Le code du parasite.
Dans la collection des firmans, lettres et autres pièces officielles déposées à l'académie impériale et royale des langues orientales, à Vienne, on a trouvé un curieux document dont voici la traduction littérale:
"Il est écrit dans les registres des firmans (1) qu'anciennement on nommait kiahaïa (2) dans l'odjak (3) des parasites. A ce kiahaïa l'on délivrait un firman contenant l'ordre de maintenir et faire observer les règles ci-après:
1- Les personnes qui prennent le titre de parasite sont tenues, en se présentant devant les grands, après avoir rempli le devoir de baiser le pan de leur robe, de s'asseoir sur le petit matelas préparés pour eux près de la table à manger.
2- D'amuser la société en tenant des propos gais et du goût du maître de maison.
3- D'éviter soigneusement de proférer le moindre mot offensant ou des expressions triviales; d'applaudir avec la dissimulation le plus parfaite à tous les discours du maître de la maison.
4- De ne lui donner jamais un démenti.
5- S'il leur prend besoin de tousser ou de bailler... de trouver le moyen d'étouffer adroitement ces inconvenances.
6- De ne pas déposer au milieu de la table, en mangeant, les restes, tels que les os des viandes et des pieds de moutons, mais de saisir un moment favorable pour les glisser sans qu'on s'en aperçoive, ou sous le plat du tiratoun (sauce à l'ail), ou sur le bord de la table.
7- Quant aux mets, tel que le kalwa (pâtisserie au miel), qu'on peut manger de deux manières, c'est à dire à la cuillère ou avec les doigts, de se régler, en les mangeant, d'après l'exemple du maître de la maison.
8- De ne jamais répandre de gouttes sur la table.
9- De ne pas tendre, avant le maître de la maison, leur main vers le plat, ni quand on l'emporte.
10- Enfin, si l'on sert une soupe à la poule, d'en tirer le morceau de chair à la cuillère et non avec les doigts.
Fait le 23e jour de la lune de djémasi el-ewwel 1216 (1800)."
Signé et paraphé,
El Hadj Ali.
On voit qu'au commencement de ce siècle, en Turquie, les parasites formaient une corporation avouée, protégée même par l'Etat, et dont le règlement était déposé dans les archives. Le gouvernement imposait à cette corporation une espèce de code auquel elle était tenue de se soumettre. Tout ce détail du petit matelas près de la table à manger, du halwa, du tiratoun, de la soupe à la poule, n'est pas sans intérêt pour l'étude des mœurs turques. Remarquons aussi, qu'un personnage très important, el Hadj Ali, le pèlerin Ali, n'avait point regardé comme au-dessous de lui de rédiger et de signer les dix articles du ce règlement.. on entrait probablement dans la confrérie des parasites
(1) Commandements impériaux.
(2) Prévôt.
(3) Corps.
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