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vendredi 16 juin 2017

Le tsar Nicolas II.

Ceux de qui l'on parle:
      Le tsar Nicolas II.



Quand on réfléchit à l'épouvantable cauchemar que doit être la vie du tsar et de sa femme, constamment menacés dans leur personne et dans celle de leurs enfants, on admire qu'il y ait en Europe, au vingtième siècle, une famille capable de s'assujettir aussi étroitement à un simple préjugé.
Voilà un homme qui ne peut traverser une ville, qu'elle soit russe, allemande, française, belge sans rencontrer une foule de gens qui désirent sincèrement sa mort et dont quelques-uns n'attendent qu'une occasion propice pour l'assassiner. 
Voilà une mère qui trouve jusque sur le lit de son fils, apportées par quelles mains? on ne sait, des lettres condamnant le père et l'enfant à mort; et la tsarine n'ignore pas qu'Alexandre II fut averti de sa condamnation par une lettre trouvée sous sa serviette.
Parfois, par le fait du hasard ou à la suite d'une dénonciation, on découvre les préparatifs d'un attentat. Dernièrement dix-sept bombes avaient été dissimulées en divers endroits du château impérial et des fils électriques les reliaient.
Et pour que ces gens échappent à ces dangers perpétuels et aux transes épouvantables par lesquelles ils passent, pour qu'ils vivent tranquilles et se consacrent à l'éducation de leurs cinq enfants, dont l'aînée n'a pas treize ans, il suffirait qu'emportant chacun leur dot, ils quittassent leurs trônes branlants et leurs sujets rebelles.
Seul, le préjugé de l'autocratie commande à Nicolas II de tenir tête à cette foule d'hommes en discorde qu'il s'obstine à considérer comme son peuple.
Pour remplir on ne sait quelle mission providentielle, cet homme faible et pieux sacrifie tous les ans des milliers d'individus: ceux qu'il condamne et ceux qu'il emploie. Il expose journellement sa vie et celle des siens. Il est héroïquement absurde.




Ce n'est pas par ironie que je viens de parler de la piété du tsar.
Ce caractère faible présente les contradictions les plus étranges: ses intimes rapportent qu'on l'a vu plus d'une fois, pendant la guerre russo-japonaise, pleurer à la lecture des dépêches relatant les terribles batailles engagées dans les plaines de Mandchourie.
Pieux, il l'est jusqu'à la superstition. Il a pour confident un moine qui passe dans le peuple pour un sorcier et dont Nicolas II ne se sépare guère plus que de son ombre. Il n'a jamais pris une décision grave sans consulter son Éminence grise, le père Jean de Cronstadt.
Le tsar Nicolas Alexandrovitch est né à Saint-Pétesbourg le 18 mai 1868 (6 mai dans le calendrier russe). Il règne depuis la mort d'Alexandre III dont il était le fils aîné (1894).
Son père lui donna des maîtres nombreux et choisis, et voulut que son éducation fut parfaite. Aussi une de ses plus grandes joies fut-elle de recevoir un rapport que le tsarevich, âgé de seize ans, lui adressa à la suite de son premier voyage dans l'Empire. Mais aucun des maîtres du jeune Nicolas n'avait-il collaboré à la rédaction du rapport?
Le tsarevitch était déjà colonel, chef ou propriétaire de divers régiments russes ou étrangers, quand il entreprit un deuxième voyage qu'il poussa jusqu'en Cochinchine et jusqu'au Japon, où un fanatique, devançant de quinze ans les événements, le frappa et le blessa à la tête.
C'est sur le désir exprimé par Alexandre III à son lit de mort que Nicolas fut fiancé à la princesse Alix de Hesse, sœur du grand duc régnant sur les Hessois; en se convertissant au culte orthodoxe, la princesse prit le nom d'Alexandra.
Veut-on connaître une des occupations favorite de la tsarine? Pendant que les révolutionnaires se font assommer par les Cosaques la douce impératrice contemple sa collection d’œufs de Pâques! elle en a, paraît-il, plus de cent cinquante; le plus beau est en or émaillé de roses et renferme une reproduction du carrosse qui lui servit le jour de son mariage. C'est celui qu'elle préfère, car elle est bonne épouse, la femme du Petit Père.

                                                                                                                        Jean-Louis.

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 24 mai 1908.

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