Pose de la première pierre d'un bassin de radoub à Fort-de-France (Martinique).
Le 16 mars 1864, à quatre heure et demie, il a été procédé à la pose et à la bénédiction de la première pierre d'un bassin de radoub à Fort-de-France, dont la construction, aux frais de la colonie, avec une subvention de un million faite par la métropole, a été ordonné par S. E. M. le comte de Chasseloup-Laubat, sénateur, ministre de la marine et des colonies, en vertu de la loi du 28 juillet de la même année.
Cette oeuvre, la plus importante qui ait été entreprise dans une colonie française, est d'un intérêt immense pour la marine militaire aussi bien que pour la marine marchande. Les navires les plus considérables de notre flotte pourront se réparer dans ce bassin sans être obligés de retourner en France ou de remonter jusqu'à New-York, car la rade de Saint-Thomas, la seule qui offre actuellement quelques ressources sur la ligne du Mexique, ne peut recevoir que des navires inférieurs.
On pourra se faire une idée de l'importance des travaux exécutés à Fort-de-France, quand on saura qu'il a fallu enlever plus de cinquante mille mètres cubes de tuf ou de roc avant de commencer la maçonnerie.
Nous empruntons à M. Roullier, rédacteur du Messager de la Martinique, ainsi qu'au compte rendu officiel de la cérémonie, les détails qui suivent:
"La population toute entière avait voulu témoigner par sa présence de l'intérêt que notre ville prend à ces importants travaux. De Saint-Pierre, des campagnes qui nous environnent, une foule nombreuse et empressée était venue, désireuse de prendre part à cette fête véritablement nationale pour nous.
"Dans une tribune ornée avec goût et placée à une des extrémités du bassin, l'amiral gouverneur M. de Maussion de Candé, Mme de Maussion de Candé, M. le directeur de l'intérieur, les chefs des différentes administrations de la colonie, un état-major nombreux et brillant, composé des principaux officiers de l'armée et de la marine présents dans la colonie, se trouvaient réunis. Une partie de cette tribune était réservée aux dames qui avaient voulu assister à la solennité; un simple coup d’œil jeté de ce côté suffisait pour reconnaître que la réputation de beauté de nos dames créoles dans le monde entier n'a rien d'exagéré, et que les historiens, cette fois véridiques, sont restés plutôt en-dessous qu'au-dessus de la vérité.
"Le Gouverneur et son cortège se sont embarqués à l'arsenal et ont traversé le Carénage pour accoster le wharf provisoire situé vis-à-vis des fours à chaux.
"Un élégant portique, élevé sur le débarcadère, portait cette inscription en lettres d'or; Bassin de Maussion de Candé.
"Le gouverneur, en débarquant, a été reçu par M. le capitaine d'artillerie Notkiewicz, chargé de la direction des travaux, accompagné des conducteurs sous ses ordres qui l'ont escorté jusqu'à la tribune qui lui était réservée, au milieu d'une haie formée d'un détachement des troupes d'artillerie et d'infanterie de la marine.
"M. l'abbé Blanger, vicaire général, administrateur de la paroisse de Fort-de-France, assisté du clergé de la ville, s'y est également rendu pour faire les prières d'usage et la bénédiction.
"Le Gouverneur, accompagné de M. le général de division de Barolet et MM. les chefs d'administration, est descendu dans la forme, près de l'emplacement de la première pierre de taille formant assise inférieure des bajoyers, à l'extrémité sur du heurtoir de l'avant-radier.
"M. le Gouverneur a placé dans une boîte en plomb la série complète des pièces de monnaie de l'Empire.
"Une médaille d'argent et une médaille de bronze à l'effigie de l'empereur, frappées à l'occasion de la création du bassin de radoub, ont été introduites également dans la boîte en plomb."
Après les discours prononcés par l'habile directeur des travaux, M. le capitaine d'artillerie Notkievicz, le Gouverneur, M. de Maussion de Candé et M. le directeur de l'intérieur, M. Blanger, vicaire général, administrateur de la paroisse de Fort-de-France, fit la bénédiction solennelle de la première pierre et des fouilles du bassin; puis le clergé se retira par la rampe de la machine monte-charge située à l'extrémité de la forme.
La cérémonie étant ainsi terminée, M. le Gouverneur fut reconduit au débarcadère avec le même cérémonial que celui qui avait été suivi lors de son arrivée.
Cet important travail, aussi heureusement conçu que dirigé, est d'un excellent augure pour nos colonies, et le Monde illustré, en dehors de l'intérêt d'actualité qui se rattache à cette oeuvre patriotique, est heureux de témoigner toutes ses sympathies aux courageux et hardis enfants de nos possessions d'outre-mer.
A. H.
Le Monde illustré, 30 avril 1864.
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