Gustave Charpentier.
L'auteur de Louise et du Couronnement de la Muse, le fondateur de l'oeuvre de Mimi Pinson et du Conservatoire des ouvrières*, le musicien philanthrope bien connu du boulevard Rochechouart, où il ne manque jamais de se poster à l'heure où les petites ouvrières quittent l'atelier. Car M. Charpentier, qui ne travaille pendant la journée qu'en vue du bonheur des petites midinettes, prend plaisir le soir à les saluer "honnêtement" au passage. Aussi est-ce un homme fort occupé et l'on conçoit que depuis son opéra, qui remonte à trois années, il n'ait encore rien produit.
Il travaille une cantate, paraît-il, pour laquelle il faudra un grand nombre de musiciens et une foule compacte de choristes et de danseuses. Où trouver un personnel aussi nombreux, et dont les exigences ne soient pas trop élevées? Voilà ce que se demandait l'éminent compositeur, lorsqu'une idée lui vint: quelque temps après le conservatoire de Mimi Pinson était créé, où toutes les ouvrières de bonne volonté furent admises le soir pour jouer, qui de la harpe, qui du jarret, qui du gosier. Il était bien entendu, pour satisfaire la morale publique, que les ouvrières n'allaient chercher là qu'une distraction honnête et que jamais le mot de théâtre ne serait prononcé dans cette maison. C'était pour égayer leur mère et leur petite sœur que ces demoiselles apprenaient à lever la jambe. Pourtant, quelques semaines après, les plus habiles d'entre elles allaient essayer leur talent dans les concerts de charité, en attendant la grande séance du Trocadéro. Cet adroit compositeur est une victime de la Renommée: il ne se passe pas de jour que les journaux ne nous entretiennent de ce qu'il fait ou de ce qu'il dit, et cependant il assure que personne ne déteste la réclame autant que lui.
Déjà, lorsqu'il était pensionnaire de l'Académie de France, à Rome, se manifestait sa modestie: il avait alors adopté pour costume une toge rouge vermillon, ce qui lui permettait de passer inaperçu dans les rues de la ville. Mais où cette modestie de violette tourna à l'humilité, ce fut lors de la première de Louise au théâtre d'Alger. La salle était comble et le beau Gustave, bien peigné, en habit et cravate blanche, se tenait, souriant, dans une loge d'avant-scène, entièrement garnie de fleurs. On eût dit un portrait vivant dans un cadre de roses, d’œillets et de lis. Et l'humble musicien se levait, s'inclinait, se rasseyait pour se lever encore aux applaudissements de la foule. Et il prononça même un discours! Ah! comme il dut souffrir!...
L'activité de Charpentier déborde de sa personne; si elle n'est pas plus féconde en œuvres de valeur, c'est qu'elle se disperse un peu et que M. Charpentier veut être à la fois musicien, poète et philosophe.
Il a écrit lui-même le livret de son opéra comme Wagner, mais Wagner était un homme de génie, tandis que M. Charpentier a écrit dans un style pénible une pièce d'intérêt contestable.
En tant que philosophe, il s'est efforcé de prouver que la liberté est un droit et le plaisir un devoir.
C'est en vertu de ces principes qu'il avait installé à l'Académie de Rome une jeune Muse; le directeur l'ayant appris pendant que M. Charpentier était en voyage, pria la déesse de revenir lorsqu'elle aurait obtenu le Prix de Rome, ce qui fâcha vivement le compositeur, à son retour, contre M. Hébert.
Ajoutons que M. Charpentier prépare la suite de Louise, dans laquelle nous verrons probablement ce que deviennent les jeunes filles qui se laissent enlever.
Il y aura une scène d'hôpital d'un réalisme saisissant où des soins de toute nature seront donnés aux malades.
Jean-Louis.
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 26 juillet 1903.
Il travaille une cantate, paraît-il, pour laquelle il faudra un grand nombre de musiciens et une foule compacte de choristes et de danseuses. Où trouver un personnel aussi nombreux, et dont les exigences ne soient pas trop élevées? Voilà ce que se demandait l'éminent compositeur, lorsqu'une idée lui vint: quelque temps après le conservatoire de Mimi Pinson était créé, où toutes les ouvrières de bonne volonté furent admises le soir pour jouer, qui de la harpe, qui du jarret, qui du gosier. Il était bien entendu, pour satisfaire la morale publique, que les ouvrières n'allaient chercher là qu'une distraction honnête et que jamais le mot de théâtre ne serait prononcé dans cette maison. C'était pour égayer leur mère et leur petite sœur que ces demoiselles apprenaient à lever la jambe. Pourtant, quelques semaines après, les plus habiles d'entre elles allaient essayer leur talent dans les concerts de charité, en attendant la grande séance du Trocadéro. Cet adroit compositeur est une victime de la Renommée: il ne se passe pas de jour que les journaux ne nous entretiennent de ce qu'il fait ou de ce qu'il dit, et cependant il assure que personne ne déteste la réclame autant que lui.
Déjà, lorsqu'il était pensionnaire de l'Académie de France, à Rome, se manifestait sa modestie: il avait alors adopté pour costume une toge rouge vermillon, ce qui lui permettait de passer inaperçu dans les rues de la ville. Mais où cette modestie de violette tourna à l'humilité, ce fut lors de la première de Louise au théâtre d'Alger. La salle était comble et le beau Gustave, bien peigné, en habit et cravate blanche, se tenait, souriant, dans une loge d'avant-scène, entièrement garnie de fleurs. On eût dit un portrait vivant dans un cadre de roses, d’œillets et de lis. Et l'humble musicien se levait, s'inclinait, se rasseyait pour se lever encore aux applaudissements de la foule. Et il prononça même un discours! Ah! comme il dut souffrir!...
L'activité de Charpentier déborde de sa personne; si elle n'est pas plus féconde en œuvres de valeur, c'est qu'elle se disperse un peu et que M. Charpentier veut être à la fois musicien, poète et philosophe.
Il a écrit lui-même le livret de son opéra comme Wagner, mais Wagner était un homme de génie, tandis que M. Charpentier a écrit dans un style pénible une pièce d'intérêt contestable.
En tant que philosophe, il s'est efforcé de prouver que la liberté est un droit et le plaisir un devoir.
C'est en vertu de ces principes qu'il avait installé à l'Académie de Rome une jeune Muse; le directeur l'ayant appris pendant que M. Charpentier était en voyage, pria la déesse de revenir lorsqu'elle aurait obtenu le Prix de Rome, ce qui fâcha vivement le compositeur, à son retour, contre M. Hébert.
Ajoutons que M. Charpentier prépare la suite de Louise, dans laquelle nous verrons probablement ce que deviennent les jeunes filles qui se laissent enlever.
Il y aura une scène d'hôpital d'un réalisme saisissant où des soins de toute nature seront donnés aux malades.
Jean-Louis.
Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 26 juillet 1903.
* Nota de Célestin mira:
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