Effets vulnérants des balles de petit calibre.
L'Italie, la Hollande et la Norvège ont adopté des projectiles de dimensions plus réduites (6,5 mm). Le poids oscille entre 10 grammes (balle norvégienne) et 15 grammes (balle française).
La balle française de 8 millimètres est actuellement la plus volumineuse. La balle allemande de 7,5 millimètres est celle qui s'en rapproche le plus.
L'Italie, la Hollande et la Norvège ont adopté des projectiles de dimensions plus réduites (6,5 mm). Le poids oscille entre 10 grammes (balle norvégienne) et 15 grammes (balle française).
Les armées européennes ont adopté les balles cuirassées formées d'un noyau de plomb entouré d'une chemise de maillechort, d'acier ou de cuivre.
Le projectile de Lee-Metford, si tristement célèbre aux Indes et en Afrique sous le nom de dum-dum, possède une chemise de maillechort qui va s'amincissant du culot de la balle au sommet de son ogive, où le plomb est laissé à nu, de sorte que, résistant moins au choc, il tend à se télescoper et multiplie ainsi les meurtrissures lorsqu'il rencontre sur sa route un obstacle sérieux tel qu'un os par exemple.
Les tissus se comporteront différemment selon leur résistance propre: c'est ainsi qu'un os ne réagira pas de la même façon qu'un organe mou comme le cerveau ou qu'un organe constamment plein comme le cœur.
On admet que les petits projectiles actuels, à grande vitesse initiale, ne font que des blessures minimes s'ils ne traversent que les parties molles sans léser les gros vaisseaux ou les os, et, dans ce cas, la plaie d'entrée ressemble à la plaie de sortie. La blessure est généralement représentée par un orifice très petit, ovalaire ou circulaire, dont le fond est couleur lie de vin; les bords taillés à l'emporte-pièce sont entourés d'une zone circulaire violacée très étroite.
Le moindre obstacle qui s'oppose à la traversée des tissus par une balle, un os, par exemple, en retardant cette traversée, permet une action plus prolongée du projectile et dès lors, celui-ci cause des délabrements considérables une fois l'obstacle franchi. Une vaste plaie de sortie produite par une balle de petit calibre est l'indice presque certain d'une fracture.
Les effets des petits projectiles varient avec la distance à laquelle les coups de feu sont tirés. Si quelque résistance sérieuse s'oppose à la traversée de l'organisme par une balle, la blessure faite dans ces conditions entre 10 et 400 mètres revêt une gravité exceptionnelle. Les désordres sont comparables à ceux qu'une explosion produits dans l'épaisseur mêmes des organes; jusqu'à 2.000 et même 2.500 mètres, la lésion se réduit généralement à une perforation, sans apparence d'éclatement ou de dilacération.
A des distances supérieures à 2.500 mètres les balles, en raison de leur vitesse alors réduite, ne produisent plus que de fortes contusions, mais sont encore capables, dans certains cas de fissurer un os.
Certaines expériences exécutées sur des animaux vivants et sur cadavres humains sont de nature à frapper l'esprit.
C'est ainsi que la balle du Mosin russe a traversé sept cadavres à 600 mètres; la balle Lebel a perforé deux cadavres à 1.000 mètres et brisé la clavicule d'un troisième; elle a tué des chevaux à 1.800 mètres et des moutons à 2.400 mètres; enfin le projectile le plus réduit de tous, la balle de 6 millimètres du fusil des Etats-Unis, qui ressemble plutôt, a-t-on dit, à un jouet d'enfant qu'à une véritable arme de guerre, traverse deux hommes à 4.570 mètre et un seul à la distance de 5.490 mètres.
Ces faits ne prouvent rien au point de vue de la force de pénétration des projectiles, car les conditions expérimentales varient avec chaque expérience, et il est plus malaisé à un projectile de perforer un seul fémur que de traverser de part en part les parties molles de trois sujets.
De plus, ces projectiles, si pénétrants qu'ils soient, n'arrêtent pas toujours l'élan d'un ennemi déterminé. Au Dahomey, des amazones percées de balles vinrent plusieurs fois tomber à quelque mètres des tirailleurs.
En Abyssinie, un bataillon italien fut abordé et mit en déroute par une troupe qu'il criblait de balles depuis quelques instants. On constata avec stupeur que la plupart des assaillants, qui avaient dû franchir 200 mètres à découvert, étaient blessés du fait de la fusillade terrible qu'ils avaient essuyés; enfin, pendant la guerre du Chi ral, les Anglais songèrent un instant à abandonner leur fusil du modèle Lee-Metford qui "ne tuait pas". Les soldats commençaient à se défier d'une telle arme et c'est pour rendre confiance aux troupes qu'il adoptèrent alors le projectile dum-dum.
Ceux-ci se déformaient aisément par suite de l'allègement de sa coque en certains points, produisant, en s'écrasant dans la plaie, des blessures si meurtrières que certains chirurgiens le taxèrent de projectile explosif.
En résumé, qu'une blessure résulte d'un coup de feu tiré de très près ou, au contraire de très loin, sa gravité est subordonnée au hasard qui a dirigé le projectile dans les tissus. Presque immédiatement mortelle si un organe important comme le cœur ou le cerveau est atteint, elle sera au contraire bénigne si les muscles et les parties molles se trouvent seuls sur le trajet sanglant, à l'exception du squelette et des vaisseaux de gros calibre.
Les lésions de la tête seront toujours graves, sinon mortelles. Je me rappelle avoir vu un soldat d'infanterie coloniale qu'une balle Lebel avait atteint au-dessus de l'arcade sourcilière droite. La plaie d'entrée était minuscule et comme un confetti de peau semblait avoir été enlevé à l'emporte-pièce.
Les dimensions de la plaie de sortie à la nuque étaient un peu plus grande et ses bords déchiquetés s'éversaient légèrement en dehors. La tête, dans son ensemble, paraissait intact, mais à l'autopsie, on constata sous le cuir chevelu un broiement tel que les os du crâne n'étaient soutenus que par leur adhérence au cuir chevelu et par le cerveau réduit en bouillie sue lequel ils reposaient.
L'usage des projectiles non déformables doit entraîner pour les blessés de plus grandes chances de guérison si des organes essentiels à la vie n'ont pas été atteints.
La lésion produite par la balle cuirassée est chirurgicalement plus susceptible de guérison que toute autre; c'est pourquoi il convient de s'élever avec force contre le reste de barbarie qui pousse certains hommes à dénoncer comme insuffisant le projectile actuel, afin de le remplacer par une balle déformable qui tuera avec plus de certitude.
Maurice Andral.
Le Petit Journal, militaire, maritime, colonial, supplément illustré paraissant toutes les semaines, 7 février 1904.
Le projectile de Lee-Metford, si tristement célèbre aux Indes et en Afrique sous le nom de dum-dum, possède une chemise de maillechort qui va s'amincissant du culot de la balle au sommet de son ogive, où le plomb est laissé à nu, de sorte que, résistant moins au choc, il tend à se télescoper et multiplie ainsi les meurtrissures lorsqu'il rencontre sur sa route un obstacle sérieux tel qu'un os par exemple.
Les tissus se comporteront différemment selon leur résistance propre: c'est ainsi qu'un os ne réagira pas de la même façon qu'un organe mou comme le cerveau ou qu'un organe constamment plein comme le cœur.
On admet que les petits projectiles actuels, à grande vitesse initiale, ne font que des blessures minimes s'ils ne traversent que les parties molles sans léser les gros vaisseaux ou les os, et, dans ce cas, la plaie d'entrée ressemble à la plaie de sortie. La blessure est généralement représentée par un orifice très petit, ovalaire ou circulaire, dont le fond est couleur lie de vin; les bords taillés à l'emporte-pièce sont entourés d'une zone circulaire violacée très étroite.
Le moindre obstacle qui s'oppose à la traversée des tissus par une balle, un os, par exemple, en retardant cette traversée, permet une action plus prolongée du projectile et dès lors, celui-ci cause des délabrements considérables une fois l'obstacle franchi. Une vaste plaie de sortie produite par une balle de petit calibre est l'indice presque certain d'une fracture.
Les effets des petits projectiles varient avec la distance à laquelle les coups de feu sont tirés. Si quelque résistance sérieuse s'oppose à la traversée de l'organisme par une balle, la blessure faite dans ces conditions entre 10 et 400 mètres revêt une gravité exceptionnelle. Les désordres sont comparables à ceux qu'une explosion produits dans l'épaisseur mêmes des organes; jusqu'à 2.000 et même 2.500 mètres, la lésion se réduit généralement à une perforation, sans apparence d'éclatement ou de dilacération.
A des distances supérieures à 2.500 mètres les balles, en raison de leur vitesse alors réduite, ne produisent plus que de fortes contusions, mais sont encore capables, dans certains cas de fissurer un os.
Certaines expériences exécutées sur des animaux vivants et sur cadavres humains sont de nature à frapper l'esprit.
C'est ainsi que la balle du Mosin russe a traversé sept cadavres à 600 mètres; la balle Lebel a perforé deux cadavres à 1.000 mètres et brisé la clavicule d'un troisième; elle a tué des chevaux à 1.800 mètres et des moutons à 2.400 mètres; enfin le projectile le plus réduit de tous, la balle de 6 millimètres du fusil des Etats-Unis, qui ressemble plutôt, a-t-on dit, à un jouet d'enfant qu'à une véritable arme de guerre, traverse deux hommes à 4.570 mètre et un seul à la distance de 5.490 mètres.
Ces faits ne prouvent rien au point de vue de la force de pénétration des projectiles, car les conditions expérimentales varient avec chaque expérience, et il est plus malaisé à un projectile de perforer un seul fémur que de traverser de part en part les parties molles de trois sujets.
De plus, ces projectiles, si pénétrants qu'ils soient, n'arrêtent pas toujours l'élan d'un ennemi déterminé. Au Dahomey, des amazones percées de balles vinrent plusieurs fois tomber à quelque mètres des tirailleurs.
En Abyssinie, un bataillon italien fut abordé et mit en déroute par une troupe qu'il criblait de balles depuis quelques instants. On constata avec stupeur que la plupart des assaillants, qui avaient dû franchir 200 mètres à découvert, étaient blessés du fait de la fusillade terrible qu'ils avaient essuyés; enfin, pendant la guerre du Chi ral, les Anglais songèrent un instant à abandonner leur fusil du modèle Lee-Metford qui "ne tuait pas". Les soldats commençaient à se défier d'une telle arme et c'est pour rendre confiance aux troupes qu'il adoptèrent alors le projectile dum-dum.
Ceux-ci se déformaient aisément par suite de l'allègement de sa coque en certains points, produisant, en s'écrasant dans la plaie, des blessures si meurtrières que certains chirurgiens le taxèrent de projectile explosif.
En résumé, qu'une blessure résulte d'un coup de feu tiré de très près ou, au contraire de très loin, sa gravité est subordonnée au hasard qui a dirigé le projectile dans les tissus. Presque immédiatement mortelle si un organe important comme le cœur ou le cerveau est atteint, elle sera au contraire bénigne si les muscles et les parties molles se trouvent seuls sur le trajet sanglant, à l'exception du squelette et des vaisseaux de gros calibre.
Les lésions de la tête seront toujours graves, sinon mortelles. Je me rappelle avoir vu un soldat d'infanterie coloniale qu'une balle Lebel avait atteint au-dessus de l'arcade sourcilière droite. La plaie d'entrée était minuscule et comme un confetti de peau semblait avoir été enlevé à l'emporte-pièce.
Les dimensions de la plaie de sortie à la nuque étaient un peu plus grande et ses bords déchiquetés s'éversaient légèrement en dehors. La tête, dans son ensemble, paraissait intact, mais à l'autopsie, on constata sous le cuir chevelu un broiement tel que les os du crâne n'étaient soutenus que par leur adhérence au cuir chevelu et par le cerveau réduit en bouillie sue lequel ils reposaient.
L'usage des projectiles non déformables doit entraîner pour les blessés de plus grandes chances de guérison si des organes essentiels à la vie n'ont pas été atteints.
La lésion produite par la balle cuirassée est chirurgicalement plus susceptible de guérison que toute autre; c'est pourquoi il convient de s'élever avec force contre le reste de barbarie qui pousse certains hommes à dénoncer comme insuffisant le projectile actuel, afin de le remplacer par une balle déformable qui tuera avec plus de certitude.
Maurice Andral.
Le Petit Journal, militaire, maritime, colonial, supplément illustré paraissant toutes les semaines, 7 février 1904.
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