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lundi 12 décembre 2016

Ceux dont on parle.

G.-A. de Caillavet et Robert de Flers.

Ces deux collaborateurs sont inséparables: c'est un auteur en deux personnes. Depuis quelques années ils sont tout à fait à la mode. La moitié des théâtres de Paris et de la province, jouent de leurs pièces: comédies, vaudevilles, opéras-comiques, opérettes, ils ont touché à tous les genres. Ils font les échos du Figaro, publient de spirituelles chroniques dans nombre de feuilles mondaines. Ils mettent les typographes sur les dents.




Et malgré ce travail acharné, malgré les premières, les expositions et toutes les solennités mondaines auxquelles ils ne manquent jamais d'assister, malgré les invitations à dîner dont on les comble et qu'ils n'auraient garde de refuser, MM. G.-A. de Caillavet et Robert de Flers ont le teint frais et rose. Ils sont très bien portants, ne se plaignent ni de crampes d'estomac, ni de neurasthénie. Ce sont vraiment des hommes heureux et dont leurs épouses ont le droit d'être fières.
Pas un homme célèbre n'est plus connu qu'eux du Tout-Paris. Le nombre de coups de chapeau qu'il leur faut donner s'ils vont du théâtre des Variétés à l'Opéra est inimaginable.
Cette célébrité leur est venu en peu d'années. Ils la doivent un peu à leur talent, un peu à leur complaisance, beaucoup à leur habileté. Ce sont des gens très serviables et d'une grande affabilité. M. Robert de Flers a épousé en 1901 mademoiselle Geneviève Sardou, la fille de l'illustre acteur dramatique. M. de Caillavet est au mieux avec M. Anatole France. Avec de tels patrons, l'association Robert de Flers et G.-A. de Caillavet ne pouvait que devenir rapidement prospère.
Le salon de Madame de Caillavet a réuni pendant quelque temps tout ce que Paris compte de notabilité dans les lettres et dans les arts. La présence fréquente de l'auteur de Thaïs était pour beaucoup dans ce mouvement de sympathie. A présent le salon de Madame de Caillavet est encore un des plus fréquentés, mais il a perdu un peu de son prestige le jour où M. Anatole France s'est abstenu d'assister aux séances de l'Académie: c'est que, du même coup, le salon qu'il fréquente cessait d'être une des coulisses de l'Institut.
On sait ce que sont ces salons à la mode: on y cause, "on y potine" serait plus exact, théâtre, chevaux, romans. Celui de Madame de Caillavet a ceci de particulier qu'on y discute surtout des questions sociales: ici encore, l'influence de M. Anatole France est visible. Le goût qu'il professe pour ce genre d'études, les aperçus judicieux qu'il a souvent donnés avec le ton détaché qui lui est propre sont bien connus. Souhaitons que, grâce à son concours, les intimes de Madame de Caillavet trouvent la solution de nos troublantes questions sociales. Il serait piquant que le remède du paupérisme fût découvert dans les salons d'un vaudevilliste.
Tandis que, dans l'association de Caillavet et de Flers, le premier s'occupe, avec l'aide de Madame de Caillavet, de l'organisation des réjouissances, il semble que M. de Flers soit plus spécialement chargé des rapports avec l'extérieur et du contentieux, ce rôle s’accommodant mal avec le tempérament paisible de son collaborateur. C'est ainsi qu'on a vu, l'été dernier, M. de Flers enfoncer, au cours d'un duel, quelques pouces de fer dans le bras de M. Pierre Veber. Allons la mutualité n'a poas encore dit son dernier mot: MM. Sardou, Anatole France, de Flers et de Caillavet donnent à tous les gens de lettres un exemple qu'il faut suivre.
                                                                                                                           Jean-Louis.

Mon dimanche, revue populaire illustrée, 12 avril 1908.

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