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samedi 25 mars 2017

Assassinat de M. Stamboulof.

Assassinat de M. Stamboulof.
      ancien chef du ministère Bulgare.



M. Stamboulof, qui fut pendant sept ans le dictateur de la Bulgarie, vient d'être assassiné dans des conditions extrêmement cruelles.
On se souvient que ce personnage politique, opposé à l'influence russe en Bulgarie, favorisa le 7 juillet 1887 l'élection du prince Ferdinand de Saxe-Cobourg, le 28 août suivant, l'appela à la présidence du conseil avec le portefeuille de l'intérieur.
Pendant sa direction aux affaires, qui dura jusqu'en mai 1894, M. Stamboulof s'est montré d'une dureté excessive pour ses ennemis.
Il a inauguré contre eux un régime de terreur, soupçonnant toujours des complots, dressant de longues listes de proscription, ordonnant sans pitié des exécutions capitales, dont la plus tristement célèbre fut celle du major Panitza.
Ce régime odieux souleva l'opinion publique à tel point que le prince Ferdinand dut se séparer bientôt de son ministère.
Mais M. Stamboulof avait laissé après lui des haines implacables. Sur le poteau où expira le major Panitza, une main inconnue avait cloué un écriteau sue lequel était écrit: "Bientôt, Stamboulof, ce sera ton tour!" Dès ce jour la mort du tyran avait été décidée.
Cette menace a été exécutée le 15 juillet à huit heures du soir, au moment où M. Stamboulof sortait de l'Union-Club. Il était déjà assis dans sa voiture, quand trois jeunes gens se jetèrent à le tête des chevaux qui allaient partir.
M. Stamboulof sauta dehors, sans doute pour prendre la fuite; alors commença une véritable boucherie.
Un agresseur porta à la victime un violent coup de yatagan qui lui coupa le poignet. M. Stamboulof tenta de s'enfuir, mais il reçut un coup de poignard sur la tête, puis une balle de revolver dans le dos. Alors il tomba.



Ce ne fut pas tout; les assassins lui portèrent encore deux coups de poignard à la tête et un autre à la poitrine. Le blessé essaya de parer de la main restée valide; mais cette main comme l'autre fut atteinte et pendit presque détachée du poignet.
Ce  qu'il y a de significatif, c'est que ceci se passait en pleine rue de Sofia, où il y avait du monde, des agents de police et des gendarmes, et que personne ne vint au secours de la malheureuse victime. La seule personne arrêtée sur le moment fut le domestique de M. Stamboulof qui poursuivait un assassin. Cette erreur, sans doute volontaire, a permis à l'assassin de s'échapper. L'opinion publique accuse la police de complicité.
M. Stamboulof est mort après deux jours d'horribles souffrances; on avait du achever de lui amputer les mains.
Certes le ministre bulgare avait montré de la cruauté dans sa politique; mais cette fin n'est-elle pas atroce et n'inspire-t-elle pas une grande pitié?
Elle rappelle certaines paroles de l’Évangile, que les hommes d'Etat doivent méditer plus encore que les simples citoyens.

Le Petit Journal, dimanche 4 août 1895.

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