Une femme a vingt-cinq francs la livre.
Le mariage par la loterie - Concours de laiderons.
Jadis les filles laides et pauvres étaient vouées au triste célibat. Le monde moderne se préoccupe, ici et là, de leur sort, tant est pressant le besoin de remédier, en Europe, aux progrès de la dépopulation. Le temps n'est pas loin où en France même, l'Etat encouragera, par des moyens analogues à ceux que nous allons décrire, l'éclosion des petits citoyens. Mais disons ce qui a déjà été fait, de par le monde, pour amener au havre du mariage les pauvres filles que la nature a oubliées dans sa distribution de grâces et d'attraits.
A la plus laide.
Dans la petite ville de Haschmann, en Allemagne, les laiderons peuvent trouver assez facilement un mari, grâce aux legs d'un financier humanitaire (l'espèce est plutôt rare!).
Tous les ans, la plus difforme ou la moins belle des jeunes filles de la cité reçoit une somme de trois cents francs pour l'aider dans la recherche d'un époux. Il suffit à celles qui se jugent déshéritées de signaler leur candidature à l'Hôtel de ville. Bien mieux, parmi quarante candidates, la fiancé, belle ou laide, qui "rate" deux mariages dans une même année a droit à une indemnité de vingt louis! Les petites Allemandes doivent, comme nous l'avons dit, faire l'aveu à la mairie de leur manque de charmes. Et c'est là une démarche bien humiliante! Mais un banquier ne songe pas à ces menues sentimentalités.
En Russie, à Smolenks, on fait mieux. Toutes les jeunes personnes qui jugent devoir suppléer à ce qui leur manque de beauté par l'appât d'une petite fortune ont eu le droit de prendre part à une grande loterie matrimoniale. Elles achètent un billet au prix de un rouble. Il y a cinq mille billets. La gagnante empoche toutes les petites sommes déboursées par ses sœurs et devient, du coup, une héritière. Or, les hommes sont souvent victimes d'une illusion d'optique quand ils lorgnent une jeune fille "qui a le sac", et ils lui découvrent des charmes que le miroir ne reflète pas! La bossue, à leurs yeux, devient droite comme un i et le plus repoussant des laiderons acquiert, par la magie de ses écus, l'exquise beauté de la Joconde.
La fiancé au poids.
Le moyen employé autrefois par la municipalité de Temesvar en Hongrie, était d'un effet plus direct, plus précis.
Les magistrats invitaient purement et simplement toutes les jeunes filles de la ville à un concours de laideur, célèbre à vingt lieues à la ronde. Celle qui possédait une belle difformité pouvait prétendre au prix d'honneur (distribué seulement tous les cinq ou six ans), qui était de 1250 francs. Mais les filles laides (peu ou prou) recevaient toutes une somme d'argent. D'aucunes touchaient cent sous, c'étaient les moins méritantes en ce concours de disgrâces. Et par cela même, la municipalité leur distribuait, en quelque sorte, des "prix de beauté"!
Si les villes ont souci de trouver un époux à celles de leurs concitoyennes que n'assiègent pas les fiancés, les parents des fille laides emploient parfois, pour attirer les épouseurs, des réclames aussi ingénieuses que hardies.
Un papa de Koeniggratz promit par la publicité des petites annonces un somme d'argent du poids de sa fille au jeune homme qui voudrait bien devenir son gendre. La belle pesait 255 livres! Un jeune épicier, désireux d'agrandir sa boutique, jugea que cette colossal personne ferait bonne figure à la caisse. Il posa sa candidature, obtint le laideron et... 14.050 francs. De quoi acheter des tonnes de mélasse!
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 9 août 1903.
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