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vendredi 13 juin 2014

Des mines de mercure.

Des mines de mercure.

Les principales mines de mercure sont en Hongrie, dans le Frioul, dans la partie vénitienne de l'Italie et en Espagne.
Le vif-argent, ou, comme les chimistes le nomment, le mercure, est une substance d'une grande importance dans les arts. Le mercure est employé pour mettre les glaces au tain, il est la base de plusieurs couleurs qui servent à la peinture, on l'emploie sous des formes diverses comme médicament, et il est très utile pour travailler les métaux.
On descend dans les mines du Frioul par des puits qui ont 90 brases de profondeur. Des machines y font mouvoir des pompes sans interruption, pour prévenir les inondations qui menacent sans cesse d'engloutir les mineurs.
Les malheureux qui exploitent ces mines sont des hommes condamnés pour crimes à ces pénibles travaux, ou des ouvriers que séduit l'appât d'un gain considérable. Au reste, ceux qui se trouvent renfermés dans ces sombres demeures sont exposés aux plus cruelles maladies. Lorsque le mercure s'est emparé de leur constitution, ils sont d'abord affectés de tremblements nerveux; peu après ils perdent leurs dents, ils éprouvent de vives douleurs dans les os, et bientôt la mort met un terme à leurs souffrances. Comme c'est principalement des exhalations de mercure que proviennent ces maux, les mineurs ont la précaution de mettre dans leur bouche une pièce d'or qui absorbe ces exhalations et empêche qu'elles ne pénètrent dans la poitrine. Cependant, toutes les parties du corps sont quelquefois tellement imprégnées de ce métal, qu'il leur suffit de frotter un morceau de cuivre avec un seul de leur doigt pour le rendre aussi blanc que de l'argent.
Il y a une riche mine de mercure à Idria, ville de la Carniole, dans les Etats d'Autriche. Elle resta ignorée jusqu'en 1497, et fut découverte d'une manière fort singulière. Quelques tonneliers s'étaient établis dans cette partie du pays à cause du voisinage des bois. L'un d'eux, désirant un jour éprouver la solidité d'une cuve qu'il venait de confectionner, alla la placer sous un petit filet d'eau qui tombait goutte à goutte d'un rocher. Le lendemain matin il voulut ôter la cuve, mais elle lui parut attachée à la terre, et il crut qu'elle avait été ensorcelée. L'ayant examiné de plus près, il découvrit, au fond de l'eau qu'elle contenait, quelque chose de fluide, de brillant et d'un poids considérable. Il prit une petite quantité de ce métal dont il ignorait les propriétés, et s'empressa d'aller le montrer à un apothicaire du voisinage. Celui-ci se garda bien d'en faire connaître la valeur au tonnelier, lui donna quelques pièces de monnaie pour le dédommager de sa peine, et l'encouragea à lui apporter tout ce qu'il pourrait de cette singulière substance. Le bruit de cette aventure se répandit bientôt, et une compagnie se forma pour exploiter la mine.
Un voyageur raconte qu'étant allé visiter un jour cette mine d'Idria, il fut placé dans une espèce de seau, et descendu à plus de cent brasses de profondeur. Il se trouva alors au milieu de cavernes immenses, où des milliers de malheureux, qui ne doivent jamais revoir la lumière du soleil, sont condamnés à traîner une misérable vie. Je ne pus rien distinguer, dit le voyageur, pendant quelques moments, pas même la personne qui m'accompagnait pour me montrer ces scènes d'horreur; il n'y a rien de plus déplorable que le sort des mineurs. La noirceur de leur visage ne sert qu'à cacher une pâleur affreuse causée par les exhalations mortelles qu'ils respirent. Ceux qui habitent cet effroyable séjour sont en général des condamnés à vie, et ils y vivent ordinairement pas plus de deux ans.
Je suivais mon guide en silence, réfléchissant à l'état horrible où ces malheureux s'étaient réduits par leurs crimes, tandis que, s'ils eussent été vertueux, ils auraient encore pu jouir de la lumière des cieux, de la santé et de la liberté. Tout à coup, je m'entends appeler par mon nom, je me retourne et je vois un homme d'un aspect noir et hideux qui s'approche de moi, en me disant d'une voix presque éteinte: Me reconnaissez-vous?
Quel fut mon étonnement lorsque je reconnus les traits d'un de mes amis les plus chers! Il s'était battu en duel avec un officier, malgré la défense de l'empereur, et avait été condamné à ce cruel supplice. Sa femme qui appartenait à une des premières familles de l'Allemagne, n'ayant pu obtenir la grâce de son mari, partageait son esclavage. Je dois ajouter que l'officier que mon ami avait laissé pour mort, guérit de sa blessure. Il sollicita généreusement la grâce de con adversaire, et il eut le bonheur de le rendre à la liberté.

Journal des Connaissances utiles, août 1834.

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