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jeudi 15 avril 2021

 Le mariage.


M. Naquet, chimiste, M. Paul Bert, zoologiste, M. Broca, qui prétend être une bête transformée en sénateur inamovible, s'agitent.
Ces docteurs veulent le divorce; ils soupirent vers cet idéal, comme les chevaliers, dont Cervantes s'est trop moqué, soupiraient vers une invariable fidélité. Du reste, ces messieurs du divorce ne s'agitent pas seulement pour se débarrasser de liens qui les gênent ou qui leur font honte chez les autres, ils se donnent une mission diabolique, car ils ne croient pas au diable, ils lui obéissent.
Le diable emploie donc les hommes, qui ont renoncé à leurs âmes en se faisant matérialistes, à constituer une théologie satanique, et en ce moment ils se proposent le dogme du mariage civil.
Cette erreur anti-Chrétienne est montés au Capitole auprès des oies antiques, mais elle cherche visiblement la roche Tarpéienne.
En attendant sa chute, cette erreur triomphe avec une majestueuse naïveté à l'Université qui l'enseigne dans ses écoles de droit, au prétoire où l'on affirme son existence et ses droits, et même dans les familles qui commencent à y croire. M. Thiers dirait qu'elle a remplacé dans les mœurs les pratiques saintes.
Le "mariage civil" pense être quelque chose, puisqu'il s'affirme; mais ses défenseurs acharnés lui portent le coup mortel en le déclarant un contrat civil, et dès lors un contrat révocable comme tous les autres.
Si ce n'est qu'un contrat comme les autres, il ne deviendra pas plus sacré à cause de l'exhibition grotesque d'un officier municipal qui pontifie. On peut remplacer dans les écoles primaires le Christ et l'image de la Sainte Vierge par la caricature d'un maire en écharpe bénissant deux nouveaux mariés, comme celle qu'on vient d'afficher aux mairies de Paris. Marianne en bonnet rouge, le maire en écharpe tricolore et le tableau en cadre doré, ne constituent pas un attirail qui puisse donner à ce pauvre mariage civil la force dont la loi athée voudrait le gratifier.
Et quand M. Naquet vient proposer de mettre en face du tableau des épousailles le tableau solennel du divorce (quel sera le costume des disjoints sur cette autre toile?), la loi humaine se sent désarmée, elle a rejeté son alliée toute puissante et nécessaire, l'Eglise.
Eh bien, l'Eglise apparaît sans qu'on l'appelle et, à l'heure où la loi humaine va périr pour s'être séparée d'elle, l'Eglise vient à son secours en lui apprenant qu'elle n'a qu'une chose à faire pour vivre: brûler ce qu'elle a adoré et adorer ce qu'elle a brûlé.
Telle est la leçon donnée par l'encyclique de Léon XIII lancée au moment où la misérable loi du mariage civil va succomber sous les coups du divorce.
Le pape remonte à l'institution du mariage, il montre le Dieu créateur l'instituant lui-même au commencement du monde, le Dieu rédempteur élevant le contrat au rang des sacrements, et le Dieu sanctificateur répandant les torrents de sa grâce dans ce sacrement.
Combien ce mariage indissoluble auquel concourt l'auguste Trinité nous apparaît magnifique sur les lèvres de Léon XIII, auprès de ce mariage-Naquet qui réclame le divorce comme sa conclusion nécessaire!
Aussi avec quelle force le pape a-t-il pu flétrir ce prétendu mariage civil! Il montre ce contrat bien inférieur au mariage païen, car l'Etat païen gardait certaines cérémonies religieuses, tandis que l'Etat athée non seulement n'en a point, mais, par une loi draconienne odieuse, il contraint les fidèles à passer devant l'officier civil avant de faire bénir leur union par le prêtre. Le césarisme païen, qui s'est tout attribué, n'a jamais osé revendiquer pareille part dans le mariage.
Le mariage dépouillé de tout caractère sacré, mis au rang des papiers d'affaires, devenu le sujet de la loi civile et soumis comme elle-même à tous les changements de caprices des hommes qui passent, enlève toute sécurité à la famille.
L'Etat peut demain méconnaître les droits du père, chasser la mère du foyer, s'emparer des enfants, leur donner ou leur enlever à son gré la légitimité.
Cette barbarie fait ressortir la douceur de notre mère l'Eglise, laquelle veille autrement sur ses enfants, assure leur avenir et leur dignité, les défend contre l'ennemi et contre eux-mêmes.
MM. Naquet et Ferry qui prétendent, l'un rompre l'indissolubilité du mariage et l'autre détruire l'autorité du père de famille, en même temps que tous deux déclarent l'Eglise leur ennemie, ne s'attendaient pas à trouver, à l'heure des débats législatifs, une voix si majestueuse que celle toujours vivante du pontife universel.

La Pèlerin, 28 février 1880.

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