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mardi 4 mars 2014

Ce que coûte un navire de guerre.

Ce que coûte un navire de guerre.

Le prix varie dans de très grandes limites, suivant le type de navire, sa vitesse, son armement. Les navires de guerre, quand ils sont commandés à un chantier privé, et non pas livrés par un arsenal de l'Etat, s'achètent à la tonne, exactement comme une locomotive; mais, bien entendu, le prix de la tonne demandé par les constructeurs diffère suivant les installations que l'on exige, les plans qui ont été fournis, les aménagement offensifs et défensifs qui doivent être installés à bord du navire, le type et la puissance de la machine, la vitesse de marche, etc... 
La tonne qui sert de base au prix est la tonne de déplacement, autrement dit le poids total du navire, le poids de l'eau qu'il déplace (suivant le principe d'Archimède), ce poids étant formé non seulement de la coque, mais encore du cuirassement, de l'armement et de tout le reste. Que l'on ne perde pas de vue, d'ailleurs, que même sans parler des monstres actuellement sur chantier qui arriveront à représenter des poids formidables, un navire cuirassé comme le Nassau allemand pèse près de 18.000 tonnes; ce poids est légèrement dépassé par le cuirassé anglais Superb; notre cuirassé Voltaire pèse 18.300 tonnes. D'autre part un croiseur cuirassé comme l'Indomptable anglais pèse sensiblement le même poids, tandis que le poids de notre Ernest Renan, qui est croiseur cuirassé lui aussi, n'atteint pas tout à fait 14.000 tonnes. Les petits croiseurs, que l'on construit de moins en moins, pèsent de 3.000 à 3.200 tonnes.
C'est naturellement la tonne de cuirassé qui coûte cher, à cause de l'armement particulièrement soigné, des cuirassements, qui nécessitent des procédés de fabrication très coûteux, etc.... En Allemagne, la tonne de cuirassé coûte à peu près 2.600 francs; en Angleterre, le prix est beaucoup plus bas et n'atteint guère plus de 2.280 francs, la Grande-Bretagne fabriquant de façon remarquable et économique sur ses immenses chantiers navals. Le chiffre correspondant, en France, dépasse très largement 2.900 francs. Pour les croiseurs cuirassés, les prix respectifs sont de 2.340 francs en Allemagne, de 2.500 francs en Angleterre et de près de 2.600 francs en France. Qu'on ne s'étonne pas que, pour ce type de bateaux, les Allemands paraissent construire moins cher; mais c'est qu'il s'agit jusqu'ici de bateaux présentant des vitesses bien inférieures à celles des croiseurs cuirassés anglais.
La vitesse augmente tellement le prix de revient des bateaux, que nous pouvons donner à cet égard une indication bien caractéristique. L'Angleterre possède un simple contre-torpilleur qui ne représente pas un déplacement de plus de 1.800 tonnes, le Swift, le bien nommé, le rapide. Le fait est qu'il donne une vitesse de 36 nœuds. Aussi n'a-t-il pas coûté moins de 6.257.000 francs, ce qui représente à la tonne de bien près de 3.500 francs. En France, où l'on construit beaucoup plus chèrement, tel contre-torpilleur, déplaçant seulement 425 tonnes, n'a pas coûté moins de 1.647.000 francs. Ajoutons enfin que le prix de revient à la tonne des bateaux sous-marins est encore plus élevé. C'est ainsi que le Fresnel nous a coûté 1.635.000 francs, soit environ un prix de 4.150 francs à la tonne de déplacement.

                                                                                                            Pierre de Mériel.

Le Journal de la Jeunesse, premier semestre 1913.

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