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mercredi 31 janvier 2018

Vaucluse et sa fontaine.

Vaucluse et sa fontaine.

Vaucluse est un fort modeste village du département auquel il donne son nom, situé à 20 kilomètres d'Avignon, sur la rive droite de la Sorgues, au fond d'une vallée dominée de toutes parts par des rochers abrupts. Il compte environ 850 habitants.
Mais le souvenir de Pétrarque fait du village de Vaucluse, et particulièrement de sa fontaine, qui est la source de la Sorgues, un lieu plus fréquenté, et surtout par des visiteurs mieux choisis, que la cité la plus glorieuse et la plus bruyante.
C'est en 1313 que Pétrarque, encore enfant, vint à Avignon, avec son père exilé. Le hasard le conduisit à Vaucluse, et par suite à la fontaine désormais fameuse, située à moins de 2 kilomètres plus loin. A la vue de ce site un peu sauvage mais pittoresque, et surtout des cascades d'eaux cristallines qui se précipitent dans un véritable gouffre où la Sorgue prend naissance, il ne put retenir un cri d'admiration et se promit de revenir en ce lieu et de s'y fixer si jamais il était libre de le faire.
Quinze années plus tard, il faisait, dans l'église Sainte-Claire d'Avignon, la rencontre de Laure, dont il était aussitôt amoureux. C'était un amour sans espoir, comme il en faut aux poètes. Pétrarque se rappela alors la fontaine de Vaucluse et son site sauvage, si bien d'accord avec ses pensées. Il y revint, acquit une maisonnette avec jardin dans une petite presqu'île voisine, et s'y installa. C'est là qu'il écrivit ses sonnets et ses canzoni, et il commença son poème de Scipion l'Africain, en latin; puis il alla voir d'autres cieux.
Laure mourut. Alors Pétrarque vint de nouveau enfermer dans sa maisonnette de Vaucluse sa douleur mortelle. Mais après l'avoir exhalée dans l’Épître à la postérité en 1352, il la quitta pour ne plus y revenir, quoiqu'il dût vivre encore vingt ans.
Je doute que la maison du poète ait survécu de longues années à l'abandon de son inconstant propriétaire, aussi a-t-on décoré du titre de "château" de Pétrarque, des ruines gothiques qui s'élèvent sur le sommet d'un rocher, au coude du défilé. Ce sont en réalité les ruines du château de l'évêque de Cavaillon, Philippe de Cabassoles, ami de Pétrarque d'ailleurs.
Une modeste colonne, érigée en 1809 sur un bloc de rochers, au bord du même gouffre, rappelle seule le souvenir du poète.

                                                                                                                              O. R.

Journal des Voyages, dimanche 16 janvier 1887.

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