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mercredi 28 décembre 2016

Ceux dont on parle.

Buffalo-Bill.

Tous ceux qui ont visité l'Exposition universelle de 1889 se rappellent les scènes émouvantes de la vie des prairies, l'attaque de la diligence par les Peaux-Rouges, l'assaut de la hutte du colon, les longues caravanes d'émigrants, reconstituées par le vaillant colonel Cody, surnommé Buffalo-Bill, ce qui signifie William tueur de buffle (il en abattit jusqu'à 82 en un seul jour, dans le Far West).
Elle n'est point banale, l'existence de ce soldat devenu directeur de cirque.




Toute sa jeunesse s'est écoulée dans la prairie sauvage. A neuf ans, il était cow-boy; à seize, il entrait comme éclaireur dans l'armée des Etats-Unis, où il fut un des plus utiles auxiliaires du général Sheridan. Les Indiens n'eurent jamais de plus terrible ennemi que lui. Cavalier et tireur de première force, non moins habile à déjouer leurs ruses que prompt à les attaquer, il dirigea contre eux de multiples expéditions et fut chargé de négocier avec les derniers survivants un traité de paix définitif.
Son activité allait se trouver sans emploi. C'est alors qu'il eut l'idée de conduire ses hommes non plus chez les Peaux-Rouges, mais chez les peuples civilisés, de les exhiber dans les capitales et de donner à de bons bourgeois casaniers des représentations "exactes" des tragédies du Far-West.
Son succès à Paris en 1889 fut très vif, tant à cause de l'attrait de la mise en scène que de l'adresse de ses hommes, dans le maniement du lasso et dans le tir à la carabine.
Il est revenu parmi nous en 1905, blanchi par les années et pourtant toujours aussi vigoureux. Mais cette fois ce n'était plus seulement les combats de la Prairie, qu'il venait renouveler. Une véritable armée, ne comprenant pas moins de huit cents hommes l'accompagnait: on y voyait figurer des chasseurs à cheval français, des lanciers anglais, des roughe-rivers de Roosevelt, des Cosaques et des Japonais, des Arabes et des indiens, des amazones du Far-West, des Mexicains, des Cubains.
Trois cent vingt-cinq chevaux, de race magnifique et admirablement dressés, servaient aux exercices de la troupe. Pour les introduire en France, Buffalo Bill avait dû déposer à la douane deux cent cinquante mille francs!
Il fallut pour transporter la troupe, les animaux et le matériel sur mer, deux paquebots, sur terre, trois trains de 65 wagons.
Pour l'installation des tentes, qu'on dressait en moins de deux heures, on employait 1.200 pieux, 4.000 mâts, 30 kilomètres de cordage.
Par jour, il ne fallait pas moins de 800 kg de viande, 1.000 kg de pain, 150 kg de sucre, 700 kg de légumes variés, 1.600 litres de thé et café, le vin et l'alcool n'étant pas admis.
Après avoir étonné Paris, Buffalo Bill fit une tournée en province, qui se termina par un désastre. Au moment où il allait les embarquer à Marseille, une épidémie de morve décima ses chevaux. Il dut en faire abattre cent trente en deux semaines. Comme un Américain sait toujours tirer parti des circonstances, même les plus funestes, Buffalo Bill faisait fusiller ses chevaux malades par les meilleurs tireurs de sa troupe à la fin de chacune de ses représentations: ce spectacle lui valu les plus belles recettes qu'il eût jamais encaissées, malheureusement, il était fort coûteux.
A l'heure actuelle, le colonel Cody, qui évalue à six cent soixante mille kilomètres le chemin qu'il a parcouru dans le monde, est probablement retiré dans son domaine du bassin du Big-Horn, dans le Wyoming , où il peut faire encore de belles randonnées, sans sortir de chez lui, puisqu'il possède en vallées, en montagnes et en prairies un territoire qui ne mesure pas moins de quinze lieues de long sur six de large.

                                                                                                                             Jean-Louis.

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 3 mai 1908.

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