Détails historiques sur l'Institut de France.
L'Institut de France se compose de cinq académies ou réunions savantes, dont les attributions sont en partie indiquées par les noms qu'elles portent; savoir:
1° Académie des sciences;
2° Académie française;
3° Académie des sciences morales et politiques;
4° Académie des inscriptions et belles-lettres;
5° Académie des beaux-arts.
L'institution des académies de France remonte jusqu'à Charlemagne. Les leçons de Pierre de Pise et l'influence du célèbre Anglais Alcuin firent de ce grand monarque un ami des lettres: il établit dans son palais une académie dont il fut membre, et qui jeta les premiers fondemens de la langue française. Un siècle après Charlemagne, la France était redevenue presque barbare, et avec elle tout l'occident, lorsque Alfred, roi d'Angleterre, à la fois poète, musicien, guerrier, savant et législateur, institua la fameuse Académie d'Oxford.
Sans rappeler ici les brillantes académies de Grenade et de Cordoue sous le règne des Maures en Espagne, et celles dont se couvrit l'Italie à la renaissance des lettres, nous arriverons à la création de l'Académie française, qui fut fondée la première parmi celles qui composent aujourd'hui l'Institut. La cardinal de Richelieu, ayant appris que plusieurs gens de lettres s'assemblaient à jours fixes pour discuter entre eux et se communiquer leurs travaux, forma le projet de les réunir en une société qu'il décora du nom d'Académie française; il en fut le chef et le protecteur, et lui fit octroyer, en 1635, des lettres-patentes par Louis XIII.
L'Académie des inscriptions et belles-lettres, établie par Colbert en 1663, fut connue long-temps sous le nom de petite Académie que lui avait donné Louis XIV, parce qu'elle ne fut composée d'abord que de quatre membres pris dans l'Académie française. A l'origine, les travaux de cette réunion se bornèrent aux dessins des tapisseries du roi, aux devises des jetons du trésor royal, à l'examen des projets d'embellissemens de Versailles, à celui des tragédies lyriques de Quinault, etc. Le nom qu'elle porte aujourd'hui indique assez que ses attributions ont été agrandies.
L'Académie des sciences, fondée par Colbert en 1666, fut une imitation de ce qui s'était fait quelques années auparavant en Angleterre.
Quelques philosophes s'assemblaient déjà sous Cromwell pour s'occuper de la recherche des secrets de la nature. Charles II, rappelé au trône par la nation, donna, en 1660, des lettres-patentes à cette académie naissante, si renommée depuis sous le nom de Société royale de Londres.
Colbert, voulant faire partager à la France la gloire que la nation anglaise s'était acquise sous ce rapport, fit agréer au roi l'établissement d'une Académie des sciences.
Pendant la tourmente révolutionnaire, les académies avaient comme disparu, les salles de réunions étaient désertes et abandonnées; la tête de Chénier roula sur l'échafaud, et Lavoisier, le célèbre fondateur de la chimie moderne, reçut la mort sans avoir pu confier au papier des découvertes importantes.
Mais après la terreur, le mouvement scientifique reçut une vive impulsion. La constitution de l'an III porte, au titre X!"Il y aura pour toute la république un Institut national, chargé de recueillir les découvertes, de perfectionner les arts et les sciences."
La loi du 3 brumaire suivant, sur l'instruction publique, offre, dans son titre IV, l'organisation de l'Institut, qui fut alors divisé en trois classes: la première comprenait les sciences physiques et mathématiques; la deuxième, les sciences morales et politiques; la troisième, la littérature et les beaux-arts.
La Convention avait déjà eu des preuves de l'importance des corps savans par les services que la France en avait reçus à l'époque de l'invasion du territoire par la coalition étrangère. Les savans firent des prodiges pour la défense du pays; entre autres travaux importants, on doit citer ceux de Chaptal et de Berthollet sur la fabrication des poudres, le traité de Monge sur les canons, etc., etc.
La création de l'Institut d'Egypte suivit de près celle de l'Institut de France. Bonaparte avait emmené avec lui, dans son expédition, une centaine d'hommes les plus distingués comme savans, artistes, ingénieurs, dessinateurs, géographes; parmi eux se faisaient remarquer surtout, Monge, Berthollet, Fourier, Dolomieux, Desgrenettes, Larrey, Dubois, Denon, Girard, Andréossy, Malus, etc. Ces hommes illustres partagèrent toutes les fatigues des soldats, et plus d'une fois excitèrent l'admiration de l'armée par le courage héroïque qu'ils montrèrent, soit contre l'ennemi, soit pour supporter les privations de tout genre qu'imposaient les marches à travers le Désert.
A peine Bonaparte eut-il pris possession du Caire, qu'il s'occupa d'organiser en Institut les savans qu'il avait amenés avec lui; il leur adjoignit quelques-uns de ses officiers les plus distingués, et se fit un honneur d'être compté lui-même parmi les membres de cette compagnie célèbre; il y consacra des revenus et l'un des plus vastes palais du Caire. Monge fut le premier qui en obtint la présidence, Bonaparte ne fut que le second. Les travaux que le nouvel Institut se proposa étaient du plus haut intérêt: les uns devaient faire une description exacte du pays, et en dresser la carte la plus détaillée; d'autres devaient en étudier les ruines, et enrichir l'histoire de leurs découvertes; ceux-ci avaient à en étudier les productions, et faire les observations utiles à la physique, à l'astronomie, à l'histoire naturelle; ceux-là avaient à rechercher les améliorations qu'on pourrait apporter à l'existence des habitans par des machines, des canaux, des travaux sur le Nil, ses procédés adaptés au sol de ce pays, si différent de l'Europe. L'abandon forcé de l'Egypte par l'armée française ne laissa pas le temps de donner à ces travaux tous les développemens qu'ils comportaient.
L'Institut de France conserva la nouvelle organisation qu'il avait reçue jusqu'au 3 pluviose de l'an XI (1803) a cette époque, Bonaparte, qui n'aimait pas les discussions des idéologues, dont se composait en grande partie l'académie des sciences morales et politiques, et qui préparait son avènement au trône absolu, mit fin, d'un trait de plume, à des réunions incompatibles avec sa politique; il supprima l'Académie des sciences morales et politiques, et divisa l'institut en quatre classes:
1° sciences physiques et mathématiques,
2° langue et littérature françaises,
3° histoire et littérature anciennes,
4° beaux-arts.
En 1815, l'Institut conserva son nom, mais les quatre classes reprirent les dénominations qu'elles avaient avant la révolution.
C'est seulement au 27 octobre 1832 que, sur un rapport adressé au roi par M. Guizot, ministre de l'instruction publique, l'Académie des sciences morales et politiques a été rétablie. Elle est aujourd'hui entièrement constituée.
L'Académie des sciences est celle des cinq classes de l'Institut qui a élevé le plus haut sa renommée par la célébrité de ses membres. Bonaparte s'honorait du titre de membre de l'Académie des sciences; et plus d'une fois, lorsqu'il était déjà couvert de gloire par ses brillantes campagnes d'Italie, il parut dans les solennités publiques en habit de membre de l'Institut. Lagrange, Fourcroy, sont morts sous l'empire, après avoir illustré l'Académie par leurs découvertes; Monge succomba, en 1818, au chagrin que lui causa son exclusion de l'Institut; Berthollet est mort en 1822, Laplace, l'auteur de la Mécanique céleste, en 1826; Fourier en 1829. Cuvier, en succombant l'année dernière, après d'innombrables travaux, a consterné tout le monde savant.
Depuis quelques mois seulement, M. Legendre, si connu parmi la jeunesse par ses Eléments de géométrie, et qui a enrichi la science de nouvelles branches de haute analyse, a été conduit à la tombe par son âge avancé. Enfin, M. Andrieux vient de laisser la place de secrétaire perpétuel de la classe des belles-lettres à M. Arnault. Les honoraires qui sont attachés au titre de membre de l'Institut s'élèvent à peu près à 1.500 fr. par année.
Le Magasin pittoresque, 1833, livraison 22.
L'Académie des inscriptions et belles-lettres, établie par Colbert en 1663, fut connue long-temps sous le nom de petite Académie que lui avait donné Louis XIV, parce qu'elle ne fut composée d'abord que de quatre membres pris dans l'Académie française. A l'origine, les travaux de cette réunion se bornèrent aux dessins des tapisseries du roi, aux devises des jetons du trésor royal, à l'examen des projets d'embellissemens de Versailles, à celui des tragédies lyriques de Quinault, etc. Le nom qu'elle porte aujourd'hui indique assez que ses attributions ont été agrandies.
L'Académie des sciences, fondée par Colbert en 1666, fut une imitation de ce qui s'était fait quelques années auparavant en Angleterre.
Quelques philosophes s'assemblaient déjà sous Cromwell pour s'occuper de la recherche des secrets de la nature. Charles II, rappelé au trône par la nation, donna, en 1660, des lettres-patentes à cette académie naissante, si renommée depuis sous le nom de Société royale de Londres.
Colbert, voulant faire partager à la France la gloire que la nation anglaise s'était acquise sous ce rapport, fit agréer au roi l'établissement d'une Académie des sciences.
Pendant la tourmente révolutionnaire, les académies avaient comme disparu, les salles de réunions étaient désertes et abandonnées; la tête de Chénier roula sur l'échafaud, et Lavoisier, le célèbre fondateur de la chimie moderne, reçut la mort sans avoir pu confier au papier des découvertes importantes.
Mais après la terreur, le mouvement scientifique reçut une vive impulsion. La constitution de l'an III porte, au titre X!"Il y aura pour toute la république un Institut national, chargé de recueillir les découvertes, de perfectionner les arts et les sciences."
La loi du 3 brumaire suivant, sur l'instruction publique, offre, dans son titre IV, l'organisation de l'Institut, qui fut alors divisé en trois classes: la première comprenait les sciences physiques et mathématiques; la deuxième, les sciences morales et politiques; la troisième, la littérature et les beaux-arts.
La Convention avait déjà eu des preuves de l'importance des corps savans par les services que la France en avait reçus à l'époque de l'invasion du territoire par la coalition étrangère. Les savans firent des prodiges pour la défense du pays; entre autres travaux importants, on doit citer ceux de Chaptal et de Berthollet sur la fabrication des poudres, le traité de Monge sur les canons, etc., etc.
La création de l'Institut d'Egypte suivit de près celle de l'Institut de France. Bonaparte avait emmené avec lui, dans son expédition, une centaine d'hommes les plus distingués comme savans, artistes, ingénieurs, dessinateurs, géographes; parmi eux se faisaient remarquer surtout, Monge, Berthollet, Fourier, Dolomieux, Desgrenettes, Larrey, Dubois, Denon, Girard, Andréossy, Malus, etc. Ces hommes illustres partagèrent toutes les fatigues des soldats, et plus d'une fois excitèrent l'admiration de l'armée par le courage héroïque qu'ils montrèrent, soit contre l'ennemi, soit pour supporter les privations de tout genre qu'imposaient les marches à travers le Désert.
A peine Bonaparte eut-il pris possession du Caire, qu'il s'occupa d'organiser en Institut les savans qu'il avait amenés avec lui; il leur adjoignit quelques-uns de ses officiers les plus distingués, et se fit un honneur d'être compté lui-même parmi les membres de cette compagnie célèbre; il y consacra des revenus et l'un des plus vastes palais du Caire. Monge fut le premier qui en obtint la présidence, Bonaparte ne fut que le second. Les travaux que le nouvel Institut se proposa étaient du plus haut intérêt: les uns devaient faire une description exacte du pays, et en dresser la carte la plus détaillée; d'autres devaient en étudier les ruines, et enrichir l'histoire de leurs découvertes; ceux-ci avaient à en étudier les productions, et faire les observations utiles à la physique, à l'astronomie, à l'histoire naturelle; ceux-là avaient à rechercher les améliorations qu'on pourrait apporter à l'existence des habitans par des machines, des canaux, des travaux sur le Nil, ses procédés adaptés au sol de ce pays, si différent de l'Europe. L'abandon forcé de l'Egypte par l'armée française ne laissa pas le temps de donner à ces travaux tous les développemens qu'ils comportaient.
L'Institut de France conserva la nouvelle organisation qu'il avait reçue jusqu'au 3 pluviose de l'an XI (1803) a cette époque, Bonaparte, qui n'aimait pas les discussions des idéologues, dont se composait en grande partie l'académie des sciences morales et politiques, et qui préparait son avènement au trône absolu, mit fin, d'un trait de plume, à des réunions incompatibles avec sa politique; il supprima l'Académie des sciences morales et politiques, et divisa l'institut en quatre classes:
1° sciences physiques et mathématiques,
2° langue et littérature françaises,
3° histoire et littérature anciennes,
4° beaux-arts.
En 1815, l'Institut conserva son nom, mais les quatre classes reprirent les dénominations qu'elles avaient avant la révolution.
C'est seulement au 27 octobre 1832 que, sur un rapport adressé au roi par M. Guizot, ministre de l'instruction publique, l'Académie des sciences morales et politiques a été rétablie. Elle est aujourd'hui entièrement constituée.
L'Académie des sciences est celle des cinq classes de l'Institut qui a élevé le plus haut sa renommée par la célébrité de ses membres. Bonaparte s'honorait du titre de membre de l'Académie des sciences; et plus d'une fois, lorsqu'il était déjà couvert de gloire par ses brillantes campagnes d'Italie, il parut dans les solennités publiques en habit de membre de l'Institut. Lagrange, Fourcroy, sont morts sous l'empire, après avoir illustré l'Académie par leurs découvertes; Monge succomba, en 1818, au chagrin que lui causa son exclusion de l'Institut; Berthollet est mort en 1822, Laplace, l'auteur de la Mécanique céleste, en 1826; Fourier en 1829. Cuvier, en succombant l'année dernière, après d'innombrables travaux, a consterné tout le monde savant.
Depuis quelques mois seulement, M. Legendre, si connu parmi la jeunesse par ses Eléments de géométrie, et qui a enrichi la science de nouvelles branches de haute analyse, a été conduit à la tombe par son âge avancé. Enfin, M. Andrieux vient de laisser la place de secrétaire perpétuel de la classe des belles-lettres à M. Arnault. Les honoraires qui sont attachés au titre de membre de l'Institut s'élèvent à peu près à 1.500 fr. par année.
Le Magasin pittoresque, 1833, livraison 22.
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