Inondations de 1866.
L'Europe a eu, cette année, la guerre, elle a eu dans le choléra quelque chose qui ressemble à la peste, voici que les inondations se mettent de la partie. C'est un trio de fléaux pour 1866, sans parler de l'essai du tremblement de terre du 14 septembre. On ne peut monter dans un wagon de chemin de fer sans entendre parler de la crue menaçante de toutes les rivières.
La Seine atteint presque la voûte des ponts à Paris, déborde sur les ports et les chemins de halage, et ses eaux roulent des marchandises qu'elles ont enlevées. L'îlot situé près du Pont-Neuf, au pied du terre-plein de Henri IV et où l'on a installé le café chantant du Vert-Galant, est submergé ainsi que le barrage de la Monnaie. Il y a eu, dans les environs de Paris des campagnes inondées, et l'on craint que cette inondation ne se généralise.
Les arrivants de Moulins racontent que l'Allier a grossi à vue d’œil, qu'il a emporté une des travées du pont de Vichy, et qu'à la fin de septembre les communications étaient interrompues entre Clermont-Ferrand et Issoire; les eaux ont en plus pratiqué une brèche de quarante mètres de longueur entre Moulin et Bessay. Elles dépassent le niveau de 1856, et le pont de Chazeul, reliant Varennes à Saint-Pourçain, a été emporté.
La Loire, cette terrible Loire qui a déjà causé tant de malheurs, est plus menaçante encore. A Nevers, on a fait à la hâte les travaux nécessaires pour consolider la digue destinée à protéger la ville, et la population a évacué les quartiers les plus exposés. On a des craintes sur la rive gauche qui regarde Orléans; les paysans se sont réfugiés dans la ville. Tours a des craintes et ne communique plus avec Orléans.
Dans le département de la Loire, à Andrezieux et à Saint-Just, les eaux ont coupé les routes aboutissant au fleuve et ont envahi les environs de Roanne. On se met en mesure à Saint-Etienne et dans le département de combattre la crue dont on craint le progrès. A Bourges, l'Auron, l'Yèvre, l'Yvrette, le Moulon, ont inondé les prairies situées entre cette ville et Vierzon. La basse Sologne est submergée. Dans le Loiret on surveille le Loing et l'Ouanne, et Montargis a subi une inondation dans sa partie basse. L'Yonne a occupé quelques maisons sur la rive droite d'Auxerre, et la crue est signalée dans tout le bassin de l'Yonne, et sur la Seine jusqu'à Paris.
Dans la Côte d'Or, les pays de Nuits et d'Ancy-le-Franc se sont trouvés séparés par les eaux de leurs gares de chemin de fer. Dans le département de la Lozère, arrosé par l'Allier, le Lot et le Tarn, la partie basse de la ville de Mende a été inondée, plusieurs ponts des routes impériales et départementales ont été rompus, et le Lot, par sa crue subite, a causé des désastres en aval comme en amont de cette ville. La Garonne a causé de grands dommages, et, quoiqu'elle décroisse, les riverains de ce cours d'eau prennent toutes les précautions recommandées par la prudence.
La Vesle est sortie de son lit et a envahi un quartier de Quincampoix, et l'Aisne grossit. De Beaucaire, on signale la crue du Rhône; d'Alais celle du Gard. En Savoie, la rivière d'Arc, venant à déborder, a coupé le chemin de fer en quatre endroits, ainsi que la route impériale entre Saint-Jean de Maurienne et Modanne, en enlevant plusieurs ponts.
Enfin la direction générale des lignes télégraphiques entre l'Italie et la France se trouvaient interrompues.
La semaine des familles, n° 1, samedi 6 octobre 1866.
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