C'est une autre paire de manches.
Cette locution est venue d'un usage fort en faveur au douzième siècle. Deux fiancés qui voulaient former un tendre engagement échangeaient une paire de manches comme gage de don mutuel qu'ils se faisaient de leur cœur, et ils se les passaient aux bras, en promettant de n'avoir jamais plus chère parure.
Dans une nouvelle du troubadour Vidal de Besaudun, on voit deux amants se jurer de porter manches et anneaux l'un de l'autre. Cette promesse, il est vrai, n'engageât pas plus que les autres du même genre; celui qui devenait inconstant n'avait qu'à jeter au rebut la paire de manche de la veille et à la remplacer par une autre; celle qui avait cru le tenir dans sa manche s'apercevait qu'il n'en était rien, et que c'était une autre paire de manches qu'il portait.
Pour comprendre la possibilité d'un tel usage, il faut savoir qu'à cette époque hommes et femmes portaient des manches cousues, qu'on faisait bâtir sur soi le matin et découdre le soir, et qui était ordinairement d'une couleur différente du reste de l'habit.
Le roman de Perceforêt parle de dames assistant à un tournoi, et qui, dans leur enthousiasme, ont jeté dans la lice leurs ornements de tête et de cou, leurs manteaux et leurs manches. La manche était également un des gages que les dames donnaient à leurs chevaliers, et que ceux-ci plaçaient ordinairement sur leurs chapeaux, s'en faisant un trophée qu'ils étaient prêts à défendre envers et contre tous.
P. C.
Le Musée universel, revue hebdomadaire illustrée, premier semestre 1874.
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