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mercredi 16 mai 2018

Les purgatifs.

Les purgatifs.

Molière n'en sera pas jaloux si, d'aventure, nous jetons un coup d’œil discret sur une question qui augmenta son renom et n'a pas cessé de partager en deux l'humanité: faut-il se purger ou faut-il ne pas se purger? Tartarin, dans son voyage en Suisse, disait plus élégamment, au sommet du Rigi: "Riz ou pruneaux!" La statistique de la table d'hôte montrait qu'il y avait autant de "riz" que de "pruneaux".
Un médecin bien connu, M. le docteur Burlureaux, professeur agrégé libre du Val-de-Grâce, vient de soutenir, dans un agréable petit livre, une thèse à laquelle j'étais tout rallié d'avance. Il s'élève énergiquement contre la purgation, comme si c'était un danger social. Que de gens l'abus des purgatifs a tués! Leur emploi est un préjugé que l'on ne détruit pas en un jour; mais il s'agit d'une réforme à préparer, difficile sans doute, mais nécessaire. M. Burlureaux est très convaincu, très persuadé, qu'il est temps de jeter un cri d'alarme.
Il est, sans doute, un peu absolu; mais à cela près, ses arguments ont de la portée. A la Société de Thérapeutique, un débat fort intéressant à commencé. Il a pris assez d'importance pour qu'il ait été décidé qu'il serait repris après les vacances. Toute discussion sur les remèdes de la constipation pourrait nous entraîner un peu loin, aujourd'hui. Nous attendrons les conclusions émises par la Société de Thérapeutique. Toutefois, on peut dire, dès aujourd'hui, avec M. le docteur Bardet, secrétaire de la Société de Thérapeutique, que l'on aurait tort de regarder comme paradoxales les idées de M. Burlureaux; il a peint son tableau à dessein avec de sombres couleurs, parce que, lorsqu'on soutient une thèse un peu originale, et surtout même, il est de bonne guerre de forcer la note.
Que dit M. Burlureaux? Que beaucoup de maux viennent d'une hygiène défectueuse, que la constipation, entre autres, n'est pas une maladie, mais un symptôme, et que contraindre l'intestin à fonctionner par des moyens énergiques, sans soigner en même temps la cause réelle du phénomène de rétention, ce n'est point faire oeuvre de thérapeute. Rien de plus exact. Cependant, tout considéré, M. Bardet assure que le purgatif est un mal, mais un mal nécessaire. Il défend aussi très énergiquement le remède illustré par Molière*. Celui-là, quoique dise M. Burlureaux, rendra toujours des services sérieux. M. Burlureaux a montré, dans son intéressant volume, comment on peut éviter les purgatifs; MM. Laquerrière et Delhern, au cours de la discussion, comment on peut aussi les éviter sûrement au moyen de l'électrothérapie. Nous voudrions seulement, en quelques lignes, bien montrer au public les dangers qu'il court en adoptant à tout hasard certains purgatifs. M. le docteur Allyre-Chassavant a été très net à cet égard. Le public est d'une extrême imprudence, car, en somme, la plupart des purgatifs sont des poisons.
M. Chassavant fait remarquer que les purgatifs salins sont employés généralement à doses trop forte. On en laisse tomber dans l'oubli qui sont à recommander. Par exemple, le trisulfate de soude, l'hyposulfate de soude, le phosphate de soude, le tartrate borico-potassique, le tartrate de potasse et de soude, maniés à des doses moyennes, en solution tiède étendue. Les purgatifs huileux ne devraient jamais être donnés aux malades sans l'avis du médecin. Les purgatifs dérivatifs et drastiques de même. Or, de nos jours, c'est surtout aux cholagogues et aux drastiques que s'adressent inconsciemment les constipés sans aucun discernement. Et souvent le médecin, trompée par l'étiquette posée sur la spécialité, ignore la nature du purgatif.
La plupart des spécialités purgatives renferment, en effet, du séné, de la rhubarbe, de l'aloès, du podophylus, du nerprun, du cascara sagrada, du fusain, de la bardane, ou un produit synthétique appartenant à la série aromatique, toutes substances toxiques qui agissent sur les muqueuses du tube digestif.
Les principes actifs nouveaux, tel que l'acide cathartique, la cascarine, la franguline, podophyllotoxine, évonymine, sont bien plus irritants que les infusions laxatives d'autrefois.
M. le docteur Chassavant déplore aussi que le médecin ne sache pas au juste la composition de certains médicaments. Il a pu constater que le médecin ignorait qu'en prescrivant du sirop de pomme de reinette*,  de la tisane des Shakers*, du Tamar*, du thé Chambard*, il ordonnait du séné, etc.
Un autre cas de fraude consiste, dit M. Chassavant, à affubler une spécialité laxative du nom d'une source minérale. Aussi le public et beaucoup de médecins s'imaginent que ces produits empruntent leurs propriétés aux eaux des pays dont ils se réclament. Ainsi, les "Marienbad tablettes*" sont à base d'aloès; la poudre laxative de Vichy* renferme du séné; les grains de Vals* et les pastilles de Châtel-Guyon* doivent leurs propriétés laxatives à d'autres substances qu'aux sels de ces stations.
Tout cela démontre qu'il serait prudent de surveiller de près les véritables propriétés de la fabrication industrielle des médicaments dits purgatifs.

                                                                                                                           Henri de Parville.

Les Annales politiques et littéraires, revue universelle paraissant le dimanche, 8 novembre 1908.

*Nota de Célestin Mira:

 Comment éviter les purgatifs, selon Molière?


Recette du moyen âge.

Le clystère.





Recette  Égyptienne antique.

Le liquide est insufflé dans le rectum 
au moyen d'un clystère à sarbacane.




Différents purgatifs:
































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