F. Humbert, peintre des dames.
M. Ferdinand Humbert est né sous la Monarchie de juillet, à une époque peu troublée. Il n'est pas révolutionnaire. Cabanel fut l'un de ses maîtres. J'allais oublier de dire que M. Ferdinand Humbert est un peintre en vue.
Les sujets de ses premiers tableaux étaient empruntés à l'histoire. Il les dessinait avec soin et les enluminait fort habilement. On cite parmi ses meilleurs toiles: La Fuite de Néron, son premier envoi au salon (1865), Œdipe et Antigone retrouvant les corps d'Etéocle et de Polynice. Ambroise Paré implorant la pitié du duc de Nemours.
Bientôt il délaissa les scènes mouvementées et rechercha les figures isolées pour lesquelles il déploya toutes ses ressources de savant coloriste... Ce fut Messaouda, Héléna, Dalila, Salomé qui tour à tour sollicitèrent son pinceau. Les sujets religieux l'attiraient aussi et son tableau: La Vierge et l'Enfant Jésus est considéré comme son chef-d'oeuvre*.
On peut aller l'admirer au musée du Luxembourg, et se faire ainsi une idée exacte du talent de cet illustre maître.
Le Panthéon possède aussi une composition de M. Ferdinand Humbert: elle est placée du bras gauche de la croix et intitulée Pro Patria. Les connaisseurs qui l'apprécient le mieux disent qu'elle rappelle les œuvres de Puvis de Chavannes.
En avançant en âge, M. Ferdinand Humbert a senti décroître son goût pour les personnages défunts et il a remplacés les modèles payés par les modèles payants. Ce procédé dit-on sourit assez aux artistes. Mme V*** et Jules Lemaître, Mme Héglon et Mlle de B*** et quantités de dames X***, Y***, Z***, confèrent à ce peintre délicat le soin de révéler au public la blancheur de leur poudre de riz ou les entre-deux de leur guimpe. M. Ferdinand Humbert toucha des honoraires très élevés pour son travail; ces dames fournissaient les cadres, elle apportaient même les couleurs sur elles. On ne demande à l'artiste que d'idéaliser son modèle.
M. Ferdinand Humbert fut nommé en 1898 professeur à l'Ecole des Beaux-Arts (cours du soir). Deux ans après, des ateliers d'élèves femmes ayant été crées, on pensa tout naturellement à lui pour diriger l'atelier de peinture réservé au sexe qu'il connait si bien. On raconte pourtant que le cher maître n'a pas eu avec ses élèves les mêmes succès qu'avec ses clientes... Mais on raconte tant de choses! On dit bien que M. Ferdinand Humbert écrit proffesseur avec deux f. Comme si c'était vraisemblable de la part d'un homme qui a fait de la peinture historique!
On raconte aussi une petite anecdote qui ne manque pas de saveur. Le titre en pourrait être: Consécration officielle du talent de M. Ferdinand Humbert.
C'était peu d'années après l'Exposition Universelle de 1878 à laquelle cet artiste avait brillamment collaboré, comme l'attesta le ruban de la Légion d'honneur qui lui fut décerné.
Le président Grévy visitant le salon avec son escorte, qui comprenait des ministres, de hauts fonctionnaires et des artistes en renom, s'arrêta brusquement devant une toile, et se tournant vers ceux qui l'accompagnaient:
- Cristi! quelle croûte! leur dit-il avec sa bonhomie familière.
Malgré le silence général, dont il ne comprit pas le motif, Grévy insista:
- Vous m'avouerez que c'est de la toile bien gâchée!
Le silence se fit de plus en plus glacial. Les assistants se regardaient, se mouchaient, essuyaient leurs binocles, mais nul ne répondait.
Grévy devina qu'il avait fait une gaffe, mais payant d'audace:
- De qui est donc ce tableau? demanda-t-il.
Avec un peu d'hésitation, le Ministre des Beaux-Arts répondit:
- De M. Ferdinand Humbert, et, d'un ton plus timide encore il ajouta: ici présent.
L'auteur de la "croûte" se trouvait en effet dans le groupe officiel.
Alors Grévy s'avança, la main tendue, vers le peintre qui faisait piteuse contenance et lui dit, avec l'accent le plus affable et le plus sincère:
- Quand mes amis m'entendent déprécier une marchandise, ils comprennent aussitôt que j'ai l'intention de l'acheter. C'est ma manie.
Les visages s'éclairèrent d'un sourire et la peinture fut achetée pour l'Etat. Ah! le bon président! L'excellent peintre! Les braves gens!
Jean-Louis.
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 18 août 1907.
* Nota de célestin mira:
La Vierge, l'enfant Jésus et saint Jean-Baptiste. Ferdinant Humbert. |
Femme au chapeau. Ferdinand Humbert. |
Colette. Ferdinand Humbert. |
Humbert did paint Pro Patria in the Panthéon but the painting you show is not it. More likely it is by Cabanel.
RépondreSupprimerI cannot find again this painting and in cas of doubt, i prefer to delete it. Thank you for your remark.
RépondreSupprimerCe commentaire a été supprimé par l'auteur.
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