises de prendre et de surprendre Lannion, qui était dans une position très-commode pour communiquer avec la mer et pouvait fournir du butin. 
Deux soldats de la garnison trahissant leurs concitoyens, se laissèrent gagner et ouvrirent une poterne, un matin, au point du jour. Les Anglais entrèrent, et, une fois en nombre, se mirent à tuer et à piller.
"Réveillé par le bruit, un chevalier nommé Geoffroy de Pontblanc, qui était encore au lit, se leva, et, saisissant une lance et une épée, descendit dans la rue, où il se défendit vaillamment contre tous ceux qui se présentèrent, jusqu'à ce qu'un archer, lui ayant décoché un trait, le blessa au genou et le fit tomber: les Anglais se précipitèrent alors sur le brave chevalier, lui arrachèrent les dents avec fureur, et finirent par le tuer. Le souvenir de la mort héroïque de Geoffroy de Pontblanc est consacré par une croix que les Lannionais ont érigée à sa mémoire et scellée contre une des maisons de la rue de Tréguier, à l'endroit même où ce vaillant défenseur de la ville reçut la mort.
"Le château de Lannion fut démantelé à cette époque, et il ne paraît pas qu'il ait jamais, depuis, été remis en défense. Dès la fin du quinzième siècle, il était complètement ruiné, ainsi que le constate une charte de 1489."
La chapelle du château a été remplacée par l'église Saint-Jean du Baly, construite pendant les seizième et dix-septième siècles. On la voit au milieu de notre gravure, avec sa nef sans transept et sa grosse tour carrée, comme on en trouve à plus d'une église du seizième siècle.



Le quinzième et le seizième siècles sont encore représentés à Lannion par quelques maisons curieuses à encorbellements et à pignons, qui entourent l'hôtel de ville de construction récente.
D'autres édifices religieux du dix-septième siècle, élevés soit sur la rive droite, soit sur la rive gauche du Léguer, méritent l'attention.
Au dix-huitième siècle, le duc d'Aiguillon assista à la pose de la première pierre des quais de Lannion; une inscription en fait foi. Il venait autrefois à Lannion des bateaux d'un plus fort tonnage qu'aujourd'hui; il s'y fait néanmoins toujours un commerce assez actif d'importation et d'exportation.
Le dix neuvième siècle laissera à son tour sa trace dans cette ville, grâce à la construction d'un édifice philanthropique. Depuis une dizaine d'années, Lannion possède un bel hospice civil, et comme les pauvres et les malades manquent en Bretagne moins encore peut-être qu'ailleurs, cet établissement est appelé à rendre de grands services.
Si vous sortez de Lannion dans la direction du nord, vous trouverez d'abord un verdoyant vallon, plein d'ombre et de fraîcheur. De l'autre côté de ce vallon commence une colline assez escarpée. Montez jusqu'en haut par le long escalier de dalles qu'on y a ménagé; une fois au sommet, vous jouirez d'une belle vue sur Lannion et sa campagne, et de plus vous pourrez voir de près un édifice qui a sa valeur: c'est l'église de la commune de Brélévenez. Bâtie vers la fin du douzième siècle, à l'époque où le style roman s'acheminait vers le style ogival, elle fut remaniée à l'époque du gothique de la troisième période, et complétée par une belle flèche en pierre de ce dernier style. On voit dans notre gravure le clocher qui s'élève au-dessus des maisons, des arbres, et domine ce coin du pays.

Magasin pittoresque, septembre 1877.

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