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dimanche 19 août 2018

Anecdotes historiques sur la coiffure des dames.

Anecdotes historiques sur la coiffure des dames.


Les femmes, chez les anciens, s'attachaient avec grand soin à cette partie de leur toilette. Les Israélites, malgré la simplicité de leurs mœurs, passaient beaucoup de temps à arranger leurs cheveux. La coiffure est et fut toujours riche en Turquie; tantôt elle est formée de tissus de soie et de tresses flottantes; tantôt c'est un turban orné de perles, ou bien une coiffure haute et pointue, ornée de pierreries. Mais quelle que soit sa forme, les femmes la couvrent toujours d'une écharpe dont les bouts retombent de chaque côté de la tête. En été, elles portent quelquefois cette écharpe sur l'épaule, à la chevalière, ce qui ajoute encore au charme de leur parure.
Les femmes de la Turquie d'Asie ont une mise toute différente; elles sont ordinairement enveloppées d'un large capuchon qui les cache de la tête aux pieds, et ne laisse apercevoir que le haut de leur visage. Les habitantes de l'île de Chio ont une mise charmante; elles se coiffent généralement avec des fichus qu'elles posent comme les paysannes des Basses-Pyrénées; elles en forment ainsi une coiffure haute, ornée de rubans. Un signe distinctif de cette coiffure, c'est un double nœud formé sur le devant du front. Les Persanes portent les cheveux frisés en boucles flottantes, tombant sur le derrière du cou et le dessus des épaules: leurs masses de cheveux onduleux sont pressées à leur racine par un ample turban fait, pour la plupart du temps, avec un cachemire. L'ornement le plus en usage le plus en usage chez les femmes est une aigrette; celles qui veulent donner de la grâce à leur coiffure, disposent ordinairement l'étoffe pour que les coins du châle retombent sur un des côtés, ce qui accompagne fort bien une figure longue et fait disparaître la sévérité du turban, sans en diminuer la beauté. Tout le monde sait quelles recherches les femmes grecques mettaient à leur coiffure, et certes il n'y a pas d'ornemens ni de parfums en usage chez nos petites maîtresses qui n'aient été employés par les élégantes d'Athènes ou de Corinthe. Les Romaines ne cédaient à aucune nation pour la recherche des ornemens, et dans la manière de tresser ou de friser leurs cheveux. Quant à la variété qu'elles donnaient à leurs modes, les musées nous en disent assez long pour que nous soyons convaincus que les femmes savaient unir la grâce à la simplicité. Ainsi, la coiffure a fait, comme les sciences, elle s'est perfectionnée à mesure que le monde s'est civilisé, et ce n'a été que par suite de grandes catastrophes que, dans certains pays, les femmes se sont vues tout à coup privées de leur chevelure: il a fallu que des barbares aillent soumettre la Grèce au joug du sultan, pour que les arts et tous les signes distinctifs qui caractérisaient une nation aussi intéressante, retombassent dans l'abrutissement le plus complet.
Après cinq cents ans de brillant esclavage, la Gaule échappa au joug de Rome et devint la proie des hommes du Nord. Ils apportèrent à la nation leurs vertus sauvages et un nom que tous les genres de gloire allaient rendre célèbres. La France s'éleva rapidement et s'assis sur les débris de l'empire. Mais revenons à mon sujet. Chez les Francs, les notables portaient les cheveux longs et retombant sur leurs épaules; le reste de la nation les portait courts sur le devant, et relevait le reste sur le sommet de la tête sous la forme de panache. Sous la première race, les femmes portaient leurs cheveux séparés sur le front, légèrement bouclés sur les tempes, et ceux de derrière flottaient en tresses. Cette mode fut adoptée par la terrible Frédégonde, et Gertrude, femme de Clotaire II; Odélie, fille d'un prince allemand, laisse voir sous son voile une longue chevelure tordue comme une corde à puits. Cette manière de porter les cheveux flottans dura jusqu'à ce que Richilde, femme de Charles-le-Chauve, eut la fantaisie de les cacher sous une toque.
Richarde, femme de Charles-le-Gros, imagina d'en tresser la moitié inférieure et de les relever ensuite jusqu'à la moitié des joues. Cette innovation caractérisa la coiffure du neuvième siècle, dont la mode dura long-temps, et fut remplacée par les bourrelets sous lesquels on cachait tous les cheveux. Quelquefois les princes de l'Eglise ordonnèrent de cacher la chevelure, et ce ne fut que pour obéir aux évêques que Charles VII fit couper sa barbe et ses cheveux.
Au douzième siècle, Blanche de Castille rétablit la mode de porter des cheveux sur les tempes, et le voile surmonté d'une couronne*;
Jeanne, comtesse de Toulouse, fit quelques jolies innovations, mais elles ne durèrent pas long-temps, et le voile cacha bientôt la chevelure. Vers la fin du treizième siècle, on tressait les cheveux et on en faisait une sorte de grecque par derrière; mais les oreilles étaient cachées par des tresses, et cela rendant cette mode un peu lourde.
Au commencement du quatorzième siècle, Clémence Isaure apporta de la grâce dans le costume des femmes; et, malgré les malheurs qui désolaient la France à cette époque, Isabeau de Bavière inventa des modes extravagantes*. A son exemple, on vit des femmes cacher tous leurs cheveux et se découvrir le sein et même les épaules. Ce fut elle qui établit la mode des coiffes qu'on appelait cornues*, mode horrible et bizarre, dont on peut se faire une idée en voyant les bonnets du pays de Caux*.
Anne de Bretagne* attira les femmes à la cour; elle ramena l'usage de montrer les cheveux, et la manière dont les dames les portent aujourd'hui est une imitation de celle de ce temps. Dans cette mode, qui est celle connue plus particulièrement sous le nom de la belle Féronnière*, il y a une certaine recherche, malgré la simplicité qui règne dans l'arrangement des cheveux de devant; et la ganse qui passe par dessus le front, ornée d'une petite plaque, était pour l'époque une précieuse découverte. Catherine de Médicis* vint tout changer, et elle imprima à la toilette des femmes la laideur de son caractère; les cheveux et la taille étreinte, le ridicule et la raideur prirent la place de l'élégance qui commençait à distinguer les toilettes françaises. Ce n'est pas que les femmes ne fissent de grands frais pour se parer, car elles étaient chargées de colliers et de médaillons; et même, dans le courant du règne de Henri III, les dames de la cour portaient des fleurs et des plumes dans leurs cheveux. Anne d'Autriche* vint occuper le trône de France, et la toilette des dames y gagna, car alors les cheveux furent frisés en touffe et en boucles flottantes. Mademoiselle de Guébriant*, dont chacun peut voir le portrait, était coiffée presqu'aussi bien que madame de Grignan*, le règne suivant; et on peut attribuer à la mode apportée par Anne d'Autriche, les coiffures célèbres par leur grâce et leur naturel, qui ont fait les délices des Sévigné, des La Vallière, en un mot de la cour de Louis XIV.
Ce genre de coiffure reçut un grand développement, car Montgolbert coiffait indistinctement avec toutes sortes de bijoux; la Martin, coiffeuse célèbre, avait la réputation de bien poser les fleurs. Louis XV monta sur le trône, et la mode changea sous ce roi qui chérissait tant les belles; le sexe perdit une partie de ses charmes, et cela par l'introduction en France de la poudre, usage très ancien, mais qui n'avait lieu chez les orientaux que comme signe de deuil. Grâce à la poudre, on ne voyait dans les salons que des têtes blanches, et pour rendre cette mode encore plus monotone, toutes les femmes se faisaient coiffer de même, ce qui produisait une ennuyeuse uniformité. Je ne conçois pas comment le coiffeur Lefebvre, qui avait du goût, laissa introduire un usage aussi ridicule. Pour donner une idée des inconvénients de cette mode, je vais faire la description du costume de coiffeur de femmes, en 1778. Veste rouge un peu poudrée, culotte noire et bas gris, un tablier. Qu'on ne se figure pas que j'exagère en rien, car c'était là l'habillement des coiffeurs de la cour; les autres n'étaient pas abordables, et, de peur d'attraper des taches, on évitait toujours ces messieurs avec un soin extrême. Sous le règne de cette mode de sale mémoire, on était obligé de monter sur des tabourets pour atteindre le sommet de la coiffure*; ce fut ainsi que l'on fit celles appelées le Parterre galant ou la Gabrielle de Vergy, le Bonnet à la Reine ou la Frégate à la Junon*; il était impossible d'en venir à bout à moins d'être perché sur un marche-pied.
En 1785, les coiffures étaient moins hautes et moins bizarres, mais on poudrait toujours avec fureur. Le Colimaçon d'amour et le Bonnet à la Marlborough remplacèrent la Monte-au-ciel*, genre horrible et contre lequel j'aurais certainement conspiré si j'avais existé à l'époque des Lesprit, des Léonard, des Bizard, et autres coiffeurs de ce temps.
Léonard, coiffeur de Marie-Antoinette, était spirituel, adroit, et ne manquait pas d'un certain tact que les anciens appelaient le fion. Mais je ne trouve pas qu'il ait jamais employé ses moyens, ni cherché à tirer parti de l'empire qu'il avait sur les dames pour les faire adopter des modes qui fissent ressortir leurs attraits; ce n'est pas en faisant des tours de force, en bâtissant des châteaux énormes sur la tête, qu'on parvient à ce dernier degré de l'art; c'est en cherchant à proportionner la coiffure avec la corpulence de la femme, et en consultant la forme et la coupe de son visage. Mais les anciens ne connaissaient point de règles; aussi ne suis-je point étonné que Léonard ait cru  faire une merveille en coiffant un jour une grande dame de la culotte de velours de son mari. Si, au lieu de s'appliquer à des détails qui ne signifient jamais grand chose, on s'était occupé davantage du fond, les coiffeurs se seraient aperçus que ce placardage de pommade et de poudre, au lieu de seconder leurs efforts pour embellir, était un obstacle invincible; ce n'est pas non plus un échafaudage de crêpure, ni des boucles et des chignons flottans qui peuvent faire valoir le teint lorsqu'une couche épaisse de farine d'amidon en ternit tout l'éclat.
La nature ayant eu soin de donner à chacun des cheveux analogues à son teint, c'est par leur couleur seulement  qu'on peut voiler agréablement le cou d'une femme. Qu'on ne soit donc pas surpris de ne plus voir un seul portrait de famille orner les salons; c'est à cette vilaine mode qu'on en doit la disparition. La révolution de 1789 abolit, avec les vieilles institutions, tous les usages gothiques de la toilette; une coiffure plus simple, plus naturelle et surtout plus propre, fut un des premiers avantages que les dames durent à la conquête de la liberté. Les coiffures antiques prirent la place des bonnets à la Pompadour, et les cheveux, rendus à leur couleur naturelle, prirent un aspect plus gracieux. Alors beaucoup de dames avides de nouveautés, sous prétexte de suivre le cours des événemens, se mirent à la Titus*; et ce ne fut que lorsqu'elles s'aperçurent qu'elles avaient sacrifié au simple caprice de la mode une partie de leurs attraits, qu'elles se décidèrent à reprendre les coiffures à la grecque; mais il fallut avoir recours à des cheveux artificiels et inventer de nouvelles perruques. C'est à cette circonstance qu'on doit l'invention des cache-folies*, nom qu'on donne aux perruques à longs cheveux, et que toutes les femmes portaient pour qu'on ne s'aperçût pas de la folie qu'elles avaient faite en coupant leur chevelure. La pompe et l'éclat de la cour de Napoléon ranimèrent le zèle un peu ralenti des coiffeurs, et tous ceux qui se piquaient de travailler pour la bonne société étaient obligés d'aller au Musée et à la Bibliothèque pour étudier les modes. Les plus habiles établirent des écoles où les garçons et beaucoup de jeune maîtres allaient prendre des leçons; tous, remplis d'un enthousiasme extraordinaire, voulaient apprendre la coiffure antique.
Cette mode dura long-temps, et ce ne fut que pour se relever en pain de sucre (mode chinoise), que les dames abandonnèrent la bandelette pourpre et le réseau de perles. Par un contraste dont on a peine à se faire une idée, les femmes, qui depuis plusieurs années s'attachaient les cheveux dans le bas de la fossette, se les relevèrent tout à coup sur le devant de la tête; les cheveux ainsi retroussés, on élevait des édifices qui étaient quelquefois d'une hauteur démesurée, mais qui ne manquaient cependant pas d'une certaine grâce. Cette mode fut l'objet des plus grands études pour les coiffeurs, et cela se conçoit parfaitement en considérant la différence la différence qu'il y a entre la coiffure chinoise et à la grecque*.

                                                                                                                                  Croizat.

Le Salon littéraire, jeudi 25 mai 1843.

Nota de célestin Mira:

* Blanche de Castille:





* Isabeau de Bavière.



Isabeau de Bavière.

* La mode des cornues.



La mode des cornues au moyen âge.


* Coiffes du pays de Caux.









* Anne de Bretagne:


Anne de Bretagne.


* La belle Féronnière est un tableau de Léonard de Vinci peint sur bois et exposé au Louvre.



La belle Féronnière
de Léonard de Vinci.


* Catherine de Médicis:


Catherine de Médicis.


* Anne d'Autriche:


Anne d'Autriche
 par Frans Pourbus le Jeune 1616.

* Mademoiselle de Guébriant:




* Madame de Grignan:




* Coiffeurs à la cour:





Diverses coiffures:





Marie-Antoinette.
Coiffure du Bonnet à la Reine.





* Coiffure à la Titus:

Mme Arnault de Gorse, coiffée à la Titus,
de Louis-Léopold Boilly.
* Coiffures à la Titus et cache-folies.





* Coiffure à la chinoise.




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