Translate

samedi 23 juillet 2016

La revue du 17 avril 1890.

La revue du 17 avril 1890.


Le général Saussier a passé, jeudi 1er avril, à Vincennes, la revue des troupes.
Avant neuf heures, tous les régiments étaient réunis sur le champ de courses et à dix heures précises le général Saussier, suivi de son état-major, commençait la revue des troupes.



Le général Saussier, gouverneur militaire de Paris
et son état-major
.


L'infanterie était disposée sur une seule ligne, faisant face aux tribunes. L'artillerie était placée derrière elle en deuxième ligne. La cavalerie formait une troisième ligne.
Toutes les troupes étaient en tenue de campagne, et les dragons, munis de lances sans flamme.
Les tribunes étaient pleines d'officiers de réserve et de spectateurs. Des milliers de curieux affluaient autour du champ de courses. Pendant la revue, le gouverneur de Paris a fait remettre au 20e bataillon le drapeau unique des chasseurs à pieds, qui était depuis un an, au 29e bataillon, et qui avait figuré à la revue passée, à Saint-Mihiel, par le général de Miribel, à la fin des manœuvres du 6e corps.
A onze heures précises a commencé le défilé dans l'ordre suivant: infanterie, chasseurs à pied, artillerie et cavalerie.
Après la revue qui s'est terminée à midi moins le quart, le général Saussier et son état-major ont été déjeuner sous une tente établie dans le polygone et dont les abords étaient ornés de trophées et de pièces de canon.
Les troupes après le défilé, ont pris sur le terrain un repas froid et fait le café, puis, à une heure, les régiments et détachements divers se sont mis en route pour regagner leurs casernes et leurs quartiers respectifs.
Disons à propos de la lance, qui a refait son apparition dans l'armée, que le ministère vient d'acheter dix mille bambous royaux, destinés à servir de hampes aux nouvelles lances mises à l'essai dans les régiments de cavalerie.
Le bambou est à la fois plus léger et plus solide  que n'importe quel autre bois, et il est à prévoir que son adoption sera définitive.
Les anciennes lances françaises étaient en bois de frêne, bois très lourd, dont le moindre inconvénient était de retarder les mouvements et de blesser les chevaux au garrot lorsque la lance était à la botte. Ce désavantage n'était pas compensé par la solidité, puisque la lance, taillée dans un billot, à fil interrompu, se cassait facilement, de manière à ne pouvoir être raccommodée.
Un autre défaut, qu'il faut prendre en considération dans les lances actuelles, résidait dans la trop grande dimension des flammes, offrant au vent trop de prise, ce qui courbait promptement les hampes, ôtait de la sûreté à la direction du coup, de la vitesse et de la légèreté au maniement.
Le général de Brack dit que la lance est l'arme blanche dont l'effet moral est le plus puissant et cite nombre d'exemples à l'appui. - Qui ne souvient des belles charges de Somo-Sierra, de Waterloo, de Sedan!



Manœuvres de cavalerie.
Les nouvelles lances sans flamme.

(Dessin de M. Blombed.)

Mais les exigences de la guerre moderne ne permettent peut être plus un usage efficace de la lance, tout au plus pourrait-on s'en servir dans des engagements d'éclaireurs et de fourrageurs, et il est à présumer qu'après les terribles exemples de Gravelotte, de Reichshoffen, la cavalerie ne chargera plus sur l'infanterie, que les armes à longues portée rendent à peu près inabordable par la cavalerie.
La seule raison qui peut faire revenir à l'essai de la lance, c'est que la longueur de l'arme lui permet de porter des coups à des distances que le sabre ne pourrait atteindre; mais alors, pourquoi ne pas lui donner plus de longueur possible, par exemple les 3 mètres 30 de la lance prussienne au lieu des 2 m. 70 de l'ancienne lance française.
Les Allemands se sont tenus à l'ancien modèle, après avoir essayé des lances en sapin, se brisant comme du verre; en tôle d'acier, beaucoup trop lourdes, etc., etc. Peut-être devons-nous nous féliciter de voir leur cavalerie s'encombrer d'armes dont le maniement est difficile, et nous abstenir d'en faire autant, si le côté pratique de la lance n'est pas absolument démontré.
Qu'on nous permette, à propos de l'armement de la cavalerie, la réflexion suivante: avec le nouveau mode du port du sabre, c'est à dire le sabre attaché à la selle, que devient le cavalier démonté? Il est à la merci de son ennemi à cheval, et n'a plus pour se défendre que sa carabine moins commode qu'un bâton. Les occasions de mettre pied à terre, et même de combattre à pied, sont fréquentes pour le cavalier, et s'il est surpris, il faut qu'il puisse tenir tête à son ennemi, et que l'avantage de soulager le cavalier du poids de son sabre ne le mette pas dans l'impossibilité de se défendre.
Pourquoi ne pas imiter la cavalerie russe, et donner la baïonnette à la cavalerie. La baïonnette du fusil Lebel est très légère, très pénétrante et peu encombrante. On pourrait la rendre plus pratique en la raccourcissant un peu, et en supprimant la croisette qui ne sert dans l'infanterie qu'à former les faisceaux. Le fait ne serait pas sans précédent. Les dragons de la première république et de l'empire avaient la baïonnette et plus d'un combat n'a eu de résultat favorable que parce que la cavalerie plus rapide que l'infanterie, et en même temps aussi bien armée, a pu donner au gros d'un corps le temps d'arriver.

Le Petit Moniteur illustré, dimanche 27 avril 1890.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire