Translate

Affichage des articles dont le libellé est couple. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est couple. Afficher tous les articles

dimanche 13 octobre 2013

Le carnet de madame Elise.

Conseils à une jeune mariée.

Les femmes tiennent à conserver l'intégrité de leur foyer paisible et de leur ménage uni, rien de plus légitime; mais pour réaliser ce désir, leur zèle est souvent indiscret et maladroit, et il faut bien reconnaître que si beaucoup de jeunes ménages deviennent rapidement désunis, monsieur n'est pas toujours le seul coupable.
Une fiancée considère volontiers les amis de son futur époux comme les perturbateurs naturel de sa vie rangée; parce qu'il lui a dit: "Gaston est un boute-en-train, ce que nous avons fait de farces ensemble! " et "Georges a choisi le droit pour que ses études ne l'absorbent pas; je l'ai trouvé plus souvent à Montmartre qu'à la Faculté, je t'assure !" et encore: "Henri est un bohème, il ne se couche jamais avant 4 heures du matin, il est vrai qu'il ne se lève guère avant 4 heures du soir" , elle a déclaré que Gaston, Georges et Henri seront rayés de leur cercle.
Au début, d'ailleurs, son mari ne fait nulle opposition: il est occupé d'elle, de son intérieur; cette existence nouvelle l'absorbe, il ne songe pas aux camarades de sa vie de garçon. Mais cette joie s'apaise, il se blase sur les émotions du pot-au-feu ou de l'achat d'un balai; il aime son intérieur, c'est un point fixe, le pivot autour duquel il tourne, mais il voudrait y recevoir quelques amis.
On lui propose alors Henriette, Jane, qui viendront dire à sa femme: Te rappelles-tu, ma chère, nos bonnes parties à la pension !" etc, etc., ces relations ne l'intéressent guère; à ce moment, il songe forcément à ses amis; on les a éloigné tous, il a envie d'aller les rejoindre; il ira peut- être... et comme il ne peux les retrouver qu'en dehors de chez lui, il commence à sortit, à délaisser sa jeune épouse; c'est le début de cette désunion qu'elle redoutait tant; où s'arrêtera-t-elle?
Si l'ostracisme avait été moins rigoureux, si la femme avait consenti à recevoir  ces jeunes gens de loin en loin, elle aurait pu sagement, en connaissance de cause, faire une sélection: garder Georges qui est un camarade joyeux et bon, écarter Henri qui est un mauvais conseiller.
Une femme est assez fine pour opérer ce petit triage doucement et sans éclat.
Si elle a agi de la sorte, dès que son mari s'ennuie, Gaston est là, sous la main; il s'en contente et se console plus aisément d'avoir perdu Henri.
D'ailleurs, il faut reconnaître que les jeunes gens les moins scrupuleux deviennent sévères quand il s'agit de leur nouveau foyer, ils écartent d'eux-même un compagnon de jeunesse qui est indigne de faire partie des relations de leur ménage; leur expérience est éclairée sur ce point.
Le rôle de la jeune femme est ainsi fort simplifié; après les premiers mois d'intimité, elle fera donc sagement de recevoir de temps en temps les amis que son mari lui désignera; elle mettra même une certaine coquetterie à parer son intérieur, à soigner sa cuisine, à se montrer gracieuse afin que l'orgueil de son époux soit agréablement flatté. Comme elle n'aura manifesté aucun parti pris, son époux sera sans défiance: elle pourra juger ces jeunes gens, distinguer ceux qui doivent être évités et ceux qui méritent d'être conservés pour constituer le noyau des vieux amis dont on aime à s'entourer quand l'âge mûr approche.

                                                                                             Mme Elise.

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 12 avril 1903.

samedi 24 août 2013

Les conditions de paix de Madame.



Nos lecteurs se souviennent sans doute de la communication qui nous avait été adressée la semaine dernière par un mari mécontent, et quelles conditions de paix il posait à sa femme pour éviter le divorce; voici la lettre que sa femme nous écrit aujourd'hui à ce sujet:

Madame,

J'ai appris avec indignation la démarche inqualifiable que mon mari à faite auprès de vous. (ceci entre parenthèses vous prouve que les hommes ne savent pas toujours garder un secret.)
S'il introduit une instance en divorce, le jugement sera prononcé contre lui, cela n'est pas douteux, car il a tous les torts. Dès qu'il pressentira ce résultat humiliant, mon mari hésitera à poursuivre ses démarches, je le sais, il préférera faire amende honorable.
A ce moment, je profiterai de son émotion pour le faire signer, devant notaire, l'engagement que voici: 

Je ne traiterai pas ma femme comme une domestique qu'on surcharge parce qu'on n'a pas la ressource de donner ses huit jours.

Je ferai moins de cas de la fatigue de mon labeur et je m'inquiéterai un peu plus de la fatigue qui résulte pour elle de l'entretien du ménage et de la direction de l'intérieur.

Je ne persisterai pas à croire qu'on peut nourrir une famille avec 5 francs par jour, alors que la moindre de mes soirées au dehors m'en coûte autant.

Je ne lui donnerai plus comme modèle de propreté et de bonne tenue la maison d'une de nos relations, dans le seul but de la vexer ou de l'humilier.

Je n'admirerai plus systématiquement toutes les femmes qui passent dans la rue et je louerai parfois la grâce élégante de mon épouse.

Je la traiterai avec galanterie.

Je ne fumerai pas dans toutes les pièces de l'appartement.

Je ne réserverai pas toute ma gaieté pour les étrangers et ma mauvaise humeur pour les intimes.

J'interromprai la lecture de mon journal pour répondre aux questions de ma femme par autre chose qu'un hum ! indifférent.

Quand je la conduirai au théâtre ou à la promenade, je ne prendrai pas la figure résignée d'un martyr, de façon à lui gâter tout son plaisir dès le début.

Quand elle aura du chagrin, je ne l'accuserai pas de pleurnicher par sensiblerie.

Je me préoccuperai de sa santé; je serai prévenant et doux.

Je ne la contrarierai pas devant les enfants.

Je ne la cantonnerai plus dans son rôle de ménagère et j'accepterai qu'elle prenne part aux conversations d'ordre élevé.

Je ne m'entêterai pas à décider seul les graves questions qui intéressent toute la famille, je dirai mes décisions quand il sera encore temps de les combattre.

                                                                Pour copie conforme,
                                                                                                                 Mme Elise.

Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 4 janvier 1903.

jeudi 22 août 2013

Le carnet de Madame Elise.

Les conditions de paix de Monsieur.




Un de nos lecteurs, qui signe: Mécontent nous adresse une lettre fort piquante:

       Madame,


Pourriez-vous me donner quelques conseils pour m'aider à suivre l'exemple de Carl Wilson, habitant Kenosha, dans le Wisconsin; ayant intenté une action en divorce contre sa détestable épouse, il consentit à la retirer devant les supplications de sa femme; en revanche, il obtint qu'elle signât devant notaire une séries de promesses dictées par lui.
Moi aussi, madame, j'ai une femme insupportable; j'ai l'intention de demander le divorce; pour m'en empêcher il faudra qu'elle se soumette aveuglément aux commandements que je lui imposerai.
Dites-moi par quelles formalités légales je dois la lier pour qu'elle ne puisse manquer, par la suite, aux conditions qu'elle aura acceptées.
Voici à peu près le texte que j'exigerai:

Je serai ordonnée et économe, avec intelligence et mesure.

Je ne tyranniserai pas ma famille sous prétexte de surveillance.

Je n'obligerai pas mon mari à faire dix méchants repas pour pouvoir donner une soirée.

Je ne me répandrai pas plus d'un quart d'heure par jour en récriminations contre mes domestiques et mes fournisseurs.

Je ne ferai pas de virement de fonds, prenant dans le budget de la nourriture pour augmenter celui de la toilette.

Je n'irai pas manger des gâteaux chez le pâtissier pour faire ensuite la petite bouche à table et me plaindre de mon estomac.

Je passerai plus de temps à la cuisine que dans mon cabinet de toilette.

Je n'obligerai pas mon mari à discuter la façon de chacune de mes robes.

Je n'irai qu'une fois par quinzaine dans les magasins de nouveautés.

Je raccommoderai les vêtements, le soir, à la lampe, silencieusement, sans crier que ma vie est monotone.

Je ne menacerai pas mon mari d'abandonner la direction du ménage et de m'émanciper, chaque fois qu'il prendra le plus petit plaisir.

Je ne l'accablerai pas de questions minutieuses et agaçantes sur l'emploi de son temps et celui de son argent.

Je saurai le louer quand il a réussi quelque entreprise et ne l'accablerai pas de reproche quand il a échoué.

Je ne l'abasourdirai pas de commérages inutiles.

Je saurai garder un secret.

Je ne serai pas fantasque; je ne bouderai pas une journée entière pour une parole un peu vive.

Je ne lui garderai pas rancune pour un rien; je ne tiendrai pas une comptabilité serrée des moindres offenses que j'aurais reçues, pour les rappeler, dans la suite, à chaque occasion.

   
   Pour copie conforme:

                                                                        Mme Elise.


Mon Dimanche, revue populaire illustrée, 28 décembre 1902.