Mme Colette Willy.
Colette Willy, ou Mme Gauthier-Villars, avait, à l'époque de son mariage avec l'écrivain humoristique, une longue et magnifique chevelure qui lui descendait jusqu'aux talons. elle ne l'a plus, l'ayant fait couper pour ressembler à Mlle Polaire et aussi, peut être, à Alcibiade qui, sans plus de motifs, fit, comme on le sait, couper la queue de son chien.
Mme Colette Willy n'aurait jamais consenti ce dernier sacrifice, elle a trop d'affection pour les chiens et pour les chats. C'est ce qui restera d'elle, cette affection, car, pour ses cheveux, Dieu sait sur quel crâne mondain ils ondulent aujourd'hui. A faire sa société d'un chien: Toby-chien, et d'un chat: Kiki-la-Doucette, décédé, elle s'est abandonnée au mystérieux attrait de leurs attitudes, de leurs mouvements, de leurs regards, et a eu l'idée d'interpréter ce langage à sa façon dans un livre très spirituel qu'on lui attribue: Les Dialogues des Bêtes.
Ces dialogues, paraît-il, n'étaient pas destinés à la publication, mais seulement à amuser Toby-chien et Kiki-la-Doucette, à qui l'auteur les lisait. Willy ayant paru goûter ces œuvres, sa femme les publia pour l'amuser aussi. Cette explication vaut ce qu'elle vaut: elle reste obscure en un point, c'est qu'on ne voit pas pourquoi Willy prend plus de plaisir à voir imprimer ce qui réjouit suffisamment Toby-chien et Kiki-la-Doucette en manuscrit. Mais si tous les problèmes contemporains étaient complètement éludés, que resterait-il aux historiens futurs?
Toujours est-il que les Dialogues des Bêtes forment, de l'avis de plusieurs critiques, un ouvrage "délicieux" où la fantaisie la plus déraisonnable se joint à de très fines observations et auquel Willy a peut être prêté quelque peu concours.
Après avoir fait ses premières armes dans la littérature, Mme Colette Willy se dispose à débuter comme actrice. On dit qu'elle va paraître au théâtre non pas de Mlle Polaire, mais aux côtés de Mme Georgette Leblanc, la femme du célèbre écrivain belge Maeterlinck.
Car on ne rencontre plus l'auteur de Claudine avec sa femme et son interprète, et Willy adresse des communiqués à la presse où il se moque, l'ingrat, de celle qui aida à ses succès.
Cette rupture fut suivie de près d'une autre séparation moins retentissante: la séparation de biens entre M. Gauthier-Villars et sa femme. La chronique mondaine, en rendant compte de cet événement avec toute la discrétion qui convenait nous a cependant appris que Mme Henry Gauthier-Villars-Willy-Colette était la fille d'un officier et avait apporté à son mari une dot de vingt mille francs et ses cheveux. Elle a déjà repris ses cheveux. Elle reprend sa dot. Que sa volonté soit faite!
Jean-Louis
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 1er avril 1906.
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