L'art de régler sa pendule.
La pendule qui marche très bien.- Un jour, comme chacun sait, se compose de vingt-quatre heures. Ce point, une fois posé et admis comme principe d'évangile, il appert manifestement à tous qu'une horloge marchant à souhait doit voir, en cette période délimitée, ses aiguilles accomplir deux fois le tour de son cadran.
Toute pendule se conduisant de la sorte, agit en pendule honnête et régulière, au courant de ses devoirs les plus élémentaires.
Mais, dans la pratique ordinaire des choses, combien nous sommes loin, en général, de voir nos horloges se comporter avec une semblable précision.
Absolument comme si leurs incartades ne devaient jamais entraîner la moindre conséquence, les unes avancent imperturbablement de quelques minutes par jour, et les autres, plus paresseuses de nature, retardent de parti pris.
Or, comment savoir l'erreur commise en vingt quatre heures par les aiguilles indicatrices?
On règle sa pendule avec une lunette.- C'est ici que se manifeste l'utilité réelle, pour tout bon citoyen désireux d'accomplir avec méthode et précision les moindres actes de sa journalière existence, de posséder une lunette.
Depuis beau temps, grâce aux astronomes, nous savons que les étoiles du ciel ne sont pas de vulgaires vagabondes sans feu ni lieu, mais bel et bien des astres sérieux, aux habitudes régulières, ne s'écartant jamais et sous aucun prétexte de leur route et, davantage, ne flânant point en leur chemin.
Toutes, sans exception, ont coutume de venir prendre dans le ciel la même position par rapport à l'horizon d'un même point de la surface terrestre, toutes les vingt-trois heures cinquante six minutes et quatre secondes.
C'est à cette façon d'agir invariable des étoiles que nous autres, pauvres mortels, désireux de compter en toute certitude les minutes de la vie, devons de pouvoir avec commodité refréner les mœurs déréglées de nos horloges domestiques.
Pour cela, nous prenons notre lunette, et, la nuit venue, après l'avoir déposée sur un support bien stable, nous la dirigeons vers une étoile choisie autant que possible dans les environs de l'équateur céleste, mais indistinctement à l'est, à l'ouest ou au milieu du ciel.
Les étoiles indicatrices des heures.- Cela fait, quand l'image de l'étoile brille au centre de la lunette, nous fixons celle-ci bien solidement sur son support et nous notons l'heure indiquée par les aiguilles de la pendule que nous voulons régler.
Puis, cette double opération faite, nous laissons de côté notre instrument et allions vaquer à nos affaires.
Le lendemain, vers la même heure, nouvelle opération. Sans rien toucher à l'instrument disposé la veille, nous attendons, l’œil fixé à l'oculaire de la lunette, l'instant précis où l'étoile choisie viendra de nouveau montrer sa scintillante image. Alors nous inscrivons encore l'heure exacte marquée par notre horloge.
Si entre l'indication relevée la veille et celle obtenue lors de la seconde observation, nous constatons un retard de trois minutes cinquante-six secondes, notre pendule mérite tous les éloges. Dans le cas contraire, qui est évidemment le cas très général, il nous reste à modifier la marche de l'instrument, dont nous accélérerons ou modérerons le mouvement selon la circonstance, de façon à ramener ainsi notre pendule à retarder tout juste des trois minutes cinquante-six secondes réglementaires durant le temps de deux successifs passages d'une même étoile à l'horizon.
Soignons nos montres.- Mais, pour donner de bons "tuyaux" aux possesseurs de pendules réfractaires, nous ne négligerons pas les porteurs de montres.
Voulez-vous que votre montre marche bien, sans arrêt, avance ou retarde dans son infatigable tic-tac? Observez à son égard cette "ordonnance"
Remontez "toujours" la montre à la même heure et non à tort et à travers, tantôt le soir, tantôt le matin, comme on le fait trop souvent. Ne "jamais" la laisser séjourner dans le gousset d'un vêtement que l'on quitte et où elle est à la merci d'une chute, d'un heurt violent. Suspendre le soir la montre à un petit piton, ou mieux dans un porte-montre fixé au mur. Ne jamais la déposer sur le marbre d'une cheminée ou d'une table de nuit.
Georges Vitoux.
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 17 juin 1906.
Ou je me trompe, ou la grande majorité de nos contemporains s'imaginent, de bonne foi, qu'il est infiniment facile de pouvoir, en tout instant, connaître l'heure avec exactitude.
De façon courante, en effet, si à l'exemple du père de ce Tristram Shandy*, dont l'humoriste Sterne nous a narré l'histoire, l'on a, à date bien fixe, remonté sa pendule, l'on s'imagine bénévolement qu'il suffit, pour être renseigné de la façon la plus fidèle, de jeter un rapide et discret regard au cadran de son horloge.
Erreur grande, oh! combien!
L'irrégularité des pendules.- Il en serait, en vérité, assurément bien de la sorte si les horloges trottaient toutes régulièrement. Mais, qui ne sait que pour un oui ou pour un non, les aiguilles les plus disciplinées, sans raison apparente, se mettent, à certains jours, à battre la tramontane, et accélèrent ou retardent leur marche, tout comme si leurs fantaisies ne pouvaient nous faire manquer le train ou simplement rater nos rendez-vous.
Le cas est d'importance, comme l'on voit, et, sans conteste possible, mérite d'attirer l'attention.
Car comment parer à de tels mécomptes, et par quel artifice jamais régler sûrement notre pendule quand l'éloignement de tout observatoire nous interdit, procédé pratique et commode entre tous, de contrôler par un simple coup d’œil aux horloges officielles la marche plus ou moins fantaisistes des aiguilles de nos dévideuses d'heures?
Mesurez le temps.- Mon Dieu, en dépit de ce que l'on pourrait supposer, la chose est relativement facile, et tout un chacun possédant quelques connaissances astronomiques et... une quelconque lunette, peut en toute certitude, exactement comme M. Loevy* lui-même, le savant directeur de l'Observatoire de Paris, mesurer le temps, avec une entière précision.
Voici, au surplus, à l'usage de ceux qui voudront en faire l'expérience, le modus operandi, tel que l'indiquait naguère M. E. Soulié au cours d'un article publié par lui, dans une petite revue des plus intéressantes, le Journal du ciel.
Voici, au surplus, à l'usage de ceux qui voudront en faire l'expérience, le modus operandi, tel que l'indiquait naguère M. E. Soulié au cours d'un article publié par lui, dans une petite revue des plus intéressantes, le Journal du ciel.
La pendule qui marche très bien.- Un jour, comme chacun sait, se compose de vingt-quatre heures. Ce point, une fois posé et admis comme principe d'évangile, il appert manifestement à tous qu'une horloge marchant à souhait doit voir, en cette période délimitée, ses aiguilles accomplir deux fois le tour de son cadran.
Toute pendule se conduisant de la sorte, agit en pendule honnête et régulière, au courant de ses devoirs les plus élémentaires.
Mais, dans la pratique ordinaire des choses, combien nous sommes loin, en général, de voir nos horloges se comporter avec une semblable précision.
Absolument comme si leurs incartades ne devaient jamais entraîner la moindre conséquence, les unes avancent imperturbablement de quelques minutes par jour, et les autres, plus paresseuses de nature, retardent de parti pris.
Or, comment savoir l'erreur commise en vingt quatre heures par les aiguilles indicatrices?
On règle sa pendule avec une lunette.- C'est ici que se manifeste l'utilité réelle, pour tout bon citoyen désireux d'accomplir avec méthode et précision les moindres actes de sa journalière existence, de posséder une lunette.
Depuis beau temps, grâce aux astronomes, nous savons que les étoiles du ciel ne sont pas de vulgaires vagabondes sans feu ni lieu, mais bel et bien des astres sérieux, aux habitudes régulières, ne s'écartant jamais et sous aucun prétexte de leur route et, davantage, ne flânant point en leur chemin.
Toutes, sans exception, ont coutume de venir prendre dans le ciel la même position par rapport à l'horizon d'un même point de la surface terrestre, toutes les vingt-trois heures cinquante six minutes et quatre secondes.
C'est à cette façon d'agir invariable des étoiles que nous autres, pauvres mortels, désireux de compter en toute certitude les minutes de la vie, devons de pouvoir avec commodité refréner les mœurs déréglées de nos horloges domestiques.
Pour cela, nous prenons notre lunette, et, la nuit venue, après l'avoir déposée sur un support bien stable, nous la dirigeons vers une étoile choisie autant que possible dans les environs de l'équateur céleste, mais indistinctement à l'est, à l'ouest ou au milieu du ciel.
Les étoiles indicatrices des heures.- Cela fait, quand l'image de l'étoile brille au centre de la lunette, nous fixons celle-ci bien solidement sur son support et nous notons l'heure indiquée par les aiguilles de la pendule que nous voulons régler.
Puis, cette double opération faite, nous laissons de côté notre instrument et allions vaquer à nos affaires.
Le lendemain, vers la même heure, nouvelle opération. Sans rien toucher à l'instrument disposé la veille, nous attendons, l’œil fixé à l'oculaire de la lunette, l'instant précis où l'étoile choisie viendra de nouveau montrer sa scintillante image. Alors nous inscrivons encore l'heure exacte marquée par notre horloge.
Si entre l'indication relevée la veille et celle obtenue lors de la seconde observation, nous constatons un retard de trois minutes cinquante-six secondes, notre pendule mérite tous les éloges. Dans le cas contraire, qui est évidemment le cas très général, il nous reste à modifier la marche de l'instrument, dont nous accélérerons ou modérerons le mouvement selon la circonstance, de façon à ramener ainsi notre pendule à retarder tout juste des trois minutes cinquante-six secondes réglementaires durant le temps de deux successifs passages d'une même étoile à l'horizon.
Soignons nos montres.- Mais, pour donner de bons "tuyaux" aux possesseurs de pendules réfractaires, nous ne négligerons pas les porteurs de montres.
Voulez-vous que votre montre marche bien, sans arrêt, avance ou retarde dans son infatigable tic-tac? Observez à son égard cette "ordonnance"
Remontez "toujours" la montre à la même heure et non à tort et à travers, tantôt le soir, tantôt le matin, comme on le fait trop souvent. Ne "jamais" la laisser séjourner dans le gousset d'un vêtement que l'on quitte et où elle est à la merci d'une chute, d'un heurt violent. Suspendre le soir la montre à un petit piton, ou mieux dans un porte-montre fixé au mur. Ne jamais la déposer sur le marbre d'une cheminée ou d'une table de nuit.
Georges Vitoux.
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 17 juin 1906.
* Nota de célestin Mira:
* Vie et opinions de Tristram Shandy:
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