Albert Besnard.
M. Albert Besnard entre à dix-sept ans dans l'atelier de Cabanel*, l'illustre peintre sur lequel les rapins avaient fait le couplet connu:
Ah! pour moi que la vie serait belle,
Si j'étais Ca,
Si j'étais Ba,
Si j'étais Cabané... elle!
Deux ans plus tard il débutait au Salon où il se faisait bien vite remarquer, notamment en 1872, avec un délicieux portrait de fillette*. En 1874, il obtint le prix de Rome, grâce à une composition de la plus classique manière: La mort de Timophane*. Ses envois de Rome dénotaient déjà une touche personnelle et son quatrième envoi le classa hors concours: c'était une vaste composition intitulée: Après la défaite*.
Après un séjour de trois ans à Londres, M. Besnard revint à Paris pour y exécuter la décoration du vestibule de l'Ecole de Pharmacie*, dont il fut chargé par l'Etat sur sa demande, en 1883.
Ce travail se compose d'un certain nombre de panneaux, peints dans une couleur claire, qui ont été très appréciés.
Le talent de M. Albert Besnard est quasi universel: récompensé par l'Académie pour ses bonnes études, choisi par l'Etat pour une oeuvre importante et grave, il le fut aussi par les dames pour les plus futiles des travaux, celui de peindre leur portrait. Les portraits de M. Besnard sont-ils ressemblants? On peut en douter, à voir l'énorme succès qu'ils ont eu dans sa clientèle. Si jamais certaine définition de l'Art: "la Nature améliorée", fut exacte, c'est bien lorsqu'il s'agit des portraits de cet artiste, tellement il s'entend à faire valoir par l'éclat des cheveux ou des bijoux, et par les nuances des toilettes, la coloration des chairs. De là vint sans doute sa vogue, plus que de la ressemblance de ses œuvres, car on sait que pour se bien connaître, les dames ont toujours assez de leur miroir.
Parmi cette collection de jolis portraits, on voit avec quelque surprise figurer le visage très peu angélique de M. Denys Cochin. Citons aussi ceux de Mme Denys Cochin, de la princesse Mathilde*, de Mme Alphonse Daudet, le sombre portrait de Mme Albert Besnard* et, en 1886, celui de Mme Roger-Jourdain*, qui provoqua presque un scandale et qu'on ne désigna que sous ce nom: Le Femme jaune. Le modèle, j'allais dire la victime, était représenté debout, paré pour le bal, dans la double lueur du crépuscule et des lampes. Ces effets rares de lumière sont très recherchés de M. Albert Besnard, et par là, il s'oppose complètement à M. Carrière, qui, avant de se mettre au chevalet, a toujours soin, comme l'on sait, d'éteindre les lumières et de fermer les volets.
Il est encore un portrait de M. Besnard qu'on ne peut passer sous silence: celui de Mme Réjane*, en robe rose. l'actrice, paraît-il, ne le trouva point à son goût et il fut acheté par un pianiste viennois, M. Emile Aauer.
Quand il est las de la grande peinture, M. Albert Besnard esquisse des pastels ou des aquarelles, il se livre même à l'eau-forte. L'essentiel des œuvres qu'il a exécutées à l'heure actuelle représente un travail considérable. Ce bel exemple de labeur a été suivi autour de lui. Sa femme (Mlle Charlotte Dubray), fille d'un sculpteur, a fait elle-même de la sculpture; c'est aussi une femme de lettres: Besnard ayant fait en 1905 une exposition de ses œuvres, sa femme écrivit la préface du catalogue. Son fils aîné, M. Robert Besnard, qui a vingt-cinq ans, fait de la peinture depuis son enfance. Il n'est pas jusqu'à sa petite fille qui n'ait déjà manifesté, entre deux tétées, son goût pour les arts.
Jean-Louis.
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 8 avril 1906.
* Nota de Célestin Mira:
* Cabanel: Alexandre Cabanel fut un des plus célèbre peintres académiques du second Empire.
La boîte de Pandore, Alexandre Cabanel. |
* Albert Besnard:
Albert Besnard. |
Albert Bernard, fillette feuilletant un livre. |
Albert Besnard, la mort de Timophane. |
Albert Besnard, après la défaite. |
* Vestibule de l'Ecole de Pharmacie:
Ecole de Pharmacie. Décoration d'Albert Besnard. |
* Portraits d'Albert Besnard:
La princesse Mathilde Albert Besnard Château de Compiègne. |
Mme Besnard par Albert Besnard. |
Henriette Jourdain portrait d'Albert Besnard dit "La femme jaune". |
Réjane par Albert Besnard. |
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