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mercredi 5 mars 2014

Une forte poigne.

Une forte poigne.

Le romancier Balzac, pour prouver à quelle robuste race il appartenait, se plaisait à raconter l'anecdote suivante, relative à son père.
M. de Balzac père avait débuté par être clerc chez un procureur à Paris, et, suivant l'usage de l'époque, il mangeait à la table du patron avec les autres clercs.
Le premier jour qu'il prit place à cette table, on servit une perdrix. La femme du procureur ayant fait remarquer que les dérangements et corvées revenaient de droit au nouveau venu qui était en même temps le plus jeune des convives, demanda à M. de Balzac s'il savait découper.
Honteux et ne voulant pas laisser voir son embarras, le jeune homme, qui n'avait jamais découpé le moindre volatile, n'en répondit pas moins très bravement:
"Oui, madame.
- Eh bien, nous allons juger de votre savoir-faire. Voici le couteau et la fourchette."
Sans se démonter le moins du monde, M. de Balzac prit ces instruments, s'assura du nombre de convives (ils étaient quatre), et, plaçant la perdrix devant lui, la divisa instantanément en quatre parties, mais avec tant de vigueur qu'il fendit l'assiette, trancha la nappe et entama le bois de la table.
'Ah! c'était un rude homme que mon père!" concluait l'auteur de la Comédie humaine, en découvrant complaisamment ses poignets, afin de laisser voir qu'il tenait de la famille.

Mon Journal, recueil hebdomadaire illustré pour les enfants, 1er septembre 1894.

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