Le correspondant d'un journal étranger.
Journaliste privilégié entre tous les journalistes. A lui toutes les amitiés du gouvernement, les invitations dans les hôtels princiers, les confidences du Président de la République, les secrets des ministres, les reportage du high-life. Il est de toutes les fêtes, de tous les galas. Il a toutes les décorations de France et de Navarre. Il serre la main aux rois et tutoie les Présidents du Conseil.
Son métier, cependant, consiste à répandre à l'étranger, contre la France qui le nourrit et l'engraisse, toutes les calomnies et toutes les infamies. Pour donner un renseignement inédit à son journal qui nous hait, il trahira son meilleur ami et oubliera le dîner qu'il vient de faire. Sa situation de correspondant d'une grande feuille étrangère lui donne tous les droits et toutes les impunités. Si un journaliste français se permettait de dire le quart de ce que dit le correspondant, par un fil spécial, dans son organe exotique, il serait mis au ban de la presse et cruellement châtié par ses confrères.
Le correspondant étranger n'a pas lui-même de patrie. On ne sait ni d'où il vient, ni d'où il sort. Il n'a aucun talent, il est incapable de rédiger proprement cent lignes de copie; mais il est actif et remuant, il connait beaucoup de monde et ne recule devant aucun scandale, ni aucune indiscrétion.
Le correspondant étranger n'existe réellement qu'à Paris. Il y est comme un ambassadeur avec cinquante mille livres de traitement, hôtel et voiture. Son équivalent ne se rencontre pas à l'étranger. Si à New-York, à Londres, à Vienne, il existait un Français pour faire, vis à vis des Etats-Unis, de l'Angleterre et de l'Autriche, le métier que le correspondant étranger fait à Paris à l'égard de la France, il ne tarderait pas à être expulsé avec l'expression du plus profond dédain.
Mais nous sommes, nous, un peuple hospitalier, et puis nous sommes assez riches, assez heureux, assez spirituels pour permettre à nos ennemis de vivre à nos dépens.
Physiologies parisiennes, Albert Millaud, illustrations de Caran d'Ache, Job et Frick, à la librairie illustrée, 1887.
Son métier, cependant, consiste à répandre à l'étranger, contre la France qui le nourrit et l'engraisse, toutes les calomnies et toutes les infamies. Pour donner un renseignement inédit à son journal qui nous hait, il trahira son meilleur ami et oubliera le dîner qu'il vient de faire. Sa situation de correspondant d'une grande feuille étrangère lui donne tous les droits et toutes les impunités. Si un journaliste français se permettait de dire le quart de ce que dit le correspondant, par un fil spécial, dans son organe exotique, il serait mis au ban de la presse et cruellement châtié par ses confrères.
Le correspondant étranger n'a pas lui-même de patrie. On ne sait ni d'où il vient, ni d'où il sort. Il n'a aucun talent, il est incapable de rédiger proprement cent lignes de copie; mais il est actif et remuant, il connait beaucoup de monde et ne recule devant aucun scandale, ni aucune indiscrétion.
Le correspondant étranger n'existe réellement qu'à Paris. Il y est comme un ambassadeur avec cinquante mille livres de traitement, hôtel et voiture. Son équivalent ne se rencontre pas à l'étranger. Si à New-York, à Londres, à Vienne, il existait un Français pour faire, vis à vis des Etats-Unis, de l'Angleterre et de l'Autriche, le métier que le correspondant étranger fait à Paris à l'égard de la France, il ne tarderait pas à être expulsé avec l'expression du plus profond dédain.
Mais nous sommes, nous, un peuple hospitalier, et puis nous sommes assez riches, assez heureux, assez spirituels pour permettre à nos ennemis de vivre à nos dépens.
Physiologies parisiennes, Albert Millaud, illustrations de Caran d'Ache, Job et Frick, à la librairie illustrée, 1887.
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