Le veuf normand.
Un brave homme de paysan normand perd sa femme.
Il l'enterre, naturellement, puis au retour du cimetière, mange sa soupe au lard de bon appétit, se couche là-dessus, dort mieux que jamais et finalement continue son petit train-train de vie ordinaire. Quelques jours après, sa vache meurt.
Alors la scène change, le paysan s'arrache les cheveux, pleure toutes les larmes de son corps et, trois grandes semaines écoulées, ne peut encore parler sans attendrissement de la pauvre bête.
- Voyons, Gros-Jean, lui dit un jour le curé scandalisé par cette façon ondoyante et diverse de prendre les choses, ce que tu fais là n'est vraiment pas raisonnable. Comment, tu as à peine regretté ta femme pendant deux heures, et voilà près d'un mois que tu pleures ta vache!
- Pas raisonnable, M. le curé? Oh! que si, allez. Et la preuve c'est que depuis que j'ai perdu ma femme, j'ai trouvé plus de dix amis qui m'en ont proposé une autre, tandis que, depuis que j'ai perdu ma vache, personne ne m'en a offert une seule!
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 3 mai 1908.
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