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jeudi 1 décembre 2016

La vérité sur l'exposition de Chicago.

La vérité sur l'exposition de Chicago.




Chicago! Tout le monde descend!
Peu d'instants s'écoulèrent et un cab rapide comme la pensée nous amena aux portes de The Columbian Exhibition.




Ah! mes amis! comme disait jadis M. Sarcey, c'est alors que nous ne regrettâmes point notre voyage.
Vous pensez bien, lecteurs idolâtres, que je ne vais pas vous conter par le menu toutes les merveilles insérées dans cette exposition.
D'autres s'en sont chargés pour moi, mais avec une telle mauvaise foi que l'heure a sonné de la justice définitive et de l'apothéose.
Des journalistes européens sont allés à Chicago (y sont-ils allés, seulement?). Ils ont raconté qu'ils ont vu ceci et qu'ils ont vu cela.
Mais ce qu'ils ont évité soigneusement, c'est de dire tout le sensationnel, tout le frisson nouveau qui se dégage de cette incomparable manifestation du génie humain.
Quand ils ont parlé, ces chroniqueurs du vieux monde du fameux tire-bouchon mû par la force des marées et de la si curieuse essoreuse de poche, ils ont tout dit.
Eh bien! non, ils n'ont rien dit! Et voici ce qu'ils oublient (Dieu sait dans quel intérêt!).

THE AUTOMATIC PEDAGOGY

Le docteur Blagsmith travaille depuis quinze ans à son admirable invention d'élevage et d'éducation mécaniques des enfants.
Son exposition d'Automatic Pedagogy ne fut pas une des moins remarquées.
Plus besoin désormais des mères de famille, de nourrices, de gouvernantes, etc.!
Le docteur Blagsmith prend le baby à son arrivée au monde. Il le porte dans un petit berceau de son invention, lequel est situé dans une chambre (room) également de son invention.
Une fois le baby installé, on n'a plus besoin de s'en occuper pendant une période de dix à douze ans.
Néanmoins, pour plus de prudence, il convient de venir, tous les trois ou quatre mois, jeter un coup d’œil sur le jeune nourrisson.
L'enfant est alimenté mécaniquement et instruit mécaniquement.
Une bascule très sensible, sur laquelle repose le berceau, règle d'elle-même la quantité de nourriture à fournir.
Trois fois par jour, un jeu de brosses et d'éponges des plus ingénieux, s'empare de l'enfant, lui fait sa petite toilette et le recouche soigneusement, comme le ferait la plus tendre des mères.



Quand l'enfant crie, ce sont ses propres vagissements qui, transformé en force par un dynamophone, le bercent et l'endorment.
Devenu plus grand, le baby doit apprendre à lire. Voici de quelle façon se pratique son éducation:
Sur le mur, bien en face de lui, apparaît mécaniquement une lettre, A, par exemple. Au même instant, un phonographe prononce A. Puis, c'est le tour de la lettre B, et ainsi de suite.
Au bout de très peu de temps, l'enfant connaît ses lettres et se plaît à les nommer avant le phonographe.
Son éducation se poursuit aussi rationnellement que dans les meilleures écoles
L'indolence d'esprit ou la mauvaise volonté ont été prévues par le Dr Blagsmith.
Quand l'enfant ne dit pas sa leçon ou la dit mal, il résulte de cet état de choses une légère inharmonie qui met en jeu un courant électrique de faible tension. L'enfant ressent alors un léger mais désagréable picotement dans les fesses.
Ainsi averti, il apporte dans ses leçons plus d'attention. L'éducation morale n'a pas été oubliée par le Dr Blagsmith.
Toutes les heures, un phonographe clame les bons principes aux oreilles de l'enfant.
L'avenir dira ce qu'il faut penser de ce nouveau mode de puériculture. Pour le moment, il serait injuste de nier les commodités qu'il apporte, surtout dans les familles très occupées ou simplement indifférentes.


LE REZ-DE-CHAUSSÉE A TOUS LES ÉTAGES.

Un simple mot, en passant,  sur la Maison de l'ingénieur Moonman.
Plus de concierges, plus d'escaliers, plus d'ascenseurs!
La maison nouvelle de Moonman supprime tous ces inconvénients.
Bâtie sur une cavité de même forme et de même volume qu'elle, machinée de façon à s'enfoncer dans cette cavité au moyen d'un simple déclic, elle offre à ses habitants des avantages qu'on rencontrerait difficilement dans les vieux immeubles de l'ancien continent.
Selon que le locataire habite le quatrième ou le dix-neuvième étage, ce gentleman, quand il veut rentrer chez lui, pousse le quatrième ou le dix-neuvième bouton, et docilement la maison s'enfonce au degré voulu, mettant l'appartement demandé au raz du trottoir.



C'est comme qui dirait le rez-de-chaussée à tous les étages.
Ajoutons que la Moonman-House est facilement transportable. pour peu que les locataires tombent d'accord sur le choix d'une villégiature, que de frais et d'ennuis évités!

L'INTERPRETOPHONE.

Un petit instrument qui contribua vivement au succès de l'Exposition de Chicago, c'est l'interprétophone du capitaine Humbugson.
Pas plus encombrant ni plus lourd qu'un écran japonais, ce joli appareil se compose de deux minces feuilles d'un parchemin spécial, entre lesquelles opère un délicat réseau électrique qui transforme les vibrations françaises, par exemple, en vibrations anglaises, ou bien les vibrations finlandaises en vibrations tahitiennes.
Au moyen d'un jet de dix ou douze interprétophones, le voyageur pourra facilement se mettre en rapport avec tous les échantillons de la race humaine.
Reconnaissez qu'il était difficile de pousser plus loin la science et l'ingéniosité.

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 12 avril 1908.

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