Une battue au Bois de Boulogne.
Depuis longtemps déjà, les Parisiens se plaignaient du peu de surveillance exercée par la police au Bois de Boulogne.
Cette merveilleuse promenade, où toutes les classes de la population parisienne vont se délasser, est devenue une véritable forêt de Bondy.
Et encore, la forêt de Bondy n'abritait que des voleurs et des assassins; au Bois de Boulogne, on rencontre de tout.
C'est d'abord un coupe-gorge d'autant plus dangereux qu'on serait en droit de s'y croire en sûreté, et que, par conséquent, on ne songe pas toujours à se mettre sur le qui-vive.
Tant pis donc pour ceux qui s'y attardent; ils risquent fort de se voir arrêtés au coin d'une allée et d'être brutalement sommés d'avoir à choisir entre la bourse ou leur vie.
Il est hanté aussi par des loqueteux, mendiants ou estropiés qui demandent l'aumône avec une insistance très inquiétante et qui souvent s'insurgent contre un refus et vous insultent.
On s'y croise également avec de pâles voyous qui fixent avec insolence les promeneuses et qui, quand elles sont seules, les suivent et les pourchassent de leurs propos orduriers.
On y trouve encore une foule d'individus, accompagnés de filles échevelées qui, dans les clairières prennent leurs ébats avec un sans-gêne révoltant.
Que de fois un père de famille suivi des siens est obligé, au coin d'une allée, de tourner court pour ne pas laisser apercevoir un spectacle écœurant à ses enfants.
Voilà ce qu'est devenue la grande promenade si aimée des Parisiens, grâce à la négligence de la police.
Cela ne peut pas durer.
A chaque instant des scandales se produisent et les plaignants s'adressent au Petit Journal dans l'espoir qu'il sera écouté en haut lieu.
A maintes reprises, en effet, la préfecture a tenu compte de nos récriminations; elle a fait faire des rafles qui ont enrayé le mal pendant une semaine ou deux; puis tout a recommencé.
Ces jours-ci, encore à la suite d'un article du Petit Journal, une battue a eu lieu la nuit, dans le Bois de Boulogne; elle a amené à l'arrestation d'une quinzaine de vagabonds, hommes et femmes. c'est cette battue que nous reproduisons...
Une battue au Bois de Boulogne. |
Voilà qui est bien, mais à la condition qu'on n'attende pas que de nouveaux scandales se produisent pour sévir encore.
Ce qui serait mieux, ce serait d'organiser une surveillance permanente de jour et de nuit.
Les contribuables paient assez cher pour exiger, lorsqu'ils vont se promener au Bois, de ne pas avoir à courir le risque de faire des rencontres aussi inquiétantes pour leur sécurité que dangereuses pour la morale de leurs enfants.
Le Petit Journal, dimanche 14 juillet 1895.
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