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mardi 17 septembre 2019

Un marchand de plaisir.

Un marchand de plaisir.

- Régalez-vous, mesdames, voilà le plaisir!*
Tous les ans, au moment où Paris embaume le printemps, le vieux marchand, portant sa haute boîte de fer blanc, paraît sous les arbres des squares.
Il est tout cassé, tout rabougri, le vieux marchand au nez rouge, il marche à petits pas, mais il y a tant de joie dans ce seul mot: Plaisir!, que l'on évoque sous son habit usé, verdi de pluie, et sous son feutre trouvé quelque falote silhouette de la Régence.
- Régalez-vous, mesdames, voilà le plaisir!
Par tradition, le vieux marchand s'adresse aux dames, mais ce sont les petites filles à larges ceintures qui sont ses clientes, les petites filles et les moineaux bruyants qui voltigent parmi les branches et qui picorent les miettes qu'il laisse tomber sur son passage.
- Rouge, blanc, 2, 5, 10 avec un bruit de cri-cri, au hasard, l'aiguille tourne sur le cadran de la boîte rouge, et pour deux sous, pour deux sous l'on gagne tant de plaisir que, les mains n'y suffisant plus, on est obligé d'en manger!
De la couleur de l'ambre, léger comme le rire, saupoudré de sel blanc comme un matin de rosée, croustillant, roulé en cornet pour contenir la joie et justifier son nom charmant, tel est le plaisir...
Régalez-vous, mesdames, voilà le vieux marchand de plaisir qui passe; le plaisir, c'est le printemps, et ce cornet fragile s'appelle aussi un oubli.

                                                                                                                      Paul Leclercq.

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 20 mai 1906.

* Nota de Célestin Mira:

source: france-pittoresque.com

Au XIXe siècle, on entendait crier dans les rues: Voilà l'plaisir, mesdames, voilà l'plaisir. Dans les siècles précédents, les marchands de plaisirs étaient appelés des "oublieurs" car ils vendaient des gâteaux appelés "oublies". Une oublie était fabriquée à base de farine, d'eau, de lait ou de vin blanc et était cuite entre deux fers comme des gaufres.

Une oublie.

Le nom d'oublie fut donné à ces gâteaux parce qu'ils étaient si légers qu'après les avoir mangés, on ne s'en souvenait plus. Le mot "plaisir" fut substitué à celui d'oublie par analogie avec son caractère éphémère.


Marchande de plaisir.



Laitière et oublieur au XVIIe siècle.


Marchand de plaisir vers 1900.


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