Préfectorale.
Nous lisons dans la Vigie du Morbihan:
Le 26 de ce mois, on vit entrer dans les rues de Lorient une voiture escortée par un officier de gendarmerie et dix gendarmes, suivie d'une autre voiture; elle traversa la ville au milieu des autres curieux qu'avait attirés ce spectacle extraordinaire.
Les deux voitures continuèrent néanmoins leur marche sous le feu des commentaires, et elles arrivèrent bientôt à la porte de la sous-préfecture.
Il y eut dans la foule un moment d'émotion, et lorsque la portière de la première voiture s'ouvrit, tous les yeux se fixèrent avec une avide curiosité sur le personnage qui en descendit; or ce personnage c'était... le préfet du Morbihan..., qui s'était imaginé que sa nouvelle dignité ne lui permettait pas de voyager comme le commun des mortels et des préfets.
C'était là, certes, un bon commencement de comédie, la fin fut plus originale encore. On demanda à M. le préfet s'il recevrait en préfet ou en conseiller d'Etat. Ce fonctionnaire répondit qu'il voulait recevoir en conseiller d'Etat. Il se revêtit donc des insignes de son nouveau titre, et il attendit de pied ferme les autorités civiles et militaires. Les visites furent rendues comme elles avaient été reçues, c'est à dire toujours en conseiller d'Etat.
On s'étonnera sans doute que M. le préfet, qui se rendait à Lorient pour y présider en cette qualité le conseil de révision, ait cru devoir se parer, dans ces réceptions officielles, d'un costume étranger à cette mission. Il y a à ce fait, étrange en apparence, une explication toute simple. M. le conseiller d'Etat en service extraordinaire a voulu montrer son habit neuf! Qu'on ne vienne donc plus dire que les types comiques sont usés quand on trouve des traits pareils à celui-ci dans les mœurs administratives.
Le salon littéraire, dimanche 4 juin 1843.
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